A l'orée du bois, le temple qui surplombe Fenin fait partie du patrimoine et de l'histoire de ce petit village du Val-de-Ruz.
"Au-delà des croyances, une cérémonie funéraire dans ce temple a du sens pour celles et ceux qui ont passé toute leur vie dans ce village", explique Léa Candaux Estevez, officiante laïque. Originaire de Fenin, elle est elle-même attachée au lieu: "C'est ici que je me suis mariée, il y a 14 ans lors d'une cérémonie laïque, c'est aussi ici que nous avons dit au revoir à ma maman".
Mais Léa Candaux Estevez comprend aussi la volonté de l’Eglise réformée du canton de Neuchâtel de limiter les cérémonies laïques dans les temples. "Il est nécessaire de poser un cadre, mais je souhaite qu'on puisse parvenir à un dialogue pour pouvoir continuer à travailler".
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Un dialogue, c'est aussi ce que souhaite Esther Berger, pasteure et présidente du Synode. "Il y a une nécessité de clarifier les choses, car avec la multiplicité des officiants et des pratiques, il faut un cadre pour qu'on sache vraiment qui parle au nom de qui".
"C'est important de clarifier sa posture en tant qu'officiante laïque", précise Léa Candaux Estevez, "pour ne pas se faire passer pour quelqu'un qu'on n'est pas, par exemple moi je ne vais pas parler devant une bible".
Débats politiques
Cette annonce de l'EREN n'a pas manqué d'ouvrir les débats politiques. D'abord au sein du Conseil général du Val-de-Ruz. La commune compte onze temples sur son territoire et assume leur entretien et leur mise à disposition, à hauteur d'environ 230'000 francs par an.
Le conseiller communal PLR de Val-de-Ruz Jean-Claude Brechbühler annonce la position de la commune: "Le Conseil communal ne changera pas sa pratique d'ouverture à la laïcité de ses temples tant qu'il n'y aura pas été contraint".
Le canton a lui aussi réagi. Selon un avis de droit, il juge la décision de l'EREN excessive au regard du concordat qui définit les droits et devoirs entre les Eglises reconnues et l'Etat.
"Si on lit le concordat, la responsabilité est celle des communes qui mettent à disposition leur temple", souligne Laurent Kurth, conseiller d'Etat socialiste. Le concordat précise que les Eglises sont consultées pour un autre usage et que ce dernier ne doit pas être contraire au but des Eglises. Pour Laurent Kurth, les mariages ou les enterrements ne peuvent pas être déclarés contraires à l'Église juste parce qu'ils sont laïcs.
Le Synode tempère
Du côté de l'Eglise, on prend acte de cette position des autorités cantonales mais le président du Conseil synodal, Yves Bourquin, pose la question: "qui dans la société est apte à déterminer les buts d'une église ?"
Le Conseil synodal propose toutefois un compromis. "Notre idée est la rédaction d'une charte d'occupation des temples destinée aux officiants laïcs, pour établir un mode de fonctionnement ensemble". Une solution qui, pour Yves Bourquin, pourrait satisfaire tout le monde.
Coraline Pauchard, Katia Bitsch