Réduire la température du chauffage, consommer moins d'eau chaude, éteindre les appareils électriques et les lumières ou cuisiner de manière responsable. Ces mesures sont faciles à mettre en oeuvre et s'adressent autant à la population qu'aux entreprises.
Elles doivent permettre de renforcer rapidement l'approvisionnement en énergie pour l'hiver à venir et s'ajoutent à l'objectif volontaire fixé par le Conseil fédéral mercredi dernier de réduire sa consommation de gaz de 15%. En cas de pénurie, ces recommandations d'économies pourront être remplacées par des appels à économiser l'énergie conformément à la loi sur l'approvisionnement du pays.
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"Actuellement, nous n'avons pas de problème d'approvisionnement, mais la situation reste tendue", a souligné la conseillère fédérale en charge de l'Energie Simonetta Sommaruga. "Nous ne savons pas comment la situation évoluera. Notre but est de ne pas arriver dans une situation de pénurie."
Campagne médiatique et hotline
Le Conseil fédéral veut avant tout attirer l'attention sur les limites de l'énergie. Une ressource qu'il ne faut pas gaspiller. Les recommandations seront diffusées sur les médias sociaux et sur le site stop-gaspillage.ch. Une hotline sera accessible au 0800 005 005 pour poser des questions.
Toute la population peut dès maintenant mettre la main à la pâte afin que l'énergie "suffise pour tous", a ajouté Simonetta Sommaruga. Ces mesures sont connues de la plupart, mais souvent oubliées au quotidien. "Nous voulons les rappeler."
Une panne ou des restrictions de plusieurs semaines pourrait coûter 100 milliards de francs à la Suisse, a rappelé Monika Rühl, présidente de la direction d'economiesuisse.
"Chaque kWh économisé compte"
"Chaque kWh économisé compte et permet de pouvoir mieux gérer ou anticiper la crise", a de son côté assuré Guy Parmelin dans l'émission Forum. Selon le conseiller fédéral, "chaque petit geste, chaque contribution, permet peut-être de repousser un problème en matière d'électricité".
"On a peut-être vécu avec la perspective que le courant électrique était illimité et surtout très bon marché. On s'aperçoit maintenant que nous sommes très dépendants en matière d'énergie fossile", a ajouté Guy Parmelin.
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Le gaz également concerné
Le Conseil fédéral a aussi précisé le plan esquissé la semaine dernière en cas de pénurie de gaz cet hiver. Un plan en quatre étapes, qui devrait être présenté définitivement en octobre, a été précisé (voir le détail en encadré).
Aujourd'hui, il n'y a pas de pénurie. Le plan prévu ne sera mis en oeuvre que lorsqu'il y aura physiquement trop peu de gaz en Suisse, a lancé Guy Parmelin devant la presse. Une consultation auprès des cantons et des milieux concernés est ouverte jusqu'au 22 septembre.
L’industrie gazière constitue des réserves de gaz physiques dans les pays voisins et achète des options pour des livraisons supplémentaires de gaz non russe. Mais cela pourrait ne pas suffire, a rappelé le chef du Département fédéral de l'économie (DEFR).
"Le manque de gaz est plus difficile à prévoir que celui de l'électricité. Nous n'avons pas de réserve, les structures de gestion sont inexistantes", a poursuivi Guy Parmelin. "Il y a beaucoup de paramètres que nous ne maîtrisons pas", comme les livraisons russes ou la rigueur de l'hiver.
ats/vajo
Plan en 4 étapes pour le gaz
- PREMIERE ETAPE: si une pénurie se profile, des appels à réduire la consommation seront adressés à l'ensemble des consommateurs de gaz naturel.
- DEUXIEME ETAPE: en cas d'aggravation, Berne pourra ensuite ordonner l'interruption des livraisons de gaz pour toutes les installations commutables. Et le passage au mazout pour les entreprises équipées en conséquence.
- TROISIEME ETAPE: des restrictions et des interdictions d'utilisation seront décrétées par voie d'ordonnance. Elles engendreraient surtout une baisse du niveau de confort, selon le gouvernement.
