On l'appelle "boîte noire", "crash recorder" ou encore enregistreur de données d’accident: ce petit boîtier se fixe sur les voitures et traque les accélérations des automobilistes, leurs changements de direction, leurs coups de frein, leur vitesse, leurs décélérations, leurs tonneaux et l’activation d’autres fonctions du véhicule comme les airbags, les phares et les clignotants. Tous ces événements sont enregistrés avant, pendant et après un accident.
Pour l’instant, ce boîtier est encore facultatif. Cependant, depuis plus d’une dizaine d’années, certaines compagnies d’assurance automobiles proposent des baisses de primes si l’assuré accepte volontairement de placer l’un de ces boîtiers sur son véhicule. Dès le mois de juillet 2022, les boîtes noires seront obligatoires sur tous les nouveaux types de véhicules, c’est-à-dire ceux que le constructeur n'a jamais mis sur la route. Dès juillet 2024, elle fera partie de l'équipement obligatoire des modèles de voitures nouvellement introduits sur le marché suisse et européen, véhicules de tourisme et utilitaires légers compris. Seule exception: les véhicules d'occasion dont la date de mise sur le marché est antérieure à 2022. Enfin, dès 2026, les nouveaux véhicules lourds devront en être équipés et dès 2029, tous les véhicules lourds.
Un cadre législatif
"Au risque de surprendre, nous ne serons en réalité pas beaucoup plus surveillés qu'avant", a expliqué jeudi Fanny Roulet, avocate spécialisée en droit de la circulation routière, dans l'émission On en parle sur la Première. "Ce système d’enregistrement créé par le constructeur américain General Motors a commencé à être installé dans les véhicules dans les années 1990. Au fil du temps, les véhicules ont été équipés d’enregistreurs de données." Le système avait initialement été créé pour permettre au constructeur de lui-même se défendre en cas d’action juridique d’automobilistes jugeant leur véhicule défectueux.
Fanny Roulet poursuit: "Le changement législatif qui a lieu en 2022 a pour but de poser un cadre juridique à ces enregistrements parce que techniquement, ils ne sont pas forcément accessibles aux autorités. Par exemple, Volkswagen n’a ouvert l’accès à ces systèmes que depuis 2018, et Mercedes n’en permet toujours pas l’accès. Avec cette nouvelle législation, les constructeurs seront obligés de rendre ces systèmes accessibles à des intervenants externes, comme un expert de la circulation en cas de procédure judiciaire", précise-t-elle.
Des données à l’abri des hackers
L'avocate se veut rassurante quant à la sécurité des informations sur la conduite des automobilistes. Les données enregistrées sont stockées dans un boîtier à l’intérieur de la voiture, et non dans un Cloud, ou en ligne. Il n’y a donc aucune chance qu'un hackeur puisse s'en emparer. De plus, elles sont enregistrées de manière très limitée: "Ce n’est que si un événement de circulation se produit, comme une décélération très forte ou le déclenchement des airbags, que le système d’enregistrement agit, 5 secondes avant et 0,25 seconde après l’événement. L’enregistrement est beaucoup plus limité que celui de la boîte noire d’un avion. Les voix ne sont pas enregistrées, et il n’y a aucune localisation du véhicule."
Dans l’exercice de sa profession, Fanny Roulet a déjà été confrontée à des affaires dans lesquelles l’exploitation des données d’une boîte noire s’est révélée cruciale. Cela peut en effet jouer en faveur ou en défaveur des automobilistes. "Si un ou une automobiliste a oublié son clignotant et qu'il y a un choc, on pourra déterminer qu'il ou elle a commis une faute. Évidemment, ces éléments de preuve à eux seuls ne suffisent pas à déterminer la responsabilité."
Sujet radio et propos recueillis par Théo Chavaillaz
Adaptation web: Myriam Semaani