"Je ne vois pas un manque de relève chez les grands chefs, car c'est un métier passion"
Dans la grande halle du Bocuse d'Or à Lyon, les supporters ont sorti les drapeaux et les tambours. Dans une ambiance digne d'un match de Coupe du Monde, les cuisinières et cuisiniers se lancent dans un marathon de plus de 5 heures. Vingt-quatre pays sont en lice et beaucoup de professionnels ont fait le déplacement pour observer cette compétition.
Parmi eux, le chef Franck Giovannini, de l'Hôtel de Ville de Crissier (VD). Il a terminé troisième du concours en 2007: "Je l'ai fait pour un challenge personnel. Evidemment pour les chefs qui finissent dans les premières places, ça peut être un tremplin au niveau international".
Cette année, le Danemark s'est imposé. La Suisse s'est classée dizième. Elle était représentée par le Bernois Christoph Hunziker, la commis Céline Maier et le coach Dominic Bucher, qui a lui aussi participé au concours lyonnais il y a quelques années: "C'est le plus difficile. Etre sur le podium, c'est un grand honneur, mais aussi une pression pour la carrière".
Plusieurs examens par jour
La pression, ces as des fourneaux y sont habitués. "Ils ont un concours à midi et un concours le soir", relève Lucien Mosimann, coordinateur de l'Académie suisse du Bocuse d'Or. "Je pense qu'on est fait pour ça ou pas", poursuit Franck Giovannini. "J'ai la chance de le vivre assez bien".
A l'exigence des clients, s'ajoute également la pression des guides. "C'est vrai que ce n'est pas commun d'être noté pour son travail, et je conçois que ça peut être assez désagréable", reconnaît Knut Schwander, responsable du Gault & Millau pour la Suisse romande, que 15 Minutes a rencontré avant un repas test dans un restaurant de Neuchâtel.
Il évoque un rapport un peu ambigu d'amour-haine entre les chefs et les guides: "On a besoin des restaurateurs. Eux pourraient se passer de nous. En revanche, nous leur offrons une caisse de résonance assez extraordinaire".
Un futur un peu différent?
Mais alors que le secteur de l'hôtellerie-restauration peine à trouver de la relève et à conserver son personnel, faut-il s'inquiéter pour l'avenir de la haute gastronomie? "Je ne vois pas un manque de relève chez les grands chefs, car c'est un métier d'absolue passion", estime Knut Schwander.
Selon lui, le changement pourrait se situer au niveau du personnel de ces établissements: "Dans une grande table, il y a aujourd'hui pléthore de collaborateurs. C'est peut-être là que le modèle va évoluer, vers un service un peu plus sobre".
De son côté, Franck Giovannini ne semble pas inquiet: "Il y a encore des jeunes qui sont motivés. On a un métier magnifique et on voit les résultats tous les jours. Je suis assez convaincu qu'il va perdurer, peut-être avec différentes manières de faire". Selon lui, "les gens voudront toujours manger et se faire plaisir".
Katia Bitsch, Guillaume Rey