Ces mesures impliquent avant tout la réduction de la température des pièces avec un maximum de 19 degrés, et de l’eau chaude des boilers à 60 degrés. Elles concerneraient dans un premier temps surtout les lieux de travail, mais pourraient également être étendues aux logements des ménages.
L'utilisation de gaz dans les activités de loisirs et de bien-être, comme les piscines et les saunas, pourrait aussi être interdite. Mais les hôpitaux, EMS, cabinets médicaux ou maisons de naissance ne seront en aucun cas concernés.
Des contrôles pourront être prévus, du ressort des cantons. Mais "nous faisons confiance à la population", a dit Guy Parmlein. "Nous ne sommes pas dans un État policier."
- QUATRIEME ETAPE: toutes les mesures précédentes doivent permettre d'éviter d'arriver à la quatrième étape, soit un contingentement pour les entreprises. Le contingentement par étapes s’appliquerait à tous les consommateurs à l’exception des consommateurs protégés, à savoir les ménages et les services sociaux essentiels comme les hôpitaux ou la police, ou encore les pompiers et d'autres services de secours ou jugés essentiels.
Une période de contingentement durera en principe un mois et pourra être adaptée aux différentes régions du pays, si besoin.
Là aussi, des contrôles seront prévus. L'Organisation d'intervention en cas de crise sera dans ce cas responsable de la surveillance.
Réactions positives, mais soutien à l'économie demandé
Les partis et les associations soutiennent la campagne du Conseil fédéral pour appeler la population et l'économie à des économies d'énergie. Des voix s'élèvent toutefois également pour réclamer un soutien aux entreprises.
GastroSuisse demande par exemple une intervention de la politique pour freiner l'explosion des coûts de l'électricité et du gaz. "Dans le cas contraire, l'existence de dizaines de milliers d'entreprises serait menacée dans notre pays", affirme le président Casimir Platzer.
GastroSuisse,HotellerieSuisse et Suisse Tourisme craignent pour le tourisme hivernal en cas de pénurie d'énergie et demandent qu'aucune installation ne soit fermée et qu'aucun appareil ne soit interdit, comme par exemple les chauffages pour les terrasses. Si des restrictions, des interdictions ou des contingentements devaient tout de même être imposés, HotellerieSuisse demande alors des mesures de soutien immédiates, comme le chômage partiel.
Le PS demande que les objectifs d'économies fixés par le Conseil fédéral soient maintenant inscrits dans une ordonnance. Elle réglerait, en cas de durcissement, comment la consommation peut encore être réduite et comment les entreprises seront éventuellement indemnisées.
L'UDC demande pour sa part au Conseil fédéral de garantir que les besoins fondamentaux des personnes et de l'économie soient couverts dans tous les cas. Le parti réitère en outre ses exigences, parmi lesquelles la mise en place d'un "général de l'électricité" et la tenue d'un sommet extraordinaire avec les partis, les fournisseurs d'énergie et les associations économiques.
Dans sa prise de position, le PLR estime que l'UDC, mais aussi le PS, ne devraient pas constamment réclamer des séances ou des sessions extraordinaires, mais plutôt contribuer avec leurs conseillers fédéraux à garantir l'approvisionnement énergétique de la Suisse. Le parti renvoie notamment à sa proposition de février, lorsqu'il proposait une ouverture complète du marché de l'électricité.
Les Vert-e-s saluent l'avancée du Conseil fédéral en matière d'économies d'énergie. Mais il faut toutefois aller plus loin, estime le parti écologiste, qui propose des économies d'énergie via un système d'enchères.
Selon ce principe, les gros consommateurs peuvent proposer de réduire la consommation de gaz et d’électricité de leurs installations pour un certain montant et la Confédération achète ensuite les offres d’économies les plus avantageuses. Cela permet de réaliser des économies là où elles sont le plus efficaces et d'éviter des mesures drastiques, comme un contingentement.
Le président des Vert'libéraux Jürg Grossen s'est également exprimé. Dans un tweet, il se demande où est le plan pour une situation de pénurie d'électricité. Il se réjouit toutefois que le Conseil fédéral ait reconnu la gravité de la situation pour le gaz. "Mieux vaut tard que jamais", a-t-il commenté.