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En EMS, l'accès au vote des résidents n'est pas toujours garanti

Une résidente d'EMS avec son bulletin de vote [RTS - 15 Minutes]
La délicate question du vote en EMS / L'actu en vidéo / 2 min. / le 16 septembre 2022
Voter est un des droits fondamentaux en Suisse. Mais lorsque l'âge avance, il est parfois plus difficile de l'exercer. Une étude romande constate que les EMS ne garantissent pas toujours les droits civiques des personnes âgées. Alors, comment bien faire? Pour mesurer la complexité de la tâche, 15 Minutes a poussé la porte d'un home neuchâtelois.

A l'EMS L'Escale, à La Chaux-de-Fonds (NE), une séance d'information a lieu ce jour-là sur les objets en votation le 25 septembre. "Il y a du monde", relève un résident. "Une quinzaine sur 37, c'est pas mal!" Anne-Pascale Schneider, la directrice, assure l'animation, à l'aide des films réalisés par easyvote: "J'essaie d'être le plus neutre possible, mais ce n'est pas toujours simple".

Ici, les bulletins sont distribués après la séance d'information. Une visite de la police explique ce choix: "Pour des élections, il y avait eu un certain nombre de bulletins avec la même écriture. La police faisait le tour des EMS pour voir si le nom ajouté était un de nos employés", explique la responsable. Ce n'était pas le cas, mais "c'est là que j'ai pris conscience de l'importance des bulletins".

Les personnes âgées qui le demandent peuvent être aidées pour la logistique liée au vote. Parfois, ce sont aussi les familles qui le font. "C'est mon fils qui remplit, mais d'après mes idées. Moi je signe, et puis c'est tout", explique une résidente. Mais est-ce que le dispositif mis en place est juste? "J'espère", répond la directrice. A sa connaissance, il n'existe pas de protocole clair. Un constat partagé par plusieurs responsables d'EMS romands contactés par la RTS.

Volonté de bien faire, mais...

Léa Sgier, chargée de cours au Département de science politique à l'Université de Genève, a participé à une étude romande sur le sujet. Une étude menée à la Haute école de travail social de Genève, en partenariat avec l'Université, et qui paraîtra fin septembre. Selon elle, "les EMS sont plus ou moins laissés à eux-mêmes. Ce qu'il y a eu parfois, ce sont des associations faîtières qui ont tenté d'émettre des lignes directrices plus ou moins heureuses". Certains messages allaient parfois à l'encontre de règles légales, relève la chercheuse.

Le droit de vote est un des droits les plus fondamentaux

Léa Sgier, co-auteure d'une étude sur les droits civiques en EMS

Elle souligne que "le doit de vote est le droit le plus difficile à perdre. Il peut l'être en cas d'incapacité durable de discernement. C'est une décision juridique, elle n'appartient pas à l'EMS". Mais est-ce que les EMS garantissent les droits civiques des personnes âgées? "Il y a beaucoup de variations entre les établissements, mais de manière générale, je dirais plutôt non", répond Léa Sgier.

"Il y a une certaine confusion sur les règles applicables. Certains EMS estiment également que la question du vote ne relève pas de leur rôle. Et puis ils ne savent pas toujours comment faire". Sans oublier que les familles entrent parfois aussi dans ce processus. "Les EMS essaient de bien faire, mais les règles sont compliquées", nuance la politologue.

>> Ecouter le reportage de 15 Minutes :

La délicate question du vote en EMS [RTS - 15 Minutes]RTS - 15 Minutes
Droit de vote pour les résidents d'EMS: peut mieux faire / 15 minutes / 15 min. / le 16 septembre 2022

Participation basse

Même s'il est difficile d'avoir des chiffres précis, le taux de participation dans les EMS reste plutôt bas. "D'après les estimations du personnel, près de 17% des résidents votent", précise Léa Sgier. "Ces obstacles jouent un rôle, mais ce n'est pas la seule raison. Certaines personnes âgées ne souhaitent simplement plus voter."

Au home L'Escale à La Chaux-de-Fonds, Anne-Pascale Schneider indique avoir amené près d'un quart des enveloppes à la commune lors des dernières votations. Elle s'en félicite.

A bientôt 89 ans, Mme Boegli fait partie des pensionnaires qui participent. Sa fille l'épaule: "Elle n'a jamais raté un vote. J'essaie de lui permettre de conserver cette philosophie de vie, malgré la baisse de ses capacités cognitives".

>> Ecouter aussi le débat dans Forum entre Nicolas Walder, président de la FEGEMS, et Jean-Louis Zufferey, directeur de l'EMS Christ-Roi à Lens (VS) :

une enveloppe contenant le bulletin de vote pour les élections fédérales. [Keystone - Jean-Christophe Bott]Keystone - Jean-Christophe Bott
Droit de vote en EMS, un droit assuré? Débat entre Nicolas Walder et Jean-Louis Zufferey / Forum / 11 min. / le 17 septembre 2022

Coraline Pauchard, Guillaume Rey

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