Cette augmentation se ressent aussi sur le terrain. Neuchâtel par exemple observe une augmentation des kidnappings depuis le début de la pandémie. Et ce n'est que la pointe de l'iceberg, puisque la Confédération recense seulement les enfants emmenés à l'étranger et dans certains pays - ceux qui ont ratifié la Convention de la Haye.
Pour les autres pays, c'est le Service Social International (SSI) qui négocie les rapatriements. Albert Mukwiye, intervenant social au SSI-Suisse, détaille la cause de ces enlèvements.
"La base commune de tous ces enlèvements, c'est le conflit et le manque de communication entre les parents. Le parent va enlever l'enfant parce qu'il se sent socialement isolé et veut retourner dans son pays d'origine", relève-t-il dans La Matinale.
"Il arrive aussi que le parent ne soit pas d'accord avec la garde parentale ou la décision des tribunaux suisses, et il part dans un autre pays où il pense qu'il aura l'avantage sur ces questions-là. On observe encore des conflits très élevés, avec des parents qui font ça par vengeance", explique encore Albert Mukwiye.
Situations conflictuelles en explosion
L'Office des mineurs du canton de Berne confirme une augmentation de conflits parentaux aigus en lien avec le droit de garde et de visite. Pareil dans le canton de Vaud, où la justice prescrit de plus en plus de "visites médiatisées" aux parents, c'est-à-dire avec la présence obligatoire d'un tiers.
Pour la Commission des droits de l'enfant de l'ordre des avocats de Genève, c'est aussi la pandémie de Covid-19 qui a péjoré des situations familiales fragiles et allongé les procédures judiciaires.
Selon l'avocate Camille Odier, co-présidente de cette Commission, le concept juridique de l'enlèvement est parfois trop fort.
"Quand on traite des situations d'enlèvements, souvent on se rend assez vite compte en parlant avec nos clients qu'on n'est pas confronté à des situations d'enlèvement, mais à des parents inquiets qui veulent extraire leurs enfants d'une situation toxique", explique-t-elle.
Rôle du genre
Ces enlèvements sont en particulier le fait de mères, ce qui peut surprendre car les enlèvements commis par les pères semblent plus médiatisés. En réalité, les mamans sont responsables de 75% des enlèvements d'enfants. Ce sont elles aussi qui refusent les droits de visite du co-parent - dans 85% des cas.
La question du genre n'est pas anodine non plus dans le cas de rapatriement d'enfants. Selon la culture du pays, plus favorable à la mère ou au père, l'enfant sera plus facilement rapatrié ou pas du tout.
En Suisse, le Mouvement de la condition paternelle vaudoise estime que les pères sont trop souvent lésés dans l'attribution du droit de garde et de visite. Un constat partagé par Anne Reiser, avocate genevoise spécialisée dans le droit de la famille.
Sujet radio: Charlotte Frossard
Adaptation web: Julien Furrer