Les multinationales installées en Suisse romande sont prêtes à accepter le nouvel impôt minimal de 15%. "Ne pas mettre en place ce nouveau standard international créerait une incertitude juridique. Donc, on y est plutôt favorable, pour autant que l'ensemble des pays le mettent en place," a indiqué mercredi soir dans le 19h30 de la RTS Pierre de Pena, vice-président du Groupement des entreprises multinationales (GEM), et par ailleurs membre de la direction de Caterpillar.
Aujourd'hui, dans la plupart des cantons romands, à l'exception du Valais et du Jura, le bénéfice des multinationales est taxé à moins de 15%. Dans ces cantons, les multinationales devraient donc payer davantage d'impôts dès 2024, date à laquelle la Suisse compte mettre en œuvre l'impôt minimal exigé par l'OCDE.
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Selon Pierre de Pena, aucune multinationale ne pense pour l'instant quitter la Suisse à cause de cette hausse d'impôts. "Chaque société fera ses comptes. Nous pensons que pour la plupart des sociétés l'impact ne sera pas systémique, mais il faudra que la Suisse fasse attention à maintenir sa compétitivité sur d'autres éléments que la fiscalité," déclare-t-il.
Compromis remis en question
La hausse d'impôts devrait rapporter gros à la Suisse, entre 1 et 2 milliards de francs par an, estime le Département fédéral des finances. Cette manne suscite la convoitise du Parlement. Deux commissions du Conseil national, dont celle de l'économie ce mardi, exigent que la Confédération et les cantons se partagent ces nouvelles recettes à parts égales.
Sans quoi les finances fédérales vont virer au rouge, craignent la gauche et Le Centre. "La Confédération assume de plus en plus de tâches, elle a besoin de nouvelles ressources pour pouvoir financer ses dépenses, pour l'armée, les vaccins ou encore pour le climat", explique Alois Gmür, conseiller national schwytzois (Le Centre) et membre de la commission des finances.
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Pas question, rétorquent les cantons. Comme convenu avec Ueli Maurer, ils veulent garder 75% de la manne pour eux et n'en laisser que 25% à la Confédération. "Les cantons ont besoin de ces fonds pour offrir des compensations aux multinationales," déclare Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat (GE) et ministre des finances. "Il faut que les cantons puissent mettre en oeuvre des mesures qui maintiennent leur attractivité, on sait qu'en Suisse le coût du travail est important et le coût de la vie aussi."
Votation en vue
Les multinationales nomment déjà les compensations qu'elles attendent en échange de la future hausse d'impôts. "Nous pensons que les cantons et la Confédération devront investir dans le soutien à l'innovation et la recherche, notamment à cause des incertitudes qu'on a aujourd'hui avec l'Union européenne. Cela peut être le financement de certains programmes de recherche ou bien du soutien à la recherche et au développement, comme le font déjà beaucoup de pays," indique Pierre de Pena.
La balle est dans le camp du Conseil national, qui s'exprimera en décembre. Puis le peuple aura le dernier mot lors d'un vote qui devrait avoir lieu mi 2023.
Jean-Marc Heuberger/miro