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De plus en plus de jeunes accros aux paris sportifs en ligne

Un homme effectue des paris sportifs en ligne. [Depositphotos - Wavebreakmedia]
Paris sportifs en ligne: très, très addictifs / On en parle / 15 min. / le 1 juin 2022
Les paris sportifs en ligne et leurs publicités inquiètent les milieux de la prévention des addictions. C’est le constat du Groupement romand d’études des addictions, qui demande des mesures pour protéger les personnes vulnérables, dont les jeunes.

Le frisson du pari en ligne, la perspective du gain d'argent facile et la possibilité de tester son expertise personnelle dans un sport qui les passionne ont déjà séduit de nombreux Suisses et Suissesses. Les jeunes semblent être la cible privilégiée de cette industrie, qui s'adresse à ce public en le tutoyant par exemple. Pourtant, les paris sportifs sont avant tout des jeux d'argent. Comme pour les roues de la chance au casino, en général les pertes sont supérieures aux gains. Les coups de chance existent certes, mais plus on joue, plus on perd.

Des chiffres inquiétants

Le GREA, ou Groupement romand d'études des addictions, estime que les pertes cumulées des parieurs sportifs, sur les plateformes légales et illégales, ont été multipliées par 10 en 10 ans en Suisse. Une forte accélération a été constatée durant la pandémie de Covid, avec une augmentation des pertes de 50% en 2021. Pour Jean-Félix Savary, secrétaire général du GREA, le développement des paris en ligne est à l'origine de l'augmentation de ces pertes: "Aujourd'hui, les ordinateurs et les systèmes de ciblages des algorithmes sont très performants. L'industrie des jeux d'argent est la première à avoir développé, dans les années 2010 et 2020, ces algorithmes de manière agressive."

Pire encore, ces algorithmes seraient capables de détecter les utilisateurs et utilisatrices vulnérables, en fonction de leur comportement en ligne. "La manière de jouer, les sommes misées et la fréquence de connexion sont autant d'éléments permettant de détecter les joueurs et joueuses excessifs." Des publicités les incitant à continuer à jouer apparaissent alors. "C'est une pratique de marketing agressive de l'industrie. Elle est utilisée dans le monde entier."

Internet fait tomber la barrière

Avant l'avènement d'internet, il fallait entrer dans un casino ou dans un bar PMU pour parier sur des matchs de sport. Cela représentait une forme de barrière, selon Jean-Félix Savary: "Le joueur est aujourd'hui individualisé sur son téléphone. Auparavant, l'ambiance était plutôt collective et ces lieux posaient un cadre aux joueurs et joueuses, même s'il y avait bien sûr déjà des problèmes d'addiction."

Autre problème posé par les sites de paris en ligne, l'exacerbation de l'illusion du contrôle, ou de pouvoir maîtriser le résultat du jeu. "Comme les personnes qui parient connaissent bien leur sujet, par exemple les différentes équipes de football ou les joueurs de tennis, elles pensent pouvoir battre l'opérateur. Mais de l'autre côté, il y a des machines avec une énorme puissance de calcul. À la fin, c'est toujours l'opérateur qui gagne."

Une accélération pendant le Covid

Le Centre du jeu excessif du CHUV le constate: les jeunes de moins de 30 ans accros aux paris sportifs sont de plus en plus nombreux. "Ces dernières années, ils sont passés de 20% à 40% des demandes", précise Jean-Félix Savary. Autre élément à prendre en compte dans le calcul, la nouvelle Loi sur les jeux d'argent entrée en vigueur en 2019, "au mauvais moment. Elle ne met pas de limites au marketing en ligne. Il y a une disposition sur la publicité qui à notre sens n'est pas respectée. Les autorités de contrôle interprètent ces limites légales de manière extrêmement extensive. Pourtant, selon la loi, la publicité ne doit pas être outrancière, ne doit pas cibler les jeunes ou induire le public en erreur."

Sujet radio et propos recueillis par Mathieu Truffer

Adaptation web: Myriam Semaani

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