Pierre-François Gobat: "En environ 15 jours, tous les grands lacs ont été atteints par la grippe aviaire"
Invité de La Matinale jeudi pour évoquer le premier cas de grippe aviaire dans le canton de Neuchâtel, Pierre-François Gobat a annoncé qu'un second oiseau mort à Colombier (NE) s'était également révélé être positif à la maladie. D'autres oiseaux sont par ailleurs encore en cours d'analyse et le spécialiste s'attend "à plusieurs dizaines de cas au cours des prochaines semaines", car les mouettes et les goélands volent beaucoup ces temps, du fait de la période de nidification.
"Les oiseaux transmettent la maladie d'un lac à l'autre. En environ 15 jours, tous les grands lacs du pays ont été atteints par cette maladie", ajoute Pierre-François Gobat.
>>Revoir le reportage du 19h30 sur le premier cas détecté en Suisse romande:
Des mesures efficaces pour la volaille
Pour empêcher la propagation de la maladie à la volaille, la Confédération a décidé au mois de novembre 2022 d'imposer des mesures drastiques pour les exploitations agricoles.
Les détenteurs de volailles, même les amateurs, ne peuvent laisser sortir leurs animaux que dans des zones à l'abri des oiseaux sauvages. Les poules doivent être séparées des oies ou encore des canards. L'accès au poulailler doit être limité au strict nécessaire et un sas d'hygiène installé. Enfin, les marchés et expositions de volaille restent interdits.
Pour le vétérinaire cantonal neuchâtelois, ces mesures, bien que dures pour les éleveurs, ont prouvé leur efficacité. "Jusqu'ici en Suisse, nous n'avons pas eu de cas de grippe aviaire dans la volaille. Les mesures doivent donc continuer à être respectées, surtout que c'est maintenant que le risque est le plus important", explique-t-il.
Impact économique très important en cas de contamination
Si la volaille suisse est pour l'instant épargnée, la maladie a décimé des exploitations en Europe au cours des dernières années. En France, ce sont par exemple des millions d'animaux qui ont parfois dû être éliminés.
Car les conséquences d'un cas de grippe aviaire au sein d'une exploitation sont immédiates, rappelle Pierre-François Gobat. "Si nous avons un cas sur de volaille domestique, on doit prendre des mesures drastiques. Toute la volaille de l'exploitation concernée doit être éliminée et dans les zones aux alentours de cette exploitation dans un rayon de 10 kilomètres. Il n'est plus possible d'exporter des oeufs ou de la viande", précise-t-il.
L'impact économique d'un seul cas peut donc tout de suite s'avérer très important pour une région touchée.
Un virus qui a probablement muté
Si l'expert ne juge pas la situation critique, il estime que le virus de la grippe aviaire s'est sans doute transformé récemment, car la maladie n'a pas disparu de manière saisonnière. "L'année passée, pour la première fois en Europe, la maladie est restée active durant l'été, ce qui n'était jamais arrivé auparavant. Cela montre sans doute que le virus a muté", juge-t-il.
Pour autant, pas de panique à avoir pour le consommateur, même si un cas devait se déclarer dans une exploitation. "Il n'y a pas de transmission par les aliments, que ce soit des oeufs ou de la viande de poulet, par exemple. Il y a de très rares cas de transmission sur l'homme qui ont été décrits, et ils concernent uniquement des personnes qui se sont trouvées en face d'animaux vivants, présents en quantité et dans un espace confiné, comme un grand poulailler", conclut-il.
L'Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV) recommande tout de même d'éviter de toucher les oiseaux sauvages trouvés morts. Il faut les signaler au garde-faune, à la police ou au service vétérinaire.
Propos recueillis par Valérie Hauert
Adaptation web: Tristan Hertig
Mesures prolongées jusqu'à fin avril 2023
Les mesures prises dans toute la Suisse pour endiguer la grippe aviaire sont prolongées au moins jusqu'à fin avril 2023. Les volailles, y compris celles élevées en plein air, ne peuvent pas sortir librement.
L'objectif principal est d'éviter tout contact entre les oiseaux sauvages et les volailles domestiques, indique jeudi dans un communiqué l'Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV).
Concrètement, les personnes détenant des volailles domestiques peuvent soit les confiner, soit les laisser sortir uniquement dans une zone protégée des oiseaux sauvages. Ces mesures s'appliquent aussi bien aux détenteurs de volailles de rente qu'aux personnes en détenant en amateur