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Ignazio Cassis: "Nous devons réapprendre à gérer l’insécurité"

Le président de la Confédération Ignazio Cassis fait le bilan à mi-mandat
Le président de la Confédération Ignazio Cassis fait le bilan à mi-mandat / 12h45 / 2 min. / le 31 juillet 2022
L'année présidentielle d'Ignazio Cassis est marquée avant tout par la guerre en Ukraine et la crise énergétique qui se dessine en Europe. Dans une interview à la RTS à l'occasion du 1er Août, le Tessinois se montre confiant mais préoccupé face à l'accumulation des crises et l'insécurité ambiante. Le conseiller fédéral évoque aussi son destin personnel. Il souhaite poursuivre sa tâche après les élections de 2023.

A peine sorti de la crise du coronavirus, le monde doit faire face aux conséquences de l'invasion de l'Ukraine par la Russie. "C’est une année compliquée pour toute la planète et donc aussi pour la personne qui est présidente en Suisse", note d'emblée Ignazio Cassis.

Le chef du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) souligne cependant avoir fait preuve d'anticipation. "Avant Noël 2021, j’avais mobilisé une task-force à l’intérieur du DFAE pour anticiper les décisions sur la guerre en Ukraine, parce qu’on voyait déjà les troupes russes qui étaient autour de l’Ukraine", dit-il.

"J’ai énormément fait pression dans l’administration pour anticiper", assure le conseiller fédéral. "Mais on voit qu’on n’a pas l’habitude d’anticiper parce qu’on a vécu trop longtemps trop bien, sans devoir anticiper des crises".

Il faut s’habituer à être plus efficient dans son comportement et à changer aussi nos combustibles pour chauffer.

Ignazio Cassis

L'anticipation à l'échelon de la Confédération a également bien fonctionné face à la crise énergétique, estime Ignazio Cassis. "Actuellement, il n’y a pas de souci par rapport à l’approvisionnement énergétique", souligne-t-il en se montrant plus prudent pour la saison d'hiver à venir: "On a des soucis en lien avec l’approvisionnement énergétique de l’hiver prochain, mais on a déjà pris toute une série de mesures (…) Je crois que le collège, sur la question énergétique, a très bien travaillé et anticipé, même si on va en parler davantage après l’été qu’avant l’été".

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La Suisse, comme l'Union européenne, va cependant devoir se serrer la ceinture. "Nous sommes au coeur du continent européen, on ne va pas pouvoir se passer de faire des économies", confirme le conseiller fédéral. "Mais cela ne signifie pas encore ne pas avoir d’électricité", enchaîne-t-il. "Il faut s’habituer à être plus efficient dans son comportement, à chauffer mieux, donc moins, et à changer aussi nos combustibles pour chauffer."

Suisse-UE: Je crois que le temps est venu, au vu de notre collaboration au cours de cette guerre, que les deux positions bougent.

Ignazio Cassis

Le Conseil fédéral est aussi très attendu dans le dossier européen, après l’échec de l’accord-cadre l’an dernier. Après la feuille de route publiée au mois de mars et renforcée en juin, Ignazio Cassis espère désormais et le plus tôt possible un pas un peu plus spectaculaire dans le processus.

"Je crois que le temps est venu, au vu de notre collaboration au cours de cette guerre, que les deux positions bougent, la position suisse mais aussi la position de la Commission européenne", dit le conseiller fédéral. "C’est en ce sens que nous nous parlons actuellement de manière à ce que l’écart entre nos attentes et celles de l’UE puisse être comblé. Mais à 50%-50%, pas tout d’un côté ou tout de l’autre", précise-t-il.

La seule sécurité, c’est que nous devons réapprendre à gérer l’insécurité.

Ignazio Cassis

Sur un plan un peu plus philosophique, Ignazio Cassis jette un regard préoccupé face à l'accumulation des crises et l'insécurité ambiante. "La seule sécurité", souligne-t-il, "c’est que nous devons réapprendre à gérer l’insécurité. Etre président dans une année aussi complexe, c’est un défi majeur, mais c’est aussi une chance inouïe pour vivre une année au service de la population".

Avec la guerre en Ukraine, "j’ai appris que rien n’est donné par Dieu: notre liberté, notre indépendance, notre sentiment de sécurité", confie Ignazio Cassis. "On doit lutter pour eux, s’engager pour ça, on doit être diligent, un peu humble et aussi courageux par rapport aux nouveautés".

"Peut-être avons-nous été gâtés pendant de longues années et nous nous sommes peu à peu résignés à lutter pour des choses qu’on pensait données par Dieu", ajoute le Tessinois.

Aucune envie de raccrocher

"Très content d’être conseiller fédéral et président cette année", Ignazio Cassis souhaite poursuivre sa tâche après les élections fédérales 2023. "J’ai toujours imaginé pouvoir travailler dix ans dans ce mandat, dans cet office", précise celui qui a été élu au gouvernement en 2017. "Je crois que c’est le temps nécessaire pour faire les changements et les réformes qu’on avait envie de faire au début. Donc, si le Parlement le veut bien, je serai à disposition évidemment pour ce laps de temps".

Propos recueillis par Rouven Gueissaz

>> Voir l'interview intégrale d'Ignazio Cassis :

L'interview intégrale d'Ignazio Cassis pour le 1er Août
L'interview intégrale d'Ignazio Cassis pour le 1er Août / L'actu en vidéo / 11 min. / le 31 juillet 2022

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Un Conseil fédéral "pas du tout désuni"

Malgré les crises internationales ou les affaires touchant des collaborateurs proches de certains conseillers fédéraux, Ignazio Cassis assure que le gouvernement n'est pas du tout désuni.

"Les crises, évidemment, pèsent lourd aussi sur le fonctionnement d’un collège qui, par sa nature, n’est pas lié à l’harmonie puisqu’on amène les 360 degrés de la politique, donc des visions différentes du monde", reconnaît-il cependant. "Nous devons faire nos discussions, arriver à un compromis et être fidèles à ce compromis. En temps de crise, c’est encore plus dur qu’en temps de paix".

Le président de la Confédération lui-même n'échappe pas aux critiques. "Si je plaisais à tout le monde, je n’en aurais pas autant", réplique-t-il. "Si les gens me critiquent, c’est parce que je ne leur plais pas. Cela signifie donc que j’ai une ligne, j’ai des décisions".

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