Les nouveaux trains Bombardier des CFF ne tiendront pas leurs promesses en termes de vitesse
Le Fribourgeois a expliqué que les courses de test réalisées avaient mis en lumière des effets négatifs sur le confort des voyageurs. De plus, cette technologie de franchissement des courbes assisté par la compensation du roulis dans les nouveaux trains à deux étages du constructeur Bombardier s'avère être exigeante en matière d'entretien.
Désignée par le terme Wako, cette technique pendulaire empêche les wagons de pencher vers l'extérieur dans les courbes. Il permet ainsi une vitesse de courbe pouvant être jusqu'à 15% supérieure à celle des compositions conventionnelles de trains à deux étages. Alstom, qui fournit les rames duplex TGL depuis qu'elle a racheté la division ferroviaire de Bombardier, explique même que la compensation du roulis réduit les forces d'accélération latérale, ce qui améliore le confort des passagers dans les virages.
Fiabilité en question
L'autre argument soulevé vendredi pour justifier le renoncement à cette technique de franchissement rapide des courbes résidait dans la fiabilité de cette dernière. Mis en service il y a environ quatre ans, les nouveaux trains à deux étages de Bombardier avaient connu des débuts mouvementés avec plusieurs pannes techniques et retards massifs.
A l'époque, les CFF avait parlé d'un "accouchement au forceps" et avaient critiqué en partie le fabricant. Mais un retour des trains n'est pas envisageable, avait déclaré Vincent Ducrot, car il n'y a pas d'alternative dans le parc des CFF. Entre-temps, 60 des 62 rames commandées ont été livrées, a-t-il été précisé. Les deux dernières suivront en juillet et en août de cette année.
Un investissement de 32 millions qui n'est "pas perdu"
Estimant à l'époque, grâce à une série de tests, que cette technique de franchissement des courbes représentait l'avenir, les CFF ont investi 32 millions pour l'infrastructure ferroviaire. "Cet argent n'est pas perdu au sens de perte sèche. Certes, l'amortissement ne sera pas extraordinaire, mais nous avons refait une infrastructure plus résistante et qui durera plus longtemps", détaille Vincent Ducrot.
Ce renoncement a également une conséquence sur les objectifs de réduction de temps de trajet des CFF. Les gains de cinq minutes sur la ligne Lausanne-Berne et de deux minutes sur celle entre Winterthour (ZH) et Saint-Margrethen (SG) à partir de 2036 ne seront pas atteints.
Il ne devrait pas non plus être possible de regagner les minutes perdues ces 20 dernières années sur les lignes Genève - Lausanne et Lausanne - Brig, où les trains circulaient en moyenne 10% plus lentement en 2021 qu'en 2001.
>> Lire à ce sujet : Un pendulaire Genève-Lausanne passe 30 heures par an de plus dans le train qu'il y a vingt ans
Un nouveau tronçon entre Lausanne et Berne?
Les CFF veulent néanmoins poursuivre leur objectif et ont demandé une adaptation du concept d'offre 2035 auprès de l'Office fédéral des transports. Le but est la construction d'un nouveau tronçon entre Berne et Lausanne, dont le développement devrait coûter plus d'un milliard de francs.
ats/jfe/iar
La Suisse romande désavantagée
Invité aux côtés de Vincent Ducrot vendredi dans Forum, le conseiller d'Etat fribourgeois en charge des infrastructures et de la mobilité Jean-François Steiert a rappelé que plusieurs demandes ont émané de la Confédération et de la population par le passé en faveur d'un "réseau helvétique ferroviaire stable, avec des cadences solides" pour permettre à davantage de personnes de prendre le train.
"La Suisse romande a aujourd'hui un rail qui est en moyenne plus âgé que le reste du pays. Nous avons des taux de retards plus importants", a constaté le ministre. Et à cela s'ajoute l'annonce de l'abandon d'une technologie "qui aurait pu permettre de gagner un certain nombre de minutes pour un horaire plus stable".
Un investissement indispensable
"Pour que la Suisse romande ne soit pas décrochée du réseau suisse, il faut impérativement investir beaucoup plus rapidement que prévu dans des lignes rapides", a avancé Jean-François Steiert, avant tout pour atteindre les objectifs climatiques de la Confédération et des cantons de la Suisse occidentale.
La fiabilité de l'offre ferroviaire doit également être une priorité. Selon le conseiller d'Etat, le risque qu'une partie de la clientèle abandonne le rail pour la voiture en raison des retards n'est pas négligeable, ce qui aurait pour conséquence un engorgement du réseau routier.
De son côté, le directeur des CFF Vincent Ducrot a souligné que des investissements importants sont prévus sur le réseau ferroviaire romand ces prochaines années. Mais des efforts doivent encore être réalisés, notamment sur la ligne Lausanne-Berne, a-t-il concédé.