Selon la directrice générale d'Alpiq, l'électricité pourrait venir à manquer en Suisse dès l'hiver prochain. A cette période, les réservoirs de stockage pour l'hydraulique sont très peu remplis et la dépendance aux ressources étrangères se fait plus forte.
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"S'il n'y a rien à importer, on peut finir par devoir réduire la consommation. D'abord pour l'industrie et ensuite peut-être pour les clients finaux", avance Antje Kanngiesser lundi dans La Matinale.
Celle-ci déplore un "manque de diversification" et estime que les autorités politiques ont "peut-être" trop compté sur les importations, notamment en provenance de Russie.
"On est sorti trop vite de l'énergie fossile et entré trop lentement dans le renouvelable. Maintenant, les embargos sur les hydrocarbures font qu'on n'a plus assez d'électricité."
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"Investir dans le renouvelable, la seule chose à faire"
Antje Kanngiesser est à la tête du deuxième plus grand fournisseur d'électricité en Suisse. Elle regrette la forte dépendance aux importations et plaide pour un investissement massif dans les énergies renouvelables.
"Investir dans le renouvelable, c'est la seule chose qu'il faut faire. Nous pouvons être autonomes dans ce domaine. Il y a de l'eau, du vent et du soleil chez nous. Il faut mettre l'accent sur la production et le stockage, c'est notre système du futur: on doit se passer de l'énergie fossile", explique-t-elle.
Selon la patronne d'Alpiq, la situation est inquiétante, avec une hausse des prix et des importations malmenées par le contexte international et la guerre en Ukraine.
"La Suisse a besoin des pays voisins pour s'approvisionner en électricité. En France, plus de la moitié des réacteurs ne sont pas actifs. L'Allemagne limite la production à partir de gaz et la situation pourrait être la même pour l'Italie avec les sanctions européennes prises contre la Russie."
Projets bloqués
Alpiq mise sur l'énergie renouvelable, assure Antje Kanngiesser, avec de nombreux projets en cours. "On a investi 750 millions en Suisse ces cinq dernières années, dont un demi-milliard dans l'hydraulique. Il y a aussi des programmes dans l'éolien. Mais beaucoup de ces projets coincent au niveau des procédures et on ne peut pas les réaliser."
La patronne germano-suisse estime que les oppositions sont parfois trop faciles en Suisse. "Des litiges peuvent être lancés à chaque pas de la procédure et ils finiront toujours au Tribunal fédéral, ça prend des années. La procédure doit être plus rapide."
Elle relève que beaucoup de pays ont entamé des "voies rapides" pour mettre en place des infrastructures critiques pour l'approvisionnement. "Ça existe dans presque tous les pays autour de la Suisse. Je pense qu'on peut aussi aller dans cette direction."
Propos recueillis par David Berger/gma