Tous les cantons romands, ainsi que le Tessin et les Grisons, participeront dimanche 30 octobre à la journée intercantonale d'engagement en faveur des personnes proches aidantes. Cette journée spéciale vise à soutenir les quelque 600'000 personnes en Suisse qui aident un proche malade ou dépendant.
Selon une large étude menée par la Confédération, près d'un Suisse ou une Suissesse sur treize de 16 ans et plus fournit des tâches d’assistance. Cela concerne principalement les 50-65 ans, qui s'occupent généralement de leurs parents ou de leurs beaux-parents pour beaucoup en parallèle de leur activité professionnelle.
Quelques dizaines de milliers d'enfants et adolescents aident aussi leurs proches, le plus souvent leurs grands-parents. Mais les chiffres sur cette population varient en fonction de la définition donnée à cette catégorie de la population.
Les personnes proches aidantes ne représentent néanmoins pas un groupe homogène, précise la Confédération dans un rapport. "Ce n'est pas la même chose d'être parent d'un enfant en situation de handicap, d'être l'épouse d'une personne dépressive ou encore d'être le fils d'un parent très âgé. Les configurations d'aide sont différentes", abonde Valérie Hugentobler, professeure à la Haute école de travail social et de la santé de Lausanne (HETSL) et invitée de La Matinale mardi.
De plus, les personnes ne se reconnaissent pas nécessairement dans le rôle de proche aidant. "Il y a une forme de normalisation et d'essentialisation de ce travail", précise cette spécialiste des politiques de vieillesse.
Un manque de reconnaissance politique
La conciliation entre vie professionnelle, vie privée et accompagnement d'un proche est parfois difficile pour la personne proche aidante. Ce statut peut avoir un impact sur sa propre santé, sa vie sociale ou sa situation financière. Il peut en outre mener à l'épuisement.
Une situation que les entreprises ont encore du mal à gérer, considère Valérie Hugentobler, poussant certaines personnes, en particulier des femmes, à diminuer leur temps de travail, voire à arrêter de travailler.
"Les ressources humaines sont souvent peu sensibilisées à ces questions. Un effort a été fait autour de la conciliation avec la prise en charge des enfants. Par contre, la question de l'accompagnement des personnes malades, en situation de handicap ou âgées est encore peu conceptualisée. A l'heure actuelle, très peu d'entreprises ont une réelle politique en matière de proches aidants", souligne la professeure.
Elle estime également que des dispositifs ciblés - à l'instar du congé payé octroyé aux parents pour la prise en charge d'un enfant gravement malade ou victime d'un accident, en vigueur depuis le 1er juillet 2021 - devraient être mis en place au niveau politique, en particulier pour les situations à long terme, afin d'améliorer les conditions d'accompagnement pour les personnes aidantes et leurs proches aidés.
Des projets d'indemnisation
L'impact du travail bénévole des personnes proches aidantes sur l'économie est difficile à mesurer. L'Enquête suisse sur la population active (ESPA) de 2016 l'estime au total à 80 millions d'heures d'assistance et de soins, et à 3,7 milliards de francs.
Pour soutenir cette population, certains cantons ont instauré des aides financières, des congés ou des hotlines téléphoniques. A Berne, un projet vise à indemniser les personnes qui accompagnent un proche en situation de handicap, afin d'éviter le placement en foyer dans certains cas.
Les proches aidants du canton pourraient ainsi toucher jusqu'à un tiers du montant total alloué à la personne accompagnée, en fonction de l'assistance fournie. La révision de la loi doit encore passer sur le bureau du Grand Conseil bernois. Sa mise en oeuvre est attendue pour 2024.
En Suisse, le service civil mène par ailleurs un projet pilote d'assistance ambulatoire pour les personnes âgées ou handicapées.
Propos recueillis par David Berger/md/iar