Marie souffre de troubles bipolaires. Une maladie incurable qui se manifeste par de grandes variations de l'humeur: une succession de phases de dépression, suivies de périodes d'excitation intenses.
"Il y a des moments où je me sens très exaltée, où je vais parler très vite et être très créative. On ne peut pas couper cette émotion… Plus on monte haut, plus la descente est difficile", témoigne la jeune femme.
Marie partage sa vie avec Jérôme. Comme tout jeune couple, ils ont des projets d'avenir. Mais ces derniers sont souvent contrecarrés par la maladie. "Ce n'est pas facile, car Jérôme doit s'adapter beaucoup plus à moi, que moi à lui", détaille-t-elle.
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Former les proches
Jérôme se sent parfois démuni face aux comportements de Marie. C'est pour cette raison qu'il a décidé de suivre un cours de premiers secours en santé mentale, donné par l'association Pro Mente Sana à Lausanne.
"La formation Ensa se calque sur les premiers secours prodigués en santé physique. L'idée est de donner des outils qui permettent aux gens de savoir comment réagir quand leurs proches montrent des signes de vulnérabilité en termes de santé psychique", explique l'instructeur Steven Derendinger.
À mi-parcours, Jérôme comprend déjà mieux le mal dont souffre son amie. "Il y a des choses que Marie a essayé d'expliquer avec ses mots, que je n'avais pas compris à l'époque et qui sont devenus beaucoup plus clairs avec la formation", témoigne le jeune homme.
Le programme a été importé d'Australie en 2019 et met l'accent sur la détection précoce des maladies. Une priorité pour beaucoup d'acteurs du monde de la psychiatrie.
"Plus on intervient tôt, moins l'impact de la chronicité de certaines maladies psychiques est important. Cette formation permet aussi à des personnes non spécialisées en psychiatrie d'intervenir de manière adéquate", ajoute Isabelle Gothuey, professeure et psychiatre à Fribourg.
Répercussions économiques
Les entreprises suisses perdent environ 50 milliards par année à cause des problèmes de santé de leurs employés. Environ 8 milliards de francs sont imputables à des problèmes de stress ou de détresse psychique sur le lieu de travail. Afin de limiter cette perte, certaines entreprises comme Novartis ou Swisscom ont décidé de former leur personnel à ces techniques.
"Les cas de maladies de longue durée peuvent être péjoratifs pour les entreprises et limiter leur potentiel économique. Toute absence évitée est donc bénéfique", explique Alicia Richon, porte-parole chez Swisscom.
L'OMS estime qu'une personne sur deux souffre de problèmes de santé mentale au cours de sa vie.
Nicolas Beer/saje