Depuis la fin de la Guerre froide, de nombreux abris antiatomiques ont été négligés, à l'image de ce bunker genevois que Christian Sinigaglia est venu réparer: "Le joint était fermé en permanence. Il ne fait donc plus du tout d'étanchéité", explique le directeur de l'entreprise Abriprotect.
Avec la menace de frappes nucléaires russes, le carnet de commandes de cet installateur d'abri a bondi de 30% depuis début mars. A travers la Suisse romande, communes et particuliers le sollicitent surtout pour des travaux de rénovation.
"Je fais ce métier depuis 30 ans. Jusqu'à présent, nous n'étions pas les bienvenus, parce qu'il y avait d'autres priorités. Mais aujourd'hui, on voit que les gens ont vraiment peur et qu'ils réalisent que c'est une chance d'avoir des abris et d'être protégés en cas de guerre."
Des commandes de l'étranger
L'un des trois derniers fabricants suisses de matériel d'abris se situe dans la commune d'Elgg, en plein coeur de la campagne zurichoise. Depuis l'invasion russe en Ukraine, l'usine Mengeu croule sous les demandes.
"Ici, nous avons des commandes qui vont être envoyées en Suisse: des toilettes sèches et des lits. Actuellement, on a aussi beaucoup de demandes de l'étranger, pour la construction de nouveaux abris, principalement d'Allemagne, jusqu'en Ukraine aussi. Mais c'est difficile de construire un abri du jour au lendemain", note Christoph Singer, le directeur de l'entreprise.
Porte blindée, système de ventilation… Depuis plus de 60 ans, cette entreprise familiale fabrique des composants censés résister à n'importe quelle attaque. "Le système est conçu de manière à assurer un maximum de protection", souligne le patron.
365'000 abris en Suisse
Avec une qualité suisse garantie, la société oeuvre dans un marché qui compte quelque 365'000 abris antiatomiques. Le jour de la visite du 19h30, l'entreprise rénovait un gigantesque abri sous la ville thurgovienne de Frauenfeld, conçu pour 600 habitants.
Le coût des travaux est devisé à un million de francs. Le patron de Mengeu se défend de profiter d'une menace de guerre. "Je vois plutôt qu'on a besoin de nous en ce moment, que la population remarque qu'on est là. Nous le voyons à la réaction des gens, qui nous remercient d'être là", souligne Christoph Singer.
Même si tout le monde espère ne jamais devoir utiliser ces abris pour de vrai.
Julien Guillaume / fme