Egalité oblige, le Parti socialiste ne doit être représenté au Conseil fédéral que par une femme et par un homme, en l'occurrence Alain Berset. C'est la vision de la direction du parti, qui souhaite qu'il n'y ait que des candidates dans la course à la succession de Simonetta Sommaruga.
Il s'agit d'une question de cohérence, reconnaissent de nombreux élus socialistes. Pour plusieurs d'entre eux, cette répartition paritaire est d'autant plus importante que les élections fédérales approchent.
Mais d'autres ne l'entendent pas exactement de cette oreille. Maintenir la formule actuelle revient à empêcher les hommes socialistes et alémaniques d’accéder au Conseil fédéral pendant encore des années, tout en écartant d’éventuelles candidatures de poids.
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Volonté de changement
Parmi les détracteurs du principe "un homme – une femme", un ténor du parti: Daniel Jositsch. Interrogé vendredi dans Forum, le conseiller aux Etats zurichois et vice-président du groupe parlementaire socialiste critique cette stratégie, qui laisse peu de marge de manœuvre pour régler l'attribution des deux seuls sièges socialistes. "On ne veut pas que ce soit une femme alémanique et un homme romand pour l'éternité ", lance-t-il, affirmant qu'il est "nécessaire de faire des changements". Il va donc proposer au groupe de ne pas limiter les candidatures.
Selon lui, il est envisageable qu'il y ait deux ministres socialistes du même sexe durant une courte période. Il rappelle un précédent relativement récent: Simonetta Sommaruga avait succédé à Moritz Leuenberger en automne 2010. L'autre siège socialiste au gouvernement était alors occupé par Micheline Calmy-Rey, qui est partie, elle, en novembre de l'année suivante.
"Un peu discriminatoire"
"On doit ouvrir pour avoir différentes candidatures, et après on peut décider", propose donc le sénateur zurichois. "Je ne dis pas que cela doit être un homme", ajoute-t-il. Il estime par ailleurs que la proposition de la direction de son parti de ne pas admettre de candidature masculine est "un peu discriminatoire".
Cela n'a rien à voir avec l'égalité si on dit que les hommes ne peuvent pas se présenter.
L'égalité du Conseil fédéral dans son ensemble est plus importante que celle des deux sièges socialistes, soutient par ailleurs Daniel Jositsch. "Là, ce n'est pas seulement le Parti socialiste qui doit présenter des femmes", affirme-t-il.
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Enfin, il avance qu'au moment de prendre connaissance des candidatures, "le plus important, c'est la qualification des candidats et s'ils peuvent travailler avec les autres conseiller fédéraux". "On peut regarder après la distribution de la région, du sexe, etc", propose-t-il.
Daniel Jositsch peut-être candidat
"C'est la même chose lorsqu'on a dit qu'il n'y aura peut être pas de représentation de Zurich (suite à la récente démission du conseiller fédéral zurichois Ueli Maurer, ndlr)", compare-t-il. "Comme conseiller aux Etats zurichois, j'ai toujours dit que cela ne m'importe pas."
Pour moi la qualité, c'est plus important que s'il y a un Zurichois ou une Zurichoise.
Ainsi, Daniel Jositsch dit réfléchir à se porter candidat à la succession de Simonetta Sommaruga, tout en soulignant ne pas avoir encore pris de décision. "Je suis en train de discuter avec différents membres de l'Assemblée fédérale et surtout avec ma famille, pour voir ma situation personnelle", indique-t-il. Il ajoute qu'il se battra pour figurer sur le ticket s'il décide d'être en lice pour l'élection au Conseil fédéral.
Choisir une Romande?
Pour le changement de profil des deux socialistes au gouvernement que Daniel Jositsch appelle de ses voeux, le PS pourrait avoir sous la main une autre solution: élire une femme romande.
Ce choix ouvrirait la voie à un homme alémanique au moment du départ d’Alain Berset. Mais, dans les faits, peu de parlementaires croient à ce scénario. En effet, si une Romande succède à Simonetta Sommaruga, la Suisse serait dirigée par une majorité de ministres latins, alors qu'elle compte 62% de germanophones.
Le PS n'a donc pas beaucoup d'alternatives. Il est encore trop tôt pour savoir si le groupe parlementaire va suivre la proposition de la direction du parti.
Voie intermédiaire
Plusieurs élus socialistes imaginent toutefois une voie intermédiaire. Lorsqu'il prendra sa décision sur cette stratégie, le groupe pourrait par exemple déclarer qu'il compte privilégier les candidatures féminines, sans exclure définitivement qu'un homme figure sur le ticket.
Les parlementaires du PS ont rendez-vous le 18 novembre pour en discuter.
Sujet radio: Marielle Savoy
Propos recueillis par Esther Coquoz
Adaptation web: Antoine Michel