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Le Conseil des Etats veut plus de renouvelable, mais pas au détriment de la nature

Le Conseil des Etats veut promouvoir les énergies renouvelables, tout en limitant les attaques à l'environnement.
Le Conseil des Etats veut promouvoir les énergies renouvelables, tout en limitant les attaques à l'environnement. / 19h30 / 2 min. / le 22 septembre 2022
Les énergies renouvelables doivent être développées rapidement et avec plus d'ambition, a décidé jeudi le Conseil des Etats lors de son examen de la réforme de l'énergie. Mais il a finalement refusé de faire résolument primer la production d'électricité sur la protection de l'environnement.

Pour les sénateurs, il est indispensable de développer les énergies renouvelables pour de multiples raisons: difficulté d'importer de l'électricité, abandon progressif du nucléaire, changements climatiques impactant la production ou encore besoins croissants de la population et de l'économie.

"En moyenne, il nous a manqué 4 TWh de courant ces dix dernières années. C'est deux fois la production annuelle de la Grande Dixence", a chiffré Beat Rieder (Centre/VS) pour la commission. Une lacune hivernale de 2 TWh est également pronostiquée jusqu'en 2035, raison pour laquelle il est nécessaire d'augmenter massivement la production indigène grâce à une réorganisation complète de l'approvisionnement énergétique, a estimé la Chambre haute.

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A une large majorité, les conseillers aux Etats ont suivi leur commission et décidé d'objectifs nettement plus ambitieux que ceux proposés par le Conseil fédéral. Au moins 35 TWh d'électricité devront être produits grâce aux énergies renouvelables en 2035, et 45 TWh en 2050. Le gouvernement avait mis la barre à 17 TWh et 39 TWh. Les exigences pour l'énergie hydraulique sont elles fixées à 37,9 TWh (2035) et 39,2 TWh (2050).

Le Conseil des Etats veut que les énergies renouvelables produisent 35 TWh d'électricité en 2035, soit plus du double de la proposition du Conseil fédéral. [Le Conseil des Etats veut que 35 TWh d'électricité soit produits par des sources renouvelables en 2035, soit plus du double de la proposition du Conseil fédéral.]
Le Conseil des Etats veut que 35 TWh d'électricité soit produits par des sources renouvelables en 2035, soit plus du double de la proposition du Conseil fédéral. [Le Conseil des Etats veut que 35 TWh d'électricité soit produits par des sources renouvelables en 2035, soit plus du double de la proposition du Conseil fédéral.]

"La priorité est à la sécurité de l'approvisionnement"

Pour faciliter la mise sur pied des installations produisant de l'énergie renouvelable, la commission aurait également voulu leur donner la priorité sur l'environnement. Pour elle, les dispositions environnementales ne devaient pouvoir ni entraver ni empêcher leur construction, leur maintien, leur agrandissement ou leur rénovation. Cette volonté a été suivie par la droite, mais critiquée par la gauche.

"Où voulons-nous mettre la priorité? Pour moi, la priorité est à la sécurité de l'approvisionnement", a plaidé Martin Schmid (PLR/GR). "Devant le risque accru de pénurie d'électricité, il n'y a pas d'autres possibilités que de lever les mesures de protection de l'environnement", a abondé Hansjörg Knecht (UDC/AG).

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Une "attaque grave" contre la biodiversité

"Les énergies propres viennent de la nature, du soleil, du vent, de la terre et de l'eau. Le lien entre la nature, les énergies renouvelables et la production d'électricité est tellement évident! Il est inutile de sacrifier l'un, la nature, pour l'autre, l'énergie", a opposé Elisabeth Baume-Schneider (PS/JU).

Pour Lisa Mazzone (Verts/GE), il serait faux de suspendre les débits résiduels dans les rivières en aval des barrages ou de supprimer des biotopes nationaux. Les premiers permettent aux cours d'eau de rester vivants, notamment lors des sécheresses. Quant aux biotopes, ils recèlent un tiers des espèces menacées en Suisse tout en n'occupant que 2% du territoire, a pointé l'élue jeudi dans le 19h30 de la RTS.

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"C'est une attaque grave au reste de biodiversité que nous avons en Suisse", a poursuivi Lisa Mazzone. Elle s'est toutefois dite prête à faire des concessions, à condition que le potentiel de production soit à la hauteur des dégâts causés.

>> Ecouter aussi son interview dans La Matinale jeudi matin :

Des pylônes électriques dans le canton de Glaris. [Keystone - Alessandro Della Bella]Keystone - Alessandro Della Bella
Sacrifier la protection de l’environnement pour produire plus d'électricité? Le Conseil des Etats en débat: interview de Lisa Mazzone / La Matinale / 1 min. / le 22 septembre 2022

Une mesure inconstitutionnelle?

Plusieurs orateurs, de gauche comme de droite, ont encore souligné l'anticonstitutionnalité des mesures proposées. "Il serait contre-productif de remettre en question l'équilibre trouvé entre protection de l'environnement et production électrique. Ca aurait de graves conséquences pour la nature et ça serait contraire à la Constitution", a par exemple plaidé la centriste uranaise Heidi Z'Graggen.

Philippe Bauer (PLR/NE) s'est lui dit fâché contre les associations qui font systématiquement recours contre les barrages ou les éoliennes pour gagner du temps. Mais des problèmes de procédure ne doivent pas être réglés en bafouant les lois décidées par le Parlement, lui a-t-on opposé.

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Les sénateurs ont finalement décidé de limiter les atteintes possibles à l'environnement. Les grandes installations destinées aux énergies renouvelables revêtiront toutefois un intérêt national, et les autorisations pour leur mise sur pied pourront être octroyées dans le cadre d'une procédure concentrée et abrégée.

Les débats sur l'approvisionnement énergétique du pays ne sont pas encore terminés et doivent se poursuivre jeudi prochain.

>> Le compte-rendu de la session d'automne des Chambres fédérales : Les sénateurs ambitieux pour le développement des énergies renouvelables

ats/vic

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Les autres mesures en détail

  • S'éloignant une nouvelle fois du Conseil fédéral, les sénateurs ont décidé de diversifier les mécanismes de soutien financier. Ils ont adoubé les contributions d'investissement pour les installations hydroélectriques, éoliennes, photovoltaïques, de biogaz ou de géothermie, telles qu'adoptées en octobre 2021 dans le cadre d'une solution transition. Une contribution pour les installations à couplage chaleur-force a également été approuvée. Les centrales nucléaires n'en bénéficieront en revanche pas en cas de modernisation, comme le proposait l'UDC.

  • L'électricité injectée dans le réseau devra en outre être rétribuée par une prime de marché flottante. Ces mesures de promotion seront financées au moyen du supplément perçu sur le réseau. Elles seront donc supportées par tous les consommateurs d’électricité.

  • La gauche, de son côté, a tenté d'augmenter de 0,5 ct./kWh le supplément pour financer l'assainissement écologique des centrales, mais sans succès. Le fonds alimenté par le supplément pourra lui s’endetter afin de compenser les variations à court terme des flux financiers.