Ce matin, il n'y a pas grand monde dans la salle de prélèvement du centre de transfusion sanguine de Genève. Seuls quelques habitués sont présents comme cette donneuse qui tend son bras et qui détourne le regard quand l'aiguille approche. "C'est mon 39ème don, mais c'est vrai que je n'aime pas regarder".
Un acte civique
Malgré cette petite crainte de l'aiguille, pour elle, le don du sang est un acte civique. "Il y a des gens qui en ont besoin et moi j'en ai assez pour en donner. C'est normal de le faire".
En Suisse, huit personnes sur dix auront un jour besoin de sang dans leur vie. Par exemple, dans le cadre d'une opération, d'un accouchement, d'une maladie ou d'un accident. Mais seulement 5% des adultes donnent leur sang régulièrement.
Philippe Thivolet fait partie de ces malades ayant bénéficié d'une transfusion: "J'ai eu une grave maladie hépatique, mon foie a arrêté de fonctionner, j'ai dû avoir une greffe et j'avais besoin de sang. Sans les donneurs, je serais tout simplement mort".
Les donneurs m'ont tout simplement sauvé la vie
"Pour fonctionner, nous avons besoin de près de 70 dons par jour, 50 dons de sang et 20 dons de plaquettes" explique Pierre Guyon-Gelllin, infirmier responsable du centre de transfusion de Genève. "Actuellement, nous avons 17'000 donneurs dans le canton mais ce n'est pas suffisant. Certains ne donnent qu'une fois, d'autres ne sont pas éligibles".
L'enjeu est double pour le centre de transfusion: trouver de nouveaux donneurs, notamment des jeunes, et diversifier le plus possible les groupes sanguins pour assurer tous les besoins.
Mais tout le monde ne peut pas être donneur car des conditions doivent être remplies. Voyager dans un pays à risque peut être rédhibitoire par exemple. Mais aussi avoir eu plusieurs partenaires sexuels durant les quatre derniers mois.
>>> Écoutez le reportage de 15 Minutes
Les vacances, une période critique pour les dons du sang
Alléger les critères d'exclusion
Pour recruter et fidéliser les donneurs et donneuses, des collectes mobiles sont organisées dans tout le canton. Sur le plan politique, des interpellations demandent un allègement des critères d'exclusion pour les hommes homosexuels. Actuellement, un an d'abstinence sexuelle est exigé pour pouvoir donner son sang.
Sophie Waldvogel, médecin responsable de l'unité d'hématologie transfusionnelle aux HUG, se dit favorable à un tel assouplissement: "C'est une discrimination qui génère beaucoup de souffrance et d'incompréhension. Chaque jour, je dois répondre à des personnes homosexuelles qui ne comprennent pas pourquoi elles sont exclues du don".
Mais pour la médecin, cela ne résoudra pas le problème du manque de dons: "Aujourd'hui, si ceux et celles qui peuvent donner leur sang le faisaient, il n'y aurait pas de problème."
>>> Lire aussi: Vers plus d'égalité pour les hommes homosexuels dans le don de sang
Dans les congélateurs de la salle de distribution, il y a environ 700 poches de sang en réserve. "Un accidenté de la route a par exemple besoin d'une quarantaine de poches, donc la pénurie peut arriver très vite", explique Sophie Waldvogel. Le manque de sang est un problème récurrent à Genève, qui fait d'ailleurs régulièrement appel à d'autres cantons pour assurer son stock.
Coraline Pauchard, Katia Bitsch