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Déjà 18 Ukrainiens en situation médicale urgente accueillis en Suisse, dont un enfant

La Suisse refuse d'accueillir des soldats et des civils ukrainiens blessés. [KEYSTONE - NARIMAN EL-MOFTY]
Dix-huit civils ukrainiens ayant besoin d'un traitement médical urgent ont été transférés en Suisse depuis septembre / La Matinale / 1 min. / le 29 décembre 2022
La Suisse a déjà accueilli 18 civils ukrainiens en besoin d'un traitement médical urgent depuis le mois de septembre, à la demande de l'Ukraine. Pour la première fois, un enfant ukrainien gravement blessé a pu être transporté en Suisse la semaine dernière. Mais l'accueil pourrait déjà ralentir.

C'est la saturation actuelle des hôpitaux, et en particulier des hôpitaux pédiatriques en Suisse, qui est à l'origine de ce ralentissement. L'admission d'un deuxième enfant gravement malade, prévu la semaine semaine dernière, a dû être reportée en janvier.

A ce jour, 8 femmes et 10 hommes nécessitant des soins aigus ont pu être hospitalisés en Suisse. Parmi eux, une majorité d'adultes de plus de 31 ans. Tous ont été répartis entre dix hôpitaux. Du côté romand, il s'agit des HUG, du CHUV et de l'hôpital de Berne.

"Neutralité" préservée

La Confédération avait dans un premier temps refusé de recevoir des blessés ukrainiens au nom de la neutralité suisse, car l'Otan demandait alors d'accueillir les civils et les militaires.

Marco Sassòli, professeur de droit international public à l'Université de Genève, explique que, selon le droit de la neutralité, si la Suisse avait reçu des militaires blessés, elle aurait dû les interner jusqu'à la fin du conflit une fois remis sur pied. "Évidemment, l'Ukraine ne veut pas cela!", lance le professeur.

"La Suisse a donc déclaré qu'elle ne peut pas les soigner et les ramener en Ukraine pour qu'ils puissent continuer à combattre une fois qu'ils sont rétablis", conclut-il. Les civils blessés peuvent en revanche retourner dans leur pays quand ils sont rétablis s'ils le souhaitent.

>> L'interview de Marco Sassòli dans La Matinale :

La Suisse se dit prête à évacuer des blessés de guerre ukrainiens. [Keystone - Bernat Armangue]Keystone - Bernat Armangue
18 Ukrainiens en besoin de traitement médical urgent accueillis en Suisse depuis septembre: interview de Marco Sassòli / La Matinale / 59 sec. / le 29 décembre 2022

Pas d'enfants en situation de handicap

L'Ukraine avait également demandé à la Suisse d'accueillir des enfants en besoin de soins continus pour déficience mentale ou physique, mais cet accueil n'est pas à l'ordre du jour, selon la Conférence des directrices et directeurs cantonaux de la santé (CDS), qui coordonne le dispositif d'accueil.

Tobias Bär, responsable communication de la CDS, raconte que "l'ambassade de Suisse à Kiev et l'aide humanitaire de la Confédération ont procédé à des évaluations sur place, dans différents foyers. Il en ressort que les enfants sont très bien pris en charge et que ni la direction du foyer ni les parents ne souhaitent une évacuation vers un autre site", avance Tobias Bär. Pour ces enfants, l'aide humanitaire se concentrera donc sur un soutien des foyers sur place.

Et pour les civils qui continueront d'être amenés en Suisse en 2023, la REGA coordonne les vols sanitaires depuis la Pologne. Le coût du transport est pris en charge par la Confédération, tandis que les frais hospitaliers sont couverts par les assurances et les cantons, grâce au statut de protection S dont bénéficient les réfugiés d'Ukraine.

Blessé à la tête

Parmi les 18 civils ukrainiens transférés pour bénéficier de traitements médicaux urgents figure Arsen Hayrapetian. Il avait 17 ans quand il a été blessé à la tête par une bombe. C'est le CHUV qui permettra de sauver son oeil. Il vit désormais avec sa famille dans la commune de Hautemorges.

>> Le témoignage d'Arsen Hayrapetian dans La Matinale :

Arsen Hayrapetian, un réfugié ukrainien arrivé il y a quelques semaines en Suisse pour se faire soigner d'une blessure grave à la tête, causée par une bombe à Kharkiv. [RTS]RTS
Dix-huit civils ukrainiens transférés en Suisse pour des traitements médicaux urgents: témoignage d'Arsène Hayrapetian / La Matinale / 2 min. / le 29 décembre 2022

Dans la famille Hayrapetian, on tremble encore en évoquant ce jour de printemps. Arsen et ses proches étaient dans la rue à Kharkiv, quand une bombe est tombée subitement. 

"C'était le 8 avril. Toute la famille se dirigeait vers la pharmacie. A ce moment, une sorte de bombe m'a touché. Et j'étais allongé par terre, dans du sang. J'ai eu une première opération à Kharkiv, car il restait un éclat de la bombe dans ma tête. Et j'ai eu de la chance de rester en vie", raconte au micro de la Matinale de la RTS le jeune rescapé.

Oeil sauvé

"La première opération s'est bien passée. Quand je suis arrivé en Suisse, l'hôpital était surpris que les médecins ukrainiens aient pu me sauver dans de telles conditions", raconte aussi Arsen. Mais les soins ne suffisent pas. Pour sauver l'oeil d'Arsen, les médecins ukrainiens lui disent de partir. La famille passera par la Pologne avant d'arriver en Suisse.

"Au CHUV, ils ont choisi le jour de mon anniversaire pour faire l'opération. Le médecin m'a fait un très beau cadeau. Il a fait tout ce qu'il a pu et il a fait du très bon travail".

"J'essaie de retourner à mon état normal, je crois fermement que je vais réussir à être fort comme un boeuf bientôt. Mais ça prend du temps. (...) J'essaie de faire des blagues sur ma situation. Mais quand je me souviens ce qui m'est arrivé, ça fait très peur, c'est un film d'horreur", conclut le jeune homme.

En attendant de reprendre le sport et ses cours d'économie, le programme d'Arsen se concentre sur la rééducation.

Sujet radio: Charlotte Frossard

Adaptation web: Julien Furrer

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