Au final, ce sont les votes de Zurich, arrivés peu après 17h, qui ont été déterminants pour la victoire du oui.
Le financement par la TVA a quant à lui passé le cap par 55,1%. Un "Roestigraben" s'est dessiné entre les cantons romands, qui ont refusé la réforme, et les cantons alémaniques.
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Non net et unanime en Suisse romande
Les Jurassiennes et Jurassiens sont les champions du non, en rejetant l'augmentation des retraites par 70,9%. Suivent ensuite Neuchâtel et Genève qui ont refusé de faire travailler les femmes plus longtemps par 64,5%, respectivement 62,8%. Vaud et Fribourg disent aussi clairement non par 62,1%, respectivement 60,5%. A noter aussi que, si le canton de Berne s'est laissé convaincre de justesse, avec 50,4% en faveur du relèvement de l'âge de la retraite, les communes du Jura bernois ont presque toutes refusé la réforme.
Le Valais refuse également l'augmentation de l'âge de la retraite des femmes par 55%. C'est toutefois le seul canton romand qui a soutenu le financement additionnel par la TVA à 50,4%. Les Tessinoises et Tessinois suivent également ce modèle avec 57% de non pour l'âge de la retraite mais un petit oui pour la TVA.
A l'exception de Bâle-Ville, Schaffhouse et Soleure, l'ensemble des cantons alémaniques ont accepté la réforme. Zurich dit oui par 55,8%. Zoug et Nidwald sont les plus fervents défenseurs de la réforme, avec plus de 65% de oui aux deux pans en votation.
Au total, quelque 1,44 million d'électeurs ont glissé un bulletin favorable au relèvement de l'âge de la retraite des femmes (1,57 million pour la TVA). Le camp du non a réuni environ 1,41 million de votes contre une retraite à 65 ans et 1,28 contre la TVA. La participation s'est élevée à 51,5% des votants.
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25 ans sans réforme
Après trois échecs, l'AVS sera réformée. Hommes et femmes prendront une retraite ordinaire à 65 ans, soit un an de travail supplémentaire pour les femmes. Afin de faire passer la pilule, des compensations de 12,50 à 160 francs en fonction du revenu sont prévues pour les femmes proches de la retraite au moment de l'entrée en vigueur du projet.
Parallèlement, le taux de la TVA sera augmenté. Au total, ces deux pans de la réforme permettront d'alléger les finances du premier pilier de 17,3 milliards d'ici 2032. Tous deux devaient être acceptés pour que la réforme passe.
Estimant que cette réforme se faisait uniquement sur le dos des femmes, les syndicats et la gauche ont lancé le référendum. C'est finalement le camp bourgeois, opposé au dernier projet de réforme, qui remporte la manche.
Un "avertissement", juge Alain Berset
Devant la presse, le conseiller fédéral Alain Berset a estimé que ce résultat très serré était un message adressé au Parlement. "De grandes attentes s'adressent à la politique et nous devrons trouver des solutions", a ajouté le ministre des Assurances sociales.
Pour Alain Berset, il faut considérer ce résultat "avec modestie" et il faudra écouter la très courte majorité dans les futurs travaux. Et tout n'est pas résolu dans la prévoyance vieillesse. Il faudra trouver des solutions aux inégalités qui subsistent. "Notamment dans le 2e pilier." Et de poursuivre: "Le résultat d'aujourd'hui sonne comme un avertissement."
Interrogé dans Forum, le ministre relève encore que cette décision populaire "donne de la stabilité financière pour l'AVS pour les prochaines années". Le Fribourgeois note aussi qu'il existe des différences très importantes entre les cantons et les régions et qu'il faut s'en préoccuper et y être attentif pour la suite des travaux.
Le ministre doute que les projets en commission soient susceptibles d'obtenir une majorité en cas de votation. Il a rappelé que le gouvernement et les partenaires sociaux avaient proposé un projet largement soutenu. Ce projet devrait "revenir dans le jeu si on veut avoir des améliorations dans la prévoyance vieillesse".
ats/nr
Les femmes de gauche appellent à manifester lundi
A la suite de ce résultat, les femmes de gauche appellent à une manifestation lundi à 12h00 à Berne et à une nouvelle Grève des femmes en juin 2023.
"Nous sommes en colère. Le oui d'aujourd'hui à l'augmentation de l'âge de la retraite des femmes n'est pas seulement un grand pas en arrière en matière d'égalité, c'est une gifle pour toutes les femmes. Nous ne laisserons pas passer ce résultat", ont indiqué les femmes socialistes dans un communiqué dimanche.
"Les femmes qui ne comptent que sur l'AVS pour vivre à la retraite paient le prix fort de cette réforme. Elles n'ont pas les moyens de prendre une retraite anticipée et certaines d'entre elles finiront leur vie professionnelle au chômage ou en arrêt pour des raisons de santé", a dit la militante neuchâteloise Léa Ziegler, responsable de la communication du syndicat des services publics.
De son côté, l'Union suisse des paysannes et des femmes rurales juge primordial de poursuivre sans relâche les efforts pour assurer une véritable égalité entre hommes et femmes. Il s'agit en particulier d'assurer l'égalité des salaires et une meilleure conciliation entre la famille et l'activité professionnelle.
Un des résultats les plus serrés de l'histoire
La réforme de l'AVS prévoyant le relèvement de l'âge de la retraite des femmes à 65 ans a été acceptée dimanche avec 50,57% de oui. Seules 32'316 voix ont fait la différence, soit l'un des scrutins les plus serrés de l'histoire.
Ironie de l'histoire, le scrutin le plus serré a concerné le financement de la Prévoyance vieillesse 2020 via un relèvement de la TVA en 2017. Les citoyens helvétiques l'ont rejeté pour 2357 voix d'écart.
Le deuxième scrutin le plus serré a été en 2015 l'acceptation de la redevance radio-TV, avec 3649 voix de différence. En 2002, la votation sur l'initiative de l'UDC contre les abus dans l'asile a été rejetée avec 4208 voix d'écart.
En 2009, le passeport biométrique a, lui, été accepté avec 5681 voix de majorité. Le peuple suisse a aussi dit "oui" en 2020 pour 8670 voix d'écart aux nouveaux avions de combat.
D'autres scrutins ont vu des résultats très serrés. En 2014, l'initiative de l'UDC sur l'immigration de masse avait passé la rampe en 2014 avec 19'302 voix de majorité. Et l'adhésion à l'Espace économique européen (EEE) avait été rejetée en 1992 pour 23'836 voix de différence. Enfin, en 2012, 28'796 voix ont permis l'acceptation de l'initiative populaire de Franz Weber sur les résidences secondaires.