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La Ville de Zurich introduit un projet pilote de congé menstruel

La ville de Zurich lance un projet pilote de "congé menstruel"
La ville de Zurich lance un projet pilote de "congé menstruel" / 19h30 / 2 min. / le 23 janvier 2023
Le Conseil municipal zurichois a accepté en décembre un projet pilote des Verts demandant l’introduction d’un congé menstruel au sein de l’administration. Le projet divise politiques et syndicats.

Jana Theisen a 36 ans et exerce en tant que vétérinaire dans une clinique zurichoise. Elle souffre depuis plusieurs années d’endométriose, une maladie gynécologique qui entraîne des douleurs aiguës et invalidantes au quotidien. Durant ses menstruations, les douleurs sont telles qu’elles entravent sa capacité à exercer sa profession. "Les premiers jours, j’ai tellement mal que ma vue se brouille. Mon esprit ne me permet plus de travailler".

Pour aider les femmes qui souffrent de menstruations douloureuses, un projet pilote de la Ville de Zurich veut accorder une dispense pour règles invalidantes à ses employées. En décembre, le Conseil municipal a accepté un postulat des Verts demandant l’introduction d’un congé menstruel au sein de l’administration zurichoise, une première en Suisse.

Les personnes souffrant de règles douloureuses "fortes" et "régulières" pourront s’absenter entre 1 et 5 jours tout en continuant de toucher leur salaire.

Handicap

Le projet a été introduit par les Vertes Sélina Walgis et Anna-Béatrice Schmaltz. "Le but de l’initiative est de soutenir les personnes concernées et qu’elles puissent en parler ouvertement. Elles pourront obtenir une dispense si elles le souhaitent", détaille la conseillère communale Anna-Bétrice Schmaltz.

Une mesure jugée nécessaire pour Julian Metzler, gynécologue à l’Hôpital de Zurich. Le médecin rappelle que l’endométriose touche près de 10% de la population féminine. Encore taboue, la maladie n’est pas suffisamment prise en compte dans la société et dans les institutions, alors qu’elle est réellement handicapante. "En consultation, certaines femmes disent ressentir une douleur allant de 7 à 9 sur une échelle de 10. Si vous dites cela à une infirmière dans une unité intensive, elle vous administrera probablement un opiacé pour calmer la douleur ", explique le gynécologue.

>> Lire également : L'endométriose et les enjeux de la recherche sur une maladie méconnue

Controverses

L’idée d’un congé menstruel est loin de faire l’unanimité. Certains jugent le projet inutile. Pour la PLR Jasmine Bourgeois, conseillère communale à Zurich, le congé maladie par l’obtention d’un certificat médical est déjà suffisant. Elle estime qu’un congé menstruel peut amener à une certaine stigmatisation. "Personnellement, je ne veux pas que tous les hommes sachent quand j'ai mes règles. C'est un pas en arrière pour moi. Je n’ai pas envie de justifier la raison de mon absence", souligne l’élue.

Le congé menstruel inquiète aussi le syndicat Unia. "Dans le débat actuel, les vieux préjugés discriminatoires et les stéréotypes sur les femmes, considérées comme le 'sexe faible', sont encore courants. Ce congé pourrait fragiliser les femmes dans le monde du travail", estime leur porte-parole Nicole Niedermüller.

>> Pour aller plus loin : Podcast - Le congé menstruel, c’est vraiment une bonne idée?

Dans le monde

Si la Suisse connaît des débuts timides, d’autres pays à l’international ont sauté le pas. En Espagne, les députés ont adopté le 15 décembre un projet de loi créant un congé menstruel pour les femmes et renforçant l’accès à l’avortement dans les hôpitaux publics. Si la loi est définitivement adoptée, l’Espagne deviendrait le premier pays européen à intégrer la santé menstruelle dans sa législation.

>> Lire : Le Parlement espagnol vote sur un congé menstruel et un élargissement du droit à l'IVG

Au Japon, le droit au congé menstruel est inscrit dans la loi depuis 1947. Les entreprises ne peuvent donc pas forcer une employée à travailler si elle demande à être en congé menstruel. En revanche, il n’y a pas de limite au nombre de jours qui peuvent être pris pour ce type de congés mais ils ne sont généralement pas payés.

En Corée du Sud, les employées sont autorisées à prendre un jour de congé menstruel par mois, qui n’est pas payé. À Taïwan, on reconnaît également le droit au congé menstruel pour les employées dans la limite d’un jour par mois et d’un total de trois jours par an.

Autre exemple en Afrique australe, où la Zambie a adopté en 2015 une loi accordant aux femmes le droit à un congé menstruel qui leur permet de prendre un jour de congé supplémentaire par mois, sans préavis ni certificat médical en cas de règles douloureuses.

Sujet TV : Séverine Ambrus

Adaptation web : saje

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