Cinquante organisations, dont Amnesty International et Opération Libero, veulent qu'il ne soit plus nécessaire de manifester clairement son désaccord pour s'opposer à un acte sexuel, mais qu'à l'inverse un consentement préalable soit requis, sans quoi l'acte constituerait un viol.
>> Lire aussi : La définition du viol en Suisse est problématique, insiste l'ONU
Des parlementaires de plusieurs bords politiques soutiennent cette redéfinition du viol en droit pénal, notamment les conseillères nationales Léonore Porchet (Vert-e-s/VD), Tamara Funiciello (PS/BE) et Kathrin Bertschy (Vert'libéraux/BE).
Le Conseil national se prononcera sur la question lors de la session d'hiver.
Karin Keller-Sutter rencontre les cantons
La ministre de la Justice Karin Keller-Sutter a elle rencontré lundi les cantons et les milieux spécialisés sur la thématique des violences sexuelles pour explorer des pistes d'amélioration. L'ONU et le Conseil de l'Europe ont en effet récemment épinglé la Suisse sur sa gestion des violences domestiques et sexuelles.
>> Lire à ce sujet : Mieux lutter contre les violences domestiques, l'objectif du Conseil fédéral
Pour la conseillère fédérale, il faut trouver le moyen d'encourager les victimes de violences sexuelles à porter plainte, car beaucoup de femmes ont peur de tout ce qu'implique une procédure, qui plus est souvent lourde. "Il faut créer la confiance lorsqu'elles entament une procédure, il faut que les victimes soient bien accompagnées, bien encadrées, et qu'on les prenne au sérieux", a-t-elle plaidé (lire aussi l'encadré).
Le consentement explicite "ne fera pas tout"
La révision en cours du droit pénal sur la définition du viol sera un grand pas, quelle que soit la solution choisie par le Parlement, mais cela ne fera pas tout, estime la cheffe du Département de justice et police.
Karin Keller-Sutter rappelle aussi que beaucoup d'infractions se passent dans un milieu connu ou familial, dans le couple par exemple, ce qui "rend la démarche difficile".
Outre l'accompagnement, la formation continue des polices cantonales, des ministères publics et des tribunaux doit aussi être améliorée, car ces autorités sont en première ligne dans les procédures. Elles doivent être encore mieux sensibilisées, insiste-t-elle encore.
ats/vic
Genève et Vaud proposent un double suivi gynécologue-légiste
Karin Keller-Suter a cité lundi en exemple le Centre romand de médecine légale en matière de lutte contre les violences sexuelles. Dans les cantons de Vaud et Genève, il a mis en place une consultation au sein des hôpitaux. Elle permet à toute personne qui a subi une agression d'être vue dans les deux heures par un gynécologue, mais aussi par une médecin légiste.
"On parle beaucoup d'améliorer la prise en charge des victimes et de renforcer le volet pénal. Or, il est important de savoir que, quand on est victime d'une agression sexuelle, il y a un côté très urgent dans la prise en charge", a expliqué dans Forum le professeur de médecine légale à l'Université de Genève et responsable de l'unité romande de Médecine forensique Tony Fracasso.
Préserver tout élément de preuve
"Il est important de préserver tout élément de preuve qui pourrait être présenté dans le contexte d'une procédure judiciaire successive si la victime décide de porter plainte", poursuit le légiste, d'autant plus que, rappelle-t-il, seules 30% des victimes environ portent plainte tout de suite.
En ayant affaire à un médecin légiste, les personnes abusées sont également davantage reconnues dans leur statut de victime, note Tony Fracasso, qui plaide pour qu'un effort de communication soit réalisé afin de mettre au courant le grand public de l'existence de ce double examen.
Pour l'heure, 4 à 7% des personnes qui se présentent sont des hommes, mais le spécialiste pense qu'ils sont encore nettement sous-représentés par rapport au total réel des victimes, ces derniers ayant probablement "encore plus de difficultés à dénoncer ces événements".