En surface, il y a l'apparition de crevasses ou des chutes de pierres et de séracs. En profondeur, le réchauffement du permafrost, que l'on peut assimiler à un ciment naturel, rend les parois instables.
Très chaud, très haut
"L'isotherme du 0 degré est désormais à 4500 mètres. Il faut donc intégrer cette dimension", estime le secrétaire général de l'Association suisse des guides de montagne Pierre Mathey, jeudi dans La Matinale de la RTS.
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Et d'ajouter: "Ce n'est pas quelque chose de nouveau ou d'inédit. Mais cette année, la situation arrive plus tôt. Cela s'explique par le manque de neige durant l'hiver dernier."
Le 3 juillet, l'effondrement d'une partie du glacier de la Marmolada a tué onze alpinistes. Pour éviter le drame, l'ascension du Mont-Blanc par la voie normale est fortement déconseillée en raison des chutes de pierres.
Régulation impossible
"Interdire? C'est possible dans des domaines où on limite l'activité humaine. En montagne, ce n'est pas le cas, souligne Pierre Mathey. C'est un espace de liberté. Ça doit le rester. On pratique l'alpinisme sous sa propre responsabilité avec respect et humilité. Et il faut intégrer les dangers naturels."
Pierre Mathey, guide depuis près de trente ans, rappelle qu'il n'y a pas de "panneaux interdits", car la montagne reste un lieu "non régulé, non sécurisé et non balisé". Il souligne qu'il est "judicieux" de se faire accompagner par un guide de montagne dans toutes les situations, "mais principalement quand on a des conditions plus difficiles que la normale".
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Limiter "temporairement" les flux
"On déconseille l'ascension, mais cela ne veut pas dire qu'on ne peut pas la faire, indique-t-il, rappelant que le renoncement fait aussi partie de l'alpinisme. En fonction du niveau technique, physique et de la connaissance, on peut faire certaines ascensions même dans des situations particulières."
Et d'enchérir: "On fait ces messages de prévention pour diminuer le risque d'accidents. Si on diminue temporairement le flux des alpinistes sur un sommet, sur un itinéraire, on diminue fortement le risque d'accidents."
Si Pierre Mathey reconnaît qu'il y a toujours plus de monde en montagne, il note aussi qu'il y a davantage d'infrastructures. Il est, selon lui, nécessaire "d'éduquer" le public, car la montagne ne sera jamais régulée. "Il n'y aura jamais dans les Alpes un drapeau rouge ou vert comme sur les plages. On ne peut pas dire quand on peut aller en montagne et quand on ne peut pas y aller."
Propos recueillis par Aleksandra Planinic/vajo