"Ca me stresse énormément de me dire que je pourrais ne pas avoir le contrôle sur moi-même". Lucie*, 16 ans, fait partie des jeunes qui ne consomment pas d'alcool. "Je n'ai pas envie de boire parce que les autres le font", explique-t-elle.
Mais ce choix implique aussi certaines conséquences: "Il faut accepter que moins de gens nous demandent si on veut faire une soirée". Doit-elle faire avec des pressions pour quand même boire un verre ou une goutte, même dans le cercle familial? "Oui, c'est clair. C'est presque un marqueur de l'entrée dans l'âge adulte. Mais on peut être grand sans boire un verre de blanc", lance-t-elle.
Comme Lucie, celles et ceux qui décident de se passer d'alcool doivent composer avec les remarques et les incompréhensions qui entourent leur choix. Unisanté l'a montré dans une étude publiée en janvier.
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Et pourtant, les jeunes qui ne consomment pas d'alcool seraient entre 9 et 17%, selon une étude quantitative d'Unisanté. Les filles sont plus nombreuses, mais il n'y a pas de profil type.
Manque de modèles
Dans une société où l'alcool est très présent, Lucie relève aussi le manque de modèles connus qui ne boivent pas, hormis dans la sphère sportive: "Dans l'imaginaire collectif, être cool, c'est avoir une bière et une cigarette à la main", regrette-t-elle.
Carolina Gonzalez, plus connue sous le nom de "La Carologie" sur Youtube, évoque, elle, ouvertement son choix: "J'ai décidé de passer beaucoup de soirées sobre depuis que j'ai 17-18 ans". Interrogée dans la vidéo de 15 Minutes (ci-dessus), elle souligne que "se détacher de l'alcool demande pas mal d'efforts", tant il est partout.
Mais comment le fait de ne pas boire est-il perçu? Aux abords de l'école de Lucie, les avis varient. "La plupart des gens veulent boire en soirée, donc je vais me dire que c'est bizarre de voir quelqu'un qui ne boit pas et je vais essayer de comprendre", explique une jeune fille. Plus loin, un étudiant déplore des dérives qu'il observe parfois: "Certaines personnes ont un comportement toxique et vont pousser à la consommation".
Adapter la prévention
Mais alors qu'on parle beaucoup de prévention contre l'alcool excessif, quel message adresser à ces jeunes qui ne boivent pas? Comment les inclure dans les démarches de prévention?
Stéphane Caduff, responsable prévention à la Fondation vaudoise contre l'alcoolisme (FVA), relève tout d'abord que "les gens qui ne consomment pas ont toujours existé, mais il y a peut-être aujourd'hui une façon plus ouverte de l'assumer".
"On valorise au maximum leur choix", précise-t-il. "Il faut s'intéresser à ces jeunes-là, car ils ont aussi des stratégies et pratiques qui pourraient inspirer ceux qui désirent arrêter ou réduire leur consommation".
*prénom d'emprunt
Guillaume Rey, Antoine Harari