Les aides aux foyers accueillant des réfugiés ukrainiens sont-elles taxées aux impôts?
Selon les derniers chiffres du Secrétariat d’Etat aux migrations, 54'000 Ukrainiennes et Ukrainiens ont trouvé refuge en Suisse et obtenu le statut de protection S. En parallèle, des milliers de foyers suisses leur ont ouvert leurs portes, ce qui donne lieu à une cohabitation inédite. L'hébergement de personnes réfugiées a-t-il une incidence sur la déclaration d’impôts? C’est la question que se pose Cédric, un auditeur d’On en parle habitant la région lausannoise.
Un exemple parmi d’autres
Cédric et sa famille obtiennent une aide de 500 francs par mois pour l’hébergement d’une petite Ukrainienne et de sa grand-mère dans leur appartement. Ce montant correspond à la part dédiée au loyer que verse l’EVAM, l'Etablissement vaudois d’aide aux migrants, à la grand-mère, qui reverse ensuite cette somme à Cédric comme contribution au loyer. Ils ont d’ailleurs conclu un contrat de bail, qui pourrait s’élever à 6000 francs pour une année. Or, cette somme perçue par Cédric sera potentiellement taxée par l'Office des impôts. L'EVAM confirme qu'en cas de question, elle signale cette potentielle taxation aux familles d’accueil.
Cette famille d’accueil sera-t-elle donc taxée sur les revenus perçus par l’EVAM dans sa prochaine déclaration d’impôts? Interrogée par On en parle, l’administration vaudoise "ne peut pas répondre par un simple ‘oui’ ou ‘non’. Une analyse de l’affectation des montants doit être effectuée. Nous allons nous coordonner avec l’EVAM et une communication interviendra en temps voulu. Toutes les informations et les instructions seront mises à disposition de tout contribuable vaudois pour l’établissement de la déclaration d’impôt 2022, soit début 2023."
Une approche différente selon le canton
Hasard du calendrier, le 8 juin 2022 a lieu une séance des directions romandes du fisc, durant laquelle cette question est justement à l’ordre du jour. Contacté par On en parle, le canton de Genève indique attendre cette rencontre pour donner une réponse coordonnée.
Le canton de Berne se montre également prudent: "Tant que les contributions constituent un remboursement de frais, une indemnisation des coûts occasionnés, ces montants cantonaux ne sont pas soumis à l’impôt sur le revenu. Dans le canton de Berne, les familles d’accueil peuvent percevoir une indemnité forfaitaire de 195 francs par personne et par mois […] En l’état actuel des choses, cette indemnité pourra être déclarée dans la déclaration d’impôt pour l’année 2022 comme compensation de frais généraux, qui n’est pas imposée."
Enfin, Neuchâtel, Fribourg, le Jura et le Valais sont plus catégoriques: "Les montants octroyés aux ménages hébergeant des réfugiés sont considérés comme des défraiements sans conséquence fiscale. Ils ne font donc l’objet d’aucune imposition. En contrepartie, aucune déduction pour personne à charge n’est admise."
Défraiement ou revenu?
Contacté par On en parle, Youssef Wahid, chef du Service des contributions du canton de Neuchâtel, explique la décision de ne pas imposer le forfait de 340 francs par mois octroyé par le canton aux familles d’accueil. "Lorsqu’il s’agit d’un défraiement, comme la couverture de frais d’électricité ou de repas, il ne s’agit pas d’un revenu. En revanche, la situation change dès que les personnes réfugiées trouvent un travail."
Pourquoi de telles différences d’approches entre cantons? "Ces approches sont similaires sur le fond: si l’argent couvre une indemnité, il n'est pas imposable. S’il s’agit d’un loyer, il est alors imposable car il s’agit d’un revenu supplémentaire pour les personnes."
Par exemple, la situation est différente dans le cas d’une résidence secondaire mise à disposition de personnes réfugiées. Un loyer de la part du canton est alors perçu, donc imposable.
Une enquête d’Isabelle Fiaux, Cécile Bétrix et Bastien von Wyss
Adaptation web: Myriam Semaani