Guy Parmelin "recommande" de se préparer à baisser le chauffage l'hiver prochain
La Suisse risque une pénurie de gaz l'hiver prochain. Des mesures pour constituer des réserves sont prises. Mais des réductions de consommation voire des contingentements ne sont pas exclus, avertit le Conseil fédéral.
"Nous ne sommes pas une île, la guerre en Ukraine et la crise énergétique globale touchent aussi la Suisse. Dans ce contexte, il n'y a aucune certitude sur ce qui nous attend", a averti la conseillère fédérale en charge de l'Energie Simonetta Sommaruga.
"Il y a aujourd'hui un risque concret de pénurie de gaz", a renchéri le conseiller fédéral en charge de l'Economie Guy Parmelin, mercredi devant la presse à Berne.
Pénurie pas exclue
La Suisse ne dispose d'aucune installation de stockage de gaz propre et dépend donc entièrement des importations, alors que les flux de gaz russe vers l'UE sont en chute libre. Jusqu'à trois quarts des livraisons de gaz en Suisse se font via l'Allemagne.
Si les installations de stockage ne peuvent pas être remplies comme prévu, une situation de pénurie ne peut pas être exclue pour l'hiver prochain, avertit le Conseil fédéral dans un communiqué.
L'industrie gazière suisse doit constituer des réserves de gaz hivernales à l'étranger et disposer d'options pour des livraisons supplémentaires, selon un concept présenté en mai.
>> Lire aussi : Le gaz naturel liquéfié (GNL) pourrait être une alternative au gaz russe
Quatre scénarii
Quatre scénarii sont prêts pour faire face à une pénurie de gaz, allant du statu-quo à une pénurie persistante. L'industrie suisse n'utilise que peu de gaz. "Le problème, ce sont les chauffages", a souligné Guy Parmelin.
Dans un premier temps, la Confédération lancera des appels à la réduction de la consommation dans le cadre d'une campagne de communication nationale. Les entreprises équipées d'installation biocombustibles seront aussi appelées à se préparer à acheter du mazout, même plus cher, et à tester la commutation (passage du gaz naturel au mazout).
>> Les précisions de Forum :
Pas d'exception
La population doit-elle se préparer à baisser le chauffage à la maison? "C'est en tout cas une recommandation", selon Guy Parmelin. Entre 5 à 7% de gaz sont économisés par degré Celsius en moins, ce qui aiderait à détendre la situation a-t-il rappelé.
En cas de pénurie, des restrictions de consommation pourront être ordonnées, par exemple des restrictions du chauffage de bâtiments non occupés ou de salles de gymnastique. La commutation des installations biocombustibles pourrait être imposée par voie d'ordonnance.
En cas de pénurie persistante, un contingentement serait mis en oeuvre. Dans un premier temps, les ménages privés et les services essentiels, comme les hôpitaux, ne seront pas touchés, a rappelé Guy Parmelin. Mais il n'y aura sinon pas d'exception.
"Chacun doit se remettre en question"
Invité dans l'émission Forum de la RTS Guy Parmelin précise le type d'économies que peuvent faire les particuliers: "Chacun doit se remettre en question et voir ce qu'il peut économiser. On parle de gaz, mais cela vaut aussi pour l'électricité."
"Les spécialistes disent que l'on peut facilement économiser entre 20% et 30% de l'énergie. Songez simplement à tous les appareils qui restent en veille ou à la manière de se chauffer. Il y là un potentiel qu'il s'agit d'exploiter", développe le conseiller fédéral.
"Le rôle de l'Etat est de tout faire pour garantir un bon approvisionnement du pays en gaz et en électricité. On veut à tout prix éviter une rupture de l'approvisionnement, ce qui aurait un fort impact sur les entreprises. On risquerait ensuite d'avoir une crise économique qui viendrait s'ajouter", conclut le ministre de l'économie.
>> L'interview de Guy Parmelin dans Forum :
ats/asch
Publié
Réserves dans les pays voisins
Deux mesures ont été prise pour constituer des réserves de gaz. D'une part, une réserve physique sera constituée dans les pays voisins. Elle devra couvrir 15%, soit un peu moins de 6 TWh (térawatt-heure), de la consommation annuelle de gaz de la Suisse (environ 35 TWh). Actuellement, près de 3,8 TWh sont déjà garantis, soit environ 60% de l'objectif de 6 TWh.
D'autre part, 6 TWh de gaz devront être acquis en France, en Allemagne, en Italie et aux Pays-Bas sous forme d'options pour du gaz non russe. Ce volume de gaz correspond plus ou moins à 20% de la consommation suisse en hiver. Des offres ont été soumises pour les options, qui vont maintenant être acquises, indique le Conseil fédéral.
Accord avec l'Allemagne
Les cinq sociétés régionales Erdgas Ostschweiz, Gasverbund Mitelland, Gaznat, Erdgas Zentralschweiz et Aziende Industriali di Lugano mettent chacune des mesures en oeuvre séparément. Elles devront optimiser "avec prudence" l'utilisation de leur gaz de stockage, quel que soit le niveau de crise.
Par ailleurs, les discussions et les travaux exploratoires en vue de conclure des accords avec les pays voisins sont en cours. Lors de la rencontre au Forum économique mondial de Davos, il a été convenu de conclure un accord de solidarité avec l'Allemagne. Un premier tour de négociations avec les partenaires allemands a eu lieu en juin.