On les appelle les jardins de pierres et on les voit se répandre un peu partout: sur les terrains de particuliers, d’entreprises ou encore des cours d’écoles.
Ces zones ont augmenté de 21% entre 2018 et 2021, pour atteindre une surface totale d'environ 11 km2, selon une estimation de l’Office fédéral de l’environnement (OFEV).
Si elles ont autant de succès, c’est qu’elles sont souvent plus faciles à entretenir qu’un jardin classique, avec une pelouse à tondre, des plantes à tailler ou des mauvaises herbes à arracher.
Impact sur la biodiversité et le climat local
Ces empierrements sont généralement installés sur une couche de séparation tels qu'un tissu, un film plastique ou même du béton, qui étouffent la faune et la flore.
Mais ce n'est pas tout. Dans son rapport, l’OFEV explique que, sous le soleil, les pierres peuvent atteindre des températures de plus de 50 degrés, créant ainsi des îlots de chaleur.
"L'empierrement ne va pas changer le climat général. Par contre, il a un impact sur le climat de la ville et sur la sensation de chaleur éprouvée lors d'épisodes de grandes températures et de sécheresse l'été", explique Edward Mitchell, professeur de biologie à l'Université de Neuchâtel. Il précise: "Plus l'environnement est bétonné, moins la régulation du climat peut se faire par l'eau du sol et par la végétation."
Par ailleurs, l’OFEV relève aussi l’accélération du ruissellement en surface, avec des eaux qui ne sont plus absorbées par les sols. Un phénomène particulièrement problématique lors de fortes précipitations.
Vers une meilleure réglementation
Pour lutter contre les empierrements, le rapport de l’Office fédéral de l’environnement propose trois recommandations. La première concerne la mise en place de règles contraignantes au niveau des communes. Les jardins de pierres seraient ainsi soumis à des autorisations de construire.
Le Conseil fédéral soutient aussi l’idée d’une aide financière pour développer des espaces verts en ville, avec la plantation d’arbres ou le dressage de façades végétalisées.
La troisième solution passe par des campagnes de sensibilisation auprès des autorités et de la population.
A noter que certaines communes n’ont pas attendu ces recommandations pour agir. C’est le cas de Langendorf, dans le canton de Soleure, qui interdit tout nouveau jardin de pierres depuis 2020.
L’OFEV précise que des projets pour réglementer davantage ces surfaces sont aussi en discussion dans plusieurs cantons romands, dont Fribourg, Valais et Vaud.
Mathieu Henderson
Recouvrir son jardin de pierres, "une facilité trompeuse"
La technique d'empierrement est de plus en plus utilisée en Suisse, notamment par des particuliers qui veulent s'éviter l'entretien de leur jardin.
Mais cette solution, qui engendre notamment des hausses des températures au niveau local, peut s'avérer trompeuse, comme l'explique Eric Amos, architecte-paysagiste et enseignant à la Haute école du paysage, d'ingénierie et d'architecture de Genève (HEPIA): "Il faut alors trouver des réponses par l'arrosage, l'irrigation ou la création d'ombrage de manière artificielle. Cela occasionne finalement aussi un surcroît de travail."
Un guide pour aménager son jardin
Selon lui, la diminution des jardins de pierres passe par une plus grande sensibilisation des propriétaires. "Celle-ci peut être menée par les professionnels mais aussi par les communes et les cantons."
Selon lui, le succès de cette sensibilisation repose surtout sur des solutions simples à mettre en oeuvre. L'expert a d'ailleurs participé à l'élaboration d'un guide à l'attention des particuliers. Ce document soutenu par la Confédération contient seize fiches explicatives pour l'aménagement des surfaces extérieurs.