Un ménage de 4 personnes consomme en moyenne 4500 kWh par an. Mais le Conseil fédéral l’a annoncé, les Suisses désormais ne peuvent plus l’ignorer: il va falloir faire preuve de davantage de sobriété énergétique pour éviter les pénuries cet hiver. En adoptant une meilleure hygiène électrique, en multipliant les bonnes pratiques, il serait ainsi possible de gagner 5% de la facture électrique des ménages.
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Pour rendre les économies possibles plus concrètes, la cellule data de la RTS a comparé à quoi correspond 1 kilowattheure (kWh), l’unité de base qui sert à mesurer la consommation et la production électrique, dans la vie de tous les jours. A la maison, au restaurant, en allant faire ses courses ou encore en prenant sa voiture électrique, de quoi peut-on bénéficier avec 1 kWh ?
Si vous possédez un ballon d’eau chaude électrique, comme c’est le cas pour environ un tiers des bâtiments en Suisse, 1 kwh vous permet de vous glisser sous une douche chaude de… 2 minutes 30! Votre douche est équipée d’un pommeau économique? Vous gagnez du temps supplémentaire et pouvez vous autoriser le luxe d’une douche de 5 minutes pour le même coût électrique.
Toujours avec ce kilowattheure, il est possible, à choix, d’utiliser son fer à repasser pendant 1h, de regarder sa smart TV durant 15 h, de jouer 5 heures à la PlayStation 4, ou encore de rouler 100 kilomètres sur son vélo électrique.
L’importance des étiquettes énergétiques
"Avec cette comparaison, on s’aperçoit que l’électricité couvre un ensemble d’usages extrêmement large. Il est généralement possible pour les ménages de faire des économies énergétiques, en changeant ses habitudes et parfois en renonçant à un peu de confort. Pour les foyers en disposant, baisser son chauffage électrique d’un simple degré peut avoir un impact de 5% à 7% d’économie sur ce poste à la fin de l’année", estime Nicolas Charton, directeur du cabinet de conseils E-CUBE à Lausanne, spécialisé dans l'énergie.
Reste que près de la moitié de la consommation électrique d’un ménage se fait entre la cuisine et la salle de bain. La catégorie énergétique des appareils électroménagers, tels que le four, le réfrigérateur, le lave-linge ou encore le sèche-linge, a donc des répercussions non négligeables sur la consommation et sur les économies potentielles.
Vous avez équipé votre intérieur en scrutant scrupuleusement les étiquettes énergétiques et opté pour des appareils classés A? Dans ce cas, ce fameux kilowattheure vous permet, à choix, de faire deux lessives, de faire tourner deux cycles de lave-vaisselle, de cuire un plat de lasagnes maison au four ou de laisser le combi réfrigérateur/congélateur qui trône dans votre cuisine fonctionner durant 3 jours et demi. En revanche, si vous avez opté pour des équipements classés C, le coût électrique s’alourdit impitoyablement. Notre mesure étalon ne vous autorise plus qu’une lessive, un seul cycle de lave-vaisselle, des lasagnes mais surgelées et seulement deux jours de réfrigération… Presque du simple au double.
"Les ménages représentent un gros potentiel d’économie d’électricité, mobilisable très rapidement par les éco-gestes qui ne nécessitent aucun investissement. Par exemple mettre hors tension les appareils après leur utilisation ou sélectionner le programme éco du lave-vaisselle", explique Olivier Epelly, co-directeur du CAS en stratégie et management des énergies de l’Université de Genève et directeur du département de conseil en stratégie énergétique d’Amstein+Walthert.
A titre d’exemple, une box internet perpétuellement allumée consomme autour de 200 kWh/an, soit autant d’électricité qu’un lave-linge, alors qu’il est simple de l’éteindre la nuit ou lorsque l’on est au travail.
Vitrines éclairées la nuit
"Pour les ménages, le message est incitatif, mais pour les gros consommateurs énergétiques, qui sont près de 30'000 en Suisse, les mesures vont être beaucoup plus contraignantes", assure David Rochat, directeur des services durabilité pour le cabinet de conseil dss+, spécialisé en énergie.
"Il y a encore à faire du côté de l’industrie, des collectivités et des entreprises privées", confirme Nicolas Charton. "Par exemple en se penchant de plus près sur la climatisation et la ventilation des bâtiments, sur l’éclairage public, l’éclairage des magasins ou encore le chauffage des trains et les bus, etc."
L’exemple des vitrines éclairées la nuit est flagrant. Selon nos estimations, sur une année, une grande vitrine de magasin qui resterait éclairée 12 heures par nuit consomme autant que trois ménages, soit 15'000 kWh. En s’équipant de leds, cette même vitrine ne pèse plus qu’un ménage et demi.
Le froid très gourmand
Autre poids électrique conséquent: le froid dans les grandes, moyennes et petites surfaces. "Migros et Coop ont déjà fait de gros efforts, notamment sur les vitrines fermées, mais il reste beaucoup à faire", confirme Olivier Epelly. "Ils subissent une pression du marketing, qui estime qu’un produit doit être immédiatement accessible pour le consommateur. Ce qui explique la présence de ces machines réfrigérantes ouvertes."
Effectivement, une armoire de réfrigération d’environ 1 mètre de large sur 2 mètres de haut, équipée de portes vitrées, typiquement celle que l’on trouve dans les kiosques remplies de boissons fraîches, consomme à l’année presque autant qu’un ménage. La même armoire mais sans porte va consommer le double, soit quasiment l’équivalent de deux ménages. On peut imaginer ce que l’impact de ces frigos ouverts donne à l’échelle d’un supermarché…
L’heure est donc à la prise de conscience. "Nous sommes en train de nous préparer pour des restrictions temporaires alors qu’il va falloir institutionnaliser ça", déplore David Rochat. "Il ne s’agit pas d’un feu à éteindre, nous allons devoir apprendre à vivre avec la sobriété énergétique. Il serait temps que l'ensemble des acteurs le comprenne."
Cécile Denayrouse
Des gestes pour économiser de l'électricité et de l'argent
En Gruyère, le centre d’information sur l’énergie du Groupe E Electrobroc est un musée gratuit consacré à la consommation électrique des appareils du quotidien. Jean-Pierre Chapuis, responsable d’Electrobroc, explique dans l'émission On en parle la consommation conséquente du chauffage: "Les chauffages électriques et les pompes à chaleur qui utilisent l’électricité sont concernés, mais compte tenu des prix il est aussi intéressant d’économiser sur le chauffage à mazout. La réduction d’un degré sur sa chaudière permet à la fois de réduire sa consommation d’énergie de 5 à 7% et d’économiser sur sa facture d'électricité."
La production d’eau chaude est aussi directement liée au chauffage. "En prenant plus souvent une douche, on consomme moins d’eau, mais aussi moins d’eau chaude. C’est déjà un premier geste. Ensuite, nous avons le réflexe d’enclencher l’eau chaude lorsque nous nous lavons les mains, mais l’eau chaude arrive généralement lorsque nous fermons le robinet. Mais cet appel d’eau chaude constitue tout de même une consommation d’énergie. Nous n’avons donc pas forcément besoin d’eau chaude en nous lavant les mains."