La coopération avec la Confédération en période de situation dite "extraordinaire" a généralement bien fonctionné, observe la Conférence des gouvernements cantonaux (CdC) dans son rapport publié vendredi après deux ans de pandémie. En revanche, le passage à la situation "particulière", en juin 2020, et le manque consécutif de préparation cantonale à la deuxième vague à l’automne ont révélé des failles.
Les risques ont été sous-estimés durant l'été 2020 par la Confédération et les cantons, a observé le président de la CdC, le Grison Christian Rathgeb. Résultat: la Confédération a manqué de temps pour consulter les cantons en vue de la deuxième vague de Covid-19 qui s'est révélée particulièrement meurtrière.
Les mesures de protection sont alors "arrivées trop tard", a admis Lukas Engelberger, président de la Conférence des directeurs cantonaux de la santé. Il faut donc disposer de meilleurs outils et processus de coordination.
Etat-major de crise intégrant les cantons
La CdC fait 15 propositions d'amélioration de la collaboration entre la Confédération et les cantons. La plupart d'entre elles ne concernent pas seulement des cas de crise sanitaire. Elles sont aussi valables lors d'une crise de réfugiés ou une pénurie d'électricité, par exemple.
Ainsi, il faut intensifier et institutionnaliser les échanges entre la Confédération et les cantons davantage en amont des décisions. En cas de crise, la Confédération est priée de mettre sur pied un état-major permanent et transdépartemental qui intègre des représentants des cantons afin de préparer les bases de décisions politiques à l’échelon fédéral. Par ailleurs, elle est invitée à réfléchir au rôle et à l’éventuel développement de l’Etat-major fédéral Protection de la population (EMFP).
La consultation des cantons sur les dispositions à prendre doit être garantie et améliorée, même dans l’urgence, juge la CdC. De leur côté, les cantons sont appelés à accélérer au maximum leurs procédures internes en période de crise.
Unifier la communication
Les conférences intercantonales nationales doivent, elles, collaborer davantage et mettre en place un organe de coordination technique permanent. Parallèlement, les cantons doivent mieux utiliser le potentiel offert par les conférences régionales pour favoriser les échanges et la coordination.
La CdC souhaite aussi une amélioration de la communication de crise. Confédération, cantons et communes doivent mieux se concerter et s'entendre sur les messages clés et les mesures de communication, puis s'y tenir. Cela évitera que la population soit confrontée à des messages différents parfois contradictoires. Une telle situation peut saper sa confiance dans les autorités et la crédibilité de ces dernières.
Empêcher le tourisme des bistrots
Autocritiques, les gouvernements cantonaux reconnaissent que des mesures purement régionales ne sont pas toujours pertinentes. Lukas Engelberger cite l'exemple de la fermeture des restaurants romands en automne 2020, alors que les cantons alémaniques ont pris cette mesure bien plus tard.
"Il ne faudra plus être naïf à l'avenir: la mobilité est forte en Suisse", a souligné le ministre de Bâle-Ville. Dans une telle situation, les cantons doivent rendre plus rapidement les commandes à la Confédération pour qu'elle arrête des mesures unifiées.
jfe avec ats
Clarifier la loi sur les épidémies
La CdC se réjouit en outre que le Conseil fédéral veuille réviser rapidement la loi sur les épidémies. Selon elle, cette loi doit clarifier davantage la répartition des tâches et le passage d'une situation épidémiologique à l'autre. Des incertitudes sont apparues à plusieurs reprises concernant les compétences et la latitude revenant à la Confédération et aux cantons
Une telle révision de loi doit aussi concerner les aides financières entraînées par les mesures prises par le Conseil fédéral, estime la CdC. La Confédération doit en spécifier la responsabilité, fédérale ou cantonale, dès qu’elle prend une mesure. Ce thème a été trop souvent laissé de côté dans la gestion de la crise.
Les communes doivent aussi être mieux intégrées dans les processus de décision. La CdC recommande aux cantons d'évaluer comment celles-ci pourraient être consultées de manière plus précoce, notamment dans la protection des personnes âgées. Les communes gèrent les EMS et jouent un rôle prépondérant dans les centres de tests.
Masques et tests: les problèmes de coordination sont programmés
En cas de nouvelle vague de Covid-19 cet automne, les problèmes sont programmés dans la répartition des compétences entre la Confédération et les cantons, qui gèrent actuellement la pandémie. Ces derniers ne pourront guère réintroduire, à eux seuls, une obligation de porter le masque, selon Lukas Engelberger.
Nous risquons de ne plus avoir de régime de tests unifié en Suisse, qui prévoit qui peut se faire tester gratuitement et à quelles conditions.
Les règles actuellement en vigueur pour mettre en oeuvre des mesures susceptibles d'être prises au niveau national ne sont pas adaptées lorsque les cantons dirigent la manoeuvre, observe le président de la CDS. Il en va de même des tests de coronavirus, car la régulation nationale qui les régit sera bientôt supprimée, rappelle Lukas Engelberger.
"Nous risquons de ne plus avoir de régime de tests unifié en Suisse, qui prévoit qui peut se faire tester gratuitement et à quelles conditions", met en garde le ministre bâlois. Et d'appeler le Conseil fédéral à corriger rapidement le tir, avant que ce sujet ne soit traité par le Parlement.
Le président de la CDS prédit qu'une vaccination de rappel sera certainement d'actualité en automne. Le vaccin contre les nouveaux variants arrivera après l'été.