"Nous sommes les témoins d'un changement d'époque qui ébranle et modifie", écrit la conseillère fédérale en charge de la défense Viola Amherd en préambule du rapport annuel du SRC. Le conflit impose à l'Europe et à la Suisse de repenser la politique de sécurité. Isolée, affaiblie militairement et économiquement, la Russie sera un acteur difficile et dangereux des années durant.
La Finlande et la Suède ont demandé leur adhésion à l'Otan et les Etats européens s'apprêtent à augmenter massivement leurs dépenses en matière de défense. Le budget de l'armée suisse suivra aussi cette tendance.
Nous sommes les témoins d'un changement d'époque qui ébranle et modifie
Sécurité alimentaire
La guerre en Ukraine met en péril la sécurité alimentaire à l'échelle mondiale, a rappelé l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture. Une pénurie peut menacer l'existence, mais aussi entraîner l'instabilité de certains gouvernements.
La Suisse doit donc se préoccuper de la sécurité de l'approvisionnement, tout en gérant aussi les mouvements de réfugiés, les activités d'influence et les cyberattaques. "La Suisse est confrontée à un vrai défi, car des Etats étrangers, parfois dotés de moyens considérables, s'attaquent notamment à des PME de notre pays", a relevé le directeur du SRC Christian Dussey, lundi en conférence de presse.
La Suisse est confrontée à un vrai défi, car des Etats étrangers, parfois dotés de moyens considérables, s'attaquent notamment à des PME de notre pays
La guerre en Ukraine entraîne également une hausse des activités d'espionnage et de cybercriminalité. Plusieurs Etats européens ont expulsé des officiers du renseignement russes. Moscou pourrait déployer ses effectifs dans des Etats qui n'ont pas procédé à des expulsions, comme la Suisse et la Genève internationale. Selon Christian Dussey, le SRC n'y a toutefois "pas constaté de hausse de l'espionnage depuis le début de la guerre en Ukraine".
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Pandémie et radicalisation
Dans son rapport annuel, le SRC note le renforcement de l'extrémisme violent durant la pandémie et estime que ce milieu devrait s'apaiser avec la fin de la crise. "Il n'est toutefois pas exclu qu'il se tourne vers d'autres thèmes", a précisé Christian Dussey.
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En 2021, 202 événements ont été observés dans le domaine de l'extrémisme de gauche violent et 38 dans celui de l'extrémisme de droite violent. Contrairement à l'extrémisme lié au Covid-19, les extrémismes de gauche et de droite devraient se renforcer. Les violences devraient augmenter surtout en lien avec des confrontations entre les deux blocs.
Pour le SRC, la menace terroriste en Suisse reste élevée. Le scénario le plus probable en Suisse est actuellement celui d'un acte de violence commis par un auteur isolé et inspiré par le djihadisme selon un mode opératoire très simple.
Genève, un centre névralgique
Le rapport indique également que Genève est le centre névralgique des activités d'espionnage en Suisse. Interrogé dans Forum, Christian Dussey avance comme explication le nombre d'organisations internationales, de missions diplomatiques, de centres de recherches, de multinationales et de firmes de négoce présentes à Genève.
"Tout cela forme un centre névralgique pour des Etats qui cherchent à gagner de l'information, des secrets de fabrication, ou à pousser ou manipuler différentes décisions", conclut le directeur du SRC.
ats/vajo
Rivalité entre les Etats-Unis et la Chine
L'ordre mondial est déjà marqué par la rivalité stratégique entre les Etats-Unis et la Chine. Le partenariat anti-occidental entre la Chine et la Russie est devenu plus étroit et le phénomène pourrait se renforcer avec la césure de février 2022. "Une rupture entre la Russie et la Chine est peu probable, notamment en raison de la perspective d'acquisition de matières premières bon marché", a estimé Christian Dussey.
Le monde se scinde en deux sphères d'influence, l'une américaine, l'autre chinoise. Les réponses communes aux défis globaux que sont le terrorisme, la prolifération nucléaire, les pandémies ou encore le changement climatique sont de plus en plus difficiles en raison de ces confrontations entre blocs.
Les Etats occidentaux ont pris conscience de leur dépendance à la Chine et enclenché un processus de "découplage". Les sanctions contre la Russie vont encore réduire les relations de l'Occident avec le bloc russo-chinois.
Instabilité africaine
Depuis 2021, le continent africain a connu une vague de bouleversements politiques, pointe encore le rapport. C'est le cas au Mali, au Soudan, au Tchad, en Guinée, au Burkina Faso et en Ethiopie. Toute la région est instable.
La Syrie et l'Afghanistan sont aussi sujets à un environnement instable. Mais, en raison de la guerre en Ukraine, ces crises régionales se verront porter encore moins d'attention internationale.