Le 26 septembre 2021, 64% de la population soutenait le texte pour autoriser le mariage de même sexe ainsi que le recours à l'adoption conjointe et l'accès aux dons de sperme pour les couples de lesbiennes.
>> Lire notre chronologie sur le sujet : Un mariage pour tous
L'entrée en vigueur de cette loi le 1er juillet 2022 permet aux premiers couples de préparer leur mariage. Dans les cantons romands, 280 mariages sont d'ores et déjà annoncés, dont un tiers de nouveaux et deux tiers de transformations de partenariats enregistrés. A noter que s'il n'est plus possible de conclure de nouveaux partenariats enregistrés, les couples unis par un tel contrat ne sont pas obligés de changer.
Dans le détail, c'est le canton de Genève qui enregistre le plus de demandes, avec 38 nouveaux époux ou épouses qui se diront oui d'ici la fin de l'année, et 44 couples en partenariat enregistré qui convertiront leur union. Vaud arrive en seconde position avec plus de 30 mariages et 62 conversions prévus. A Fribourg, une cinquantaine de couples au total sauteront le pas. Enfin, en Valais, dans le Jura et à Neuchâtel, ce sont au total 77 cérémonies et conversions de partenariats qui sont prévues.
Pas d'explosion des unions
A Neuchâtel, avec six transformations de partenariats, on constate que le mariage pour tous ne fait pas exploser la demande. "Ca reste dans la proportionnalité des demandes que l'on avait autrefois avec le partenariat. En ce qui concerne l'Etat civil de Neuchâtel, on enregistrait en moyenne 2, 3 voire 4 partenariats les meilleures années", a constaté l'officière d'État civil Florence Duvoisin vendredi dans le 19h30.
"Petit à petit, les mariages viendront. Mais ce n'est pas parce qu'on ouvre quelque chose à une population que tout le monde a envie de le faire", réagissent pour leur part Nathalie et Sophie, mariées officiellement ce 1er juillet, un an après avoir fêté leur partenariat enregistré.
Pour celles et ceux qui ont choisi de faire ce pas, c'est l'assurance de bénéficier de nouveaux droits, dont celui de fonder une famille, en adoptant conjointement un enfant ou, pour les femmes, en ayant recours à la procréation médicalement assistée (lire encadré).
Une cérémonie "qui nous ressemble"
A Genève, Xavier Valdes et Pierrick Top se marieront en janvier prochain. "Pour nous, c'est important que la cérémonie se passe exactement comme on le souhaite, dans le sens où on veut vraiment une cérémonie qui nous ressemble: émouvante, magique et traditionnelle, avec un soupçon d'humour", a expliqué Xavier Valdes vendredi dans La Matinale de la RTS.
Le couple a souhaité avoir un mariage civil ainsi qu'un mariage religieux (une bénédiction) à la cathédrale de Genève, car Xavier Valdes est protestant. "On sera splendides tous les deux. Ça va puer l'amour toute la journée", ajoute Pierrick Top, enthousiaste. Les deux hommes termineront la célébration avec un bal costumé, le jour suivant.
"Vivons pour nous, soyons heureux"
Même si la loi sur le mariage pour tous est passée, dans le milieu LGBTQIA+, cette cérémonie divise. Pour Pierrick Top et Xavier Valdes, la tradition reste importante. "On veut un peu suivre le chemin de nos parents. Même si on n'est pas hétéros, pour nous, c'est hyper important", souligne Pierrick Top. Et d'ajouter: "Si j'ai un message à donner à la communauté: suivez votre instinct, vivons pour nous, soyons heureux, et suivez votre cœur!"
De leur côté, Sophie et Nathalie Barby, qui ont été les premières femmes à se marier à Sion vendredi, étaient déjà dans un partenariat enregistré. Mais ce statut ne leur convenait pas. "On n'était pas très d'accord d'être enregistrées en tant que partenaires, et le statut de mariées va nous combler beaucoup plus, notamment pour avoir l'accès à la PMA afin de pouvoir fonder notre famille", racontent les jeunes femmes.
Sujet radio: Pauline Rappaz
Sujet TV: Romain Boisset, Gabriel de Weck
Adaptation web: Andreia Portinha Saraiva, Vincent Cherpillod
La procréation médicalement assistée s'ouvre aux couples de femmes
Avec l'ouverture de la procréation médicalement assistée aux couples de femmes mariées, les différents centres médicaux de fertilité se préparent et s'attendent à une demande importante. A Lausanne, dans la plus grande banque de sperme de Suisse romande, une quinzaine de couples sont déjà sur liste d’attente.
"Je pense que dans les six mois qui suivent, on va avoir une forte demande qui devrait peut-être correspondre à deux, voire trois fois les demandes qu'on a avec les couples hétérosexuels. Actuellement, nous avons assez de paillettes, mais il y a toujours la crainte que le stock s’épuise rapidement. C’est clair qu'on a besoin de donneurs", a expliqué vendredi le médecin responsable de la banque de sperme CPMA à Lausanne Daniel Wirthner.
Pour l’heure, la banque dispose d’une trentaine de donneurs bénévoles et semi-anonymes, l’enfant pouvant demander à connaître l’identité de son géniteur à sa majorité. Daniel Wirthner attribue les donneurs. Pour les couples hétérosexuels, il se base sur les caractéristiques physiques du futur père. Pour les couples de femmes, il sera attentif à leurs préférences pesonnelles, "s’il n’y a pas de demandes complètement farfelues", précise-t-il.
Un système à deux vitesses?
Tout semble donc prêt côté scientifique, mais pour l’organisation faîtière des lesbiennes de Suisse, une crainte subsiste: celle de créer deux catégories de parents, car en cas de procréation médicalement assistée à l’étranger ou de don de sperme privé, la femme qui n’a pas porté l’enfant n’est toujours par reconnue comme mère. "Elle va devoir passer par une longue procédure qui est la procédure de l'adoption du conjoint", déplore la co-directrice de l'organisation suisse des lesbiennes Muriel Waeger.
Au parlement, plusieurs projets sont en cours pour faciliter la reconnaissance des enfants de couples mariés de même sexe, quelle que soit leur origine.