Que l'on soit croyant ou non, mariage et enterrement sont des moments sensibles durant lesquels le rituel est essentiel. Mais si certains ont toujours recours aux services religieux, d'autres préfèrent la voie laïque, plus proche de leurs envies.
Tel est le cas de Gisela et Lionel, qui se marient en juin devant une centaine de proches. Pour officier, ils n'ont pas voulu d'un prêtre ou d'un pasteur, mais ont choisi un officier laïc.
Lionel s'en explique dimanche dans le 19h30: "Je ne suis pas complètement en accord avec toutes les choses qui sont dites à l'Eglise. On s’est dit qu’on avait la possibilité de choisir vraiment tout ce qu’on voulait et avoir une cérémonie un peu plus à notre image."
Apporter quelque chose de différent
C’est Paloma Lopez qui célébrera leur union. Avec Cinzia Nori, elles ont lancé en début d’année leur petite entreprise d’officiantes laïques, un métier qui se développe, mais qui n'a pas de statut légal en Suisse. Les deux femmes estiment qu'elles peuvent apporter quelque chose de différent dans la cérémonie.
"On va vraiment mettre au cœur de la cérémonie l’histoire des mariés, selon leurs valeurs, leurs personnalités. On va essayer de capter le ton qu’ils veulent donner à leur cérémonie: romantique, solennel, avec des touches d’humour", explique Cinzia Nori.
Et Paloma Lopez de préciser qu'elles ont été surprises de la forte demande pour leur service laïc pour les mariages.
Une formation qui suscite un vif intérêt
Une formation a récemment été organisée dans le canton de Genève pour les futurs officiants. Ceux-ci y apprennent toutes les facettes du métier, de l’organisation des rituels à la gestion de leurs émotions, pour mener à bien ces cérémonies si importantes dans une vie tout en parvenant à gérer toutes les situations de manière rationnelle.
La pandémie a suscité un vif intérêt pour cette formation: l’organisatrice Sandra Widmer Joly a reçu 120 demandes pendant cette période: bien plus que de places à disposition pour ce cours. A ses yeux, la pandémie a aussi révélé l'importance de dire au revoir, car beaucoup de familles en ont été privées. Mais ce passage est important pour pouvoir entrer dans le deuil.
Le sociologue Philippe Gonzalez confirme qu'il s'agit là d'un besoin fondamental pour l’humain: "Les rituels, ça marque des seuils, des passages d’une étape à une autre, c’est en particulier vrai pour les moments qui sont délicats dans la vie. Les moments comme s’unir à quelqu’un d’autre, les moments comme perdre une personne ou accueillir quelqu’un dans le monde."
Pour ce spécialiste, on essaie de codifier ces moments "avec des gestes qui nous ressemblent, qui ressemblent à la culture dans laquelle on est plongés, et puis aussi qui disent les valeurs auxquelles on aime s’identifier."
Remise en question pour les églises traditionnelles
Si ce besoin de rituel est manifeste, il semble échapper aux religions établies, car les cérémonies célébrées dans les églises et temples helvétiques sont de moins en moins nombreuses: avant la pandémie, une parenthèse qui a tout arrêté, les mariages religieux étaient en diminution de près de 30%, alors que les unions civiles étaient en baisse de 6%.
L’arrivée croissante des officiants laïcs sur le marché des cérémonies remet aussi les Eglises en question, mais certains le voient aussi comme une opportunité.
Yves Bourquin, président du conseil synodal de l'Eglise réformée neuchâteloise, estime que "c'est une chance", car cela pose aux Eglises historiques un "défi d'observation": "Ces personnes qui se lancent ont des choses à nous apprendre et à nous apporter sur comment le monde actuel a envie de vivre des moments de rite. Et là, on a une chance de nous renouveler."
Léa Jelmini/boi