Les filières bilingues ont le vent en poupe en Suisse, montre une enquête menée par le professeur Daniel Elmiger (UNIGE) et réalisée avec le soutien du Forum du bilinguisme à Bienne et l'Institut de plurilinguisme à Fribourg.
Il existe aujourd'hui 373 filières d'enseignement bilingue au niveau de l'école obligatoire et du secondaire II, selon l'inventaire réalisé. Et si l'on y ajoutait les offres préscolaires et celles du degré tertiaire, on pourrait sans doute en dénombrer bien plus de 600, avance le document.
"Ce dynamisme témoigne de l'approche innovante du système scolaire suisse en matière d'apprentissage des langues", écrit Daniel Elmiger. Cette évolution illustre aussi la volonté d'explorer de nouvelles voies, telles justement les filières bilingues.
Grand potentiel encore à l'école obligatoire
En 2022, quatre filières sur cinq (81%) se trouvent au niveau du secondaire II et donc à peine un cinquième (19%) au niveau de l'école obligatoire. Au niveau gymnasial, une maturité environ sur six est délivrée avec une mention bilingue. Pour le professeur, il existe un grand potentiel de développement pour les offres bilingues à l'école obligatoire.
Mais les formes d'organisation de l'enseignement bilingue soulèvent des questions de délimitation: à partir de quand un enseignement peut-il être qualifié de bilingue? Il en résulte une situation hétérogène au sein de l'ensemble du système éducatif suisse.
Il y a par ailleurs de grandes disparités entre les régions linguistiques à propos des langues d'immersion. Dans les cantons bilingues et le canton trilingue des Grisons, le choix se porte plus facilement sur une langue nationale du voisinage: 84% dans les cantons de Berne, Fribourg et du Valais et 81% dans celui des Grisons.
Vers une anglicisation du système éducatif?
La langue cible la plus fréquente en Suisse est cependant l'anglais, langue fortement représentée dans les cantons monolingues. Cet idiome y est considéré comme plus facile et comme plus utile. Dans de nombreux endroits, davantage d'enseignants sont en mesure et prêts à enseigner de manière immersive en anglais.
Le développement va clairement vers des filières allemand-anglais ou français-anglais, constate le Forum du bilinguisme. La focalisation sur l'anglais risque d'entraîner une anglicisation du système éducatif suisse et d'engendrer une perte d'importance des langues nationale. A cela s'ajoute le risque d'une aggravation de la pénurie d'enseignants en allemand et en français.
ats/oang