Depuis 2010, seuls les casinos pouvaient organiser des tournois de poker, le Tribunal fédéral ayant accepté un recours de ces établissements. Les juges avaient considéré que le poker était un jeu de hasard. Etant donné qu’il dépendait davantage de la chance des joueurs que de leur habileté, il devait être réservé aux maisons de jeux.
Néanmoins, la majorité de la classe politique n'a pas voulu de la décision des tribunaux. La loi sur les jeux d'argent a donc été modifiée - et est rentrée en vigueur en janvier 2021 dans les cantons romands - pour permettre les tournois de poker hors des casinos.
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Selon Carlos Pires, coorganisateur d'un tournoi de poker à Saxon (VS), la clientèle est au rendez-vous. L’événement qui s’est déroulé il y a dix jours a surtout attiré de jeunes hommes.
"C’est notre deuxième tournoi depuis l’autorisation de réouverture, et nous sommes déjà complets", se réjouit Carlos Pires. "On a réussi notre objectif de remplir un tournoi avec 100 joueurs, chacun pouvant miser jusqu'à 200 francs. Les seize premiers remporteront une somme entre 4200 francs, pour le numéro 1, et 360 francs pour le seizième. Les autres repartiront avec un bon souvenir."
Carlos Pires a l’impression d’attirer une clientèle moins aisée qu’au casino. "C’est l’ouvrier qui travaille la journée et qui, pour se détendre, vient taper des cartes et boire une petite bière. En parallèle, il cherche aussi à ressentir la même adrénaline que les grands joueurs."
Des règles qui n’empêcheront pas les abus
La nouvelle législation sur les jeux d’argent soumet les organisateurs à des règles. "Théoriquement, la loi interdit de faire des tournois sans autorisation. Ils sont réglementés, il faut payer une taxe et cela nécessite les autorisations du canton, du propriétaire des locaux (ndlr : de la commune pour ce qui est de l’événement organisé à Saxon) et du service concernant la prévention du jeu excessif", précise Carlos Pires.
Pour lui, la nouvelle législation est salutaire, même si elle ne parviendra pas à tout encadrer. "Des tournois non-déclarés, il y en a eu, et il y en aura certainement encore. Les passionnés de poker feront toujours une partie à la maison ou ailleurs. Il ne faut pas croire que les gens ont arrêté de jouer les dix dernières années".
Vers deux nouveaux casinos
En parallèle à l’assouplissement des tournois de poker, la Confédération autorisera au moins deux nouveaux casinos à partir de 2025. On en compte actuellement 21 en Suisse, mais le Conseil fédéral veut en permettre un de plus, dans les régions de Lausanne et de Winthertour.
En Valais, le Conseil d'Etat a par ailleurs écrit à la Confédération qu'il voulait un deuxième casino sur son territoire. Le risque d'addiction et son coût social - estimé à 600 millions de francs par année en Suisse - n'est pas thématisé par les politiques valaisans, au contraire de la municipalité de Lausanne.
Les communes de Crans-Montana, de Sion, de Saxon et de Martigny-Combe convoitent toutes les retombées économiques et fiscales des casinos. Le Conseil fédéral devrait trancher cet automne.
Romain Carrupt/rad