La colère gronde contre la Suisse dans les couloirs du Parlement britannique. A Westminster, Jonathan Djanogly fait partie d’un groupe de députés qui demandent à leur gouvernement de mettre la Suisse sous pression.
Dans une lettre au ton sec, ils exigent que la Suisse bloque de manière urgente le renvoi de 14 millions de francs d’avoirs russes liés à une affaire de corruption. "Les autorités suisses sont sur le point de renvoyer les avoirs saisis à trois individus liés au gouvernement russe (...) Cela ne peut pas arriver", peut-on lire dans la missive écrite par le conservateur britannique.
Une affaire qui remonte aux années 2010
Cet argent est issu de fonds russes bloqués en Suisse au début des années 2010 dans le cadre de l’instauration de l’acte Magnitsky, une célèbre loi américaine qui permet de saisir des avoirs illicites au nom des Droits de l’homme.
Mais le Tribunal pénal fédéral (TPF) a récemment décidé que ces fonds pouvaient être renvoyés en Russie. C'est ce qui a provoqué la colère du député conservateur. "Ça paraît insensé que notre soi-disant allié renvoie un butin criminel au Kremlin", lance Jonathan Djanogly.
A contre-courant des sanctions internationales
La décision judiciaire helvétique tombe alors même que de nombreux pays occidentaux multiplient les sanctions contre Moscou. "Si la Suisse n’est pas prête à rejoindre la communauté internationale sur quelque chose qui est accepté dans tellement de pays autour du monde, cela signifie-t-il qu'il y aurait d’autres avoirs russes cachés?", interroge le député britannique. "J’espère vraiment que la Suisse va nous écouter et engager une conversation."
Et cet appel envers Berne est devenu un phénomène international: des demandes similaires ont été déposées au Parlement européen à Strasbourg ainsi qu’à Washington.
La Suisse considérée comme un "pays voyou"?
Pour l'homme d’affaires Bill Browder, qui est à l’origine de la loi Magnitsky aux Etats-Unis, la lettre envoyée par les parlementaires américains peut être lourde de conséquences pour la Suisse.
"C’est la lettre du sénateur Wicker, qu’il a envoyée au Secrétaire d’Etat Anthony Blinken", explique-t-il en brandissant le courrier. "Ça dit en gros que la Suisse serait considérée comme un pays voyou qui ne serait plus traitée comme une égale en matière d’application de la loi."
La décision du Tribunal pénal fédéral a fait l’objet d’un appel. En attendant, les parlementaires étrangers continueront à maintenir la pression.
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Clément Bürge/oang