Le soleil fait son retour. Les températures remontent. L'été arrive. Autour du Léman, les envies de faire un tour sur le lac grandissent. Mais trouver une place d'amarrage pour un bateau reste toujours un parcours du combattant. Les listes d'attente ne se réduisent pas, au contraire, elles ont plutôt tendance à légèrement s’allonger.
A Genève, près de 700 personnes patientent, selon les autorités. Et ça peut être long. Entre 4 et 7 ans, précise le canton. Une problématique que l'on retrouve tout autour du Léman. Morges, Vevey, Montreux, Lausanne. Le constat est le même. Il faut attendre entre 2 et 15 ans pour une place, selon la taille de l'embarcation.
Le réchauffement climatique et la crise sanitaire ont probablement renforcé l’attrait pour le lac. Retraité, Alain Ducret attend une place pour un bateau depuis 2 ans. "S'ils me donnent une place dans 10 ans… j'en aurai plus besoin".
Et il devra patienter. "Potentiellement, chaque année, nous avons une centaine de personnes qui expriment leur envie d'obtenir une place", explique Gilles Mulhauser, directeur général de l'Office de l'eau du canton de Genève, qui gère une vingtaine de ports.
Peu de places se libèrent. Autre élément à Genève: depuis l’an dernier, une nouvelle directive ne permet plus de transférer la place au moment de la vente du bateau. "Cela engendre un ralentissement de la vente des bateaux", observe Gilles Mulhauser, ce qui ralentit également la rotation des places.
Les bateaux ventouse
Pourtant, certains bateaux sortent peu. Au Bouveret, le président de la commune de Port-Valais, Pierre Zoppelletto, estime que plus de 2/3 des bateaux sortent chaque année. "Si on constate que certains bateaux ne quittent jamais le port, on écrit aux propriétaires pour les encourager à revenir ou à céder leur bateau. On ne laisse pas une place plus de 5 ans sans que le bateau bouge".
Sur le terrain, le travail de contrôle est effectué au Bouveret par David Droz, garde-port. "Quand on voit des bateaux avec les bâches remplies d'eau ou les amarres sur le point de se casser, on avise le propriétaire. S'ils ne font vraiment rien, le bateau est évacué". Sur les 650 places qu'il contrôle, David Droz estime qu'une dizaine de places sont problématiques.
Autre problème. Les canards qui investissent les bateaux. Et pour les navigateurs, c'est une tuile. "Les foulques et les grèbes font leurs nids sur les embarcations qui ne sortent pas. Et dans ce cas, le propriétaire ne peut pas toucher le bateau avant que les œufs soient éclos. Le nid est indéplaçable car les parents ne le retrouveraient plus", explique le garde-port.
Certains sentent le bon filon. Depuis le début de l'année, Nicolas Werner et Godefroy Besnier ont créé leur entreprise à Genève. "Nous sommes partis du constat que pas mal de gens manquaient de temps pour entretenir leur bateau. C'est un cercle vicieux. Moins on entretient son bateau, moins on a envie d'y venir."
Un bateau pour plusieurs
Pour faire face à cette problématique, une solution revient fréquemment chez les interlocuteurs rencontrés par 15 Minutes : le partage de bateau. En moyenne, les navigateurs font un peu moins de trois sorties par année, relève Gilles Mulhauser. Mutualiser son embarcation permet d'en faire profiter plus de monde, la sortir plus souvent et partager aussi les frais. A Genève, l'association des propriétaires de bateau (APB) milite d'ailleurs pour ce partage.
"Les jeunes le font de plus en plus", constate Giovanna Fanni, présidente de l'APB. "Pour l'instant, rien n'est prévu à Genève pour clarifier le partage de bateau et la copropriété. Les propriétaires ont un peu peur et attendent d'avoir des règles bien définies."
Gilles Mulhauser, directeur général de l'Office de l'eau du canton de Genève, affirme que le travail sur les règlements est en cours. Mais des solutions de partage existent déjà. Depuis 2 ans, les ports lausannois proposent par exemple 17 amarrages exclusivement attribués au partage de bateau. Les embarcations sont gérées par quatre clubs nautiques.
Katia Bitsch, Guillaume Rey