"Cette initiative me hérisse le poil, ainsi qu'à toute la corporation paysanne, parce qu'on est fatigués d'avoir régulièrement des initiatives dans lesquelles on doit réexpliquer la façon dont on travaille", explique celui qui, à la tête de l'exploitation familiale pendant trente ans, a désormais passé les rênes de sa ferme à son fils tout en y travaillant encore.
Peut-être un déficit de communication est-il à l'origine de cette incompréhension, admet Jacques Nicolet. "On a peut-être mal su communiquer ces dernière années tous les progrès qui ont été faits, dans la détention des animaux, dans l'utilisation des produits phytosanitaires ou des antibiotiques. (...) Aujourd'hui, le bien-être animal est totalement assuré dans les exploitations agricoles de Suisse", affirme le Vaudois, qui appelle à voter fermement contre l'initiative le 25 septembre.
Le texte, qui veut protéger la dignité des animaux de rentes (ovins, bovins, porcs, volaille), vise les conditions d'hébergement, la qualité des soins, des sorties régulières, la taille des groupes et les conditions d'abattage. En cas d'acceptation dans les urnes, le Parlement aurait trois ans pour légiférer, puis les paysans 25 ans pour s'adapter. "Mais l'initiative n'atteint pas son but, qui devrait être l'amélioration de la condition animale", critique le conseiller national.
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Productions étrangères et augmentation des prix
"Si on met un place une telle initiative, la production et les élevages en Suisse vont être fortement diminués", explique-t-il, en se référant aux chiffres avancés par son camp dans la campagne: en cas d'acceptation de l'initiative, la volaille de production locale chuterait de 60% à 10% de la consommation totale, la production d'oeufs de 60% à 20%. "On déplacerait à l'étranger la question de la détention animale, on perdrait le contrôle là-dessus. En Suisse, les contrôles sont sérieux", fait valoir Jacques Nicolet, pointant également l'augmentation du coût de la viande en cas de changement de normes.
Aujourd'hui, de nombreux labels existent qui vont au-delà des conditions minimales de détention, mais ils peinent à trouver preneurs auprès de la grande distribution et des consommateurs, souligne Jacques Nicolet, qui précise que la profession "n'est pas totalement fermée à de nouvelles discussions".
Pour l'élu UDC, l'initiative lancée par des associations écologistes comporte également un agenda caché. "Ces milieux cherchent à abolir l'élevage et la consommation de viande. Or, on doit laisser le choix à notre population de consommer ce qu'elle souhaite consommer", estime-t-il encore.
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Propos recueillis par David Berger/kkub