Le Ministère public de la Confédération a failli dans l'affaire du djihadiste de Morges
Ce rapport très attendu a été publié ce mardi. Pour être plus précis, c'est son résumé, d'une dizaine de pages, qui a été diffusé. Il porte en partie sur l'affaire du djihadiste de Morges, ce Turco-Suisse qui a assassiné un Portugais d'un coup de couteau en septembre 2020 dans un kebab de Morges.
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Le rapport s'intéresse aux deux mois qui ont précédé le drame. Mais pour bien comprendre pourquoi il a été ordonné, il faut remonter au 13 avril 2019. Ce jour-là, le Turco-Suisse tente de faire sauter une station-service dans le canton de Vaud.
Il est arrêté et placé en détention provisoire. Un peu plus d'un an plus tard, en juillet 2020, il est remis en liberté sur décision du Tribunal des mesures de contrainte du canton de Berne, mais cette décision s'accompagne de 16 mesures de substitution. Le prévenu doit notamment se présenter une fois par semaine au poste de police.
"Une réaction s'imposait"
Mais à plusieurs reprises, il manque à ses obligations. Les autorités vaudoises font remonter ces manquements au Ministère public de la Confédération, qui a la main sur le dossier, mais le Parquet fédéral ne prend aucune mesure à l'encontre du djihadiste.
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La suite est connue. Deux mois après avoir été remis en liberté, il commet un assassinat, en septembre 2020. Dans les jours qui suivent, le canton de Vaud rédige un courrier dans lequel il relève des "lacunes systémiques qui affecteraient le domaine d'infractions de terrorisme". Cette lettre est à l'origine de l'investigation de l'Autorité de surveillance du Ministère public de la Confédération.
Dans le résumé de son rapport, cet organe estime que la libération du prévenu, après plus d'un an de détention provisoire, était "soutenable". Mais l'Autorité de surveillance "estime qu'une réaction aux violations des mesures de substitution s'imposait, en laissant toutefois ouverte la question de savoir quelles mesures auraient été appropriées".
A demi-mots, l'organe dit donc que le Parquet fédéral aurait dû tenir compte des manquements relevés par les autorités vaudoises et songer à réincarcérer le prévenu.
Fabiano Citroni - Pôle Enquête
Jacqueline de Quattro: "Il faut une meilleure coordination entre Confédération et cantons"
Pour Jacqueline de Quattro, conseillère nationale PLR, il faut tirer les enseignements nécessaires de ce manque de communication entre les autorités cantonales vaudoises et le Parquet fédéral. "Il faut qu'on apprenne à mieux travailler ensemble au niveau de la Confédération et des cantons", a-t-elle affirmé mardi dans l'émission Forum de la RTS.
Dans le cas de l'affaire de Morges, "on se renvoie la patate chaude plutôt que d'accepter qu'il y a peut-être eu des erreurs de communication et d'appréciation", notamment sur la dangerosité de l'homme inculpé, a estimé la parlementaire vaudoise, soulignant que les cas de terrorisme en Suisse sont encore méconnus.
Les effectifs du Ministère public de la Confédération sont insuffisants, selon Jacqueline de Quattro, "mais c'est surtout la coordination entre les autorités qui est améliorable", a-t-elle insisté.