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Pascale Baeriswyl: "La neutralité suisse n'est pas au centre de l'attention de la communauté internationale"

L'invitée de La Matinale (vidéo) - Pascale Baeriswyl, ambassadrice de la Suisse auprès de l'ONU
L'invitée de La Matinale (vidéo) - Pascale Baeriswyl, ambassadrice de la Suisse auprès de l'ONU / L'invité-e de La Matinale (en vidéo) / 12 min. / le 24 avril 2023
Depuis le début de l'année, la Suisse est devenue membre temporaire du Conseil de sécurité de l'ONU. Invitée de La Matinale lundi, sa représentante à New York Pascale Baeriswyl évoque ce rôle dans un monde où "les conflits et les crises sont en pleine croissance".

Combats au Soudan, guerre en Ukraine, tensions au Proche-Orient... Depuis quelques années, les violences et les crises se succèdent à travers le monde. Mais que peut donc faire le Conseil de sécurité des Nations unies pour empêcher cela?

A cette question, la diplomate bâloise d'origine fribourgeoise le concède d'entrée, le Conseil "ne peut pas faire lui seul la paix", mais il reste toutefois "un acteur extrêmement important" sur la scène mondiale.

Ouverture de passages pour l'aide humanitaire dans le nord-est de la Syrie, missions de la paix au Soudan du Sud et en Colombie, ouverture d'un dialogue au Proche-Orient ou encore messages de désescalade dans le nord-ouest de la République démocratique du Congo: d'après Pascale Baeriswyl, les résultats du Conseil existent, avec des résolutions qui sont fréquemment votées, même si des efforts doivent encore être faits pour prévenir ces situations.

Pour un pays comme le nôtre (...) il est important que ce monde, que ces règles soient maintenus, parce que pour nous, c'est vraiment une question existentielle

Pascale Baeriswyl, cheffe de la mission suisse auprès de l'ONU

"Avec le Conseil, il y a donc des aspects totalement positifs, mais je dirais que sur les grandes questions mondiales, on remarque quand même que les crises et les conflits sont en croissance", déplore-t-elle.

Quel rôle pour la Suisse?

Pour celle qui a commencé sa carrière au Département fédéral des affaires étrangères sous Joseph Deiss, la Suisse est par ailleurs à sa place au sein l'institution onusienne. Une place qui permettrait au pays de défendre des principes forts qui servent ses intérêts.

"Au Conseil de sécurité, la Suisse essaie de défendre le droit international humanitaire et l'Etat de droit. Pour un pays de taille moyenne comme le nôtre, avec une économie tournée vers l'exportation, il est important que ce monde, que ces règles soient maintenus, parce que pour nous, c'est vraiment une question existentielle", explique-t-elle.

>> Revoir le reportage du 19h30 sur l'entrée de la Suisse au Conseil de sécurité :

La Suisse est l'un des 5 nouveaux membres non permanents du Conseil du sécurité de l'ONU
La Suisse est l'un des 5 nouveaux membres non permanents du Conseil du sécurité de l'ONU / 19h30 / 1 min. / le 3 janvier 2023

Une neutralité comprise

Lors des séances du Conseil, l'ambassadrice de Suisse à New York doit par ailleurs gérer la présence d'un voisin qu'on pourrait penser encombrant, le représentant de la Fédération de Russie.

Questionnée à ce sujet, Pascale Baeriswyl explique continuer à avoir une relation empreinte de respect, indispensable en diplomatie. "Je crois qu'il faut faire la différence entre les personnes et les positions nationales. En ce qui concerne la relation avec les personnes, il est important de vraiment maintenir le dialogue, d'avoir une relation respectueuse, ce que j'essaie de faire. Je ne dirais pas qu'on a une relation chaleureuse, mais respectueuse, oui", détaille-t-elle.

En Europe, on est beaucoup plus proches du conflit ukrainien qu'à New York. Ici, nous gérons tous les conflits du monde

Pascale Baeriswyl, cheffe de la mission suisse auprès de l'ONU

Quant à la position sur la neutralité, qui fait tant débat en Suisse et en Europe, elle n'est, selon la diplomate, pas souvent à l'ordre du jour des sessions à New York.

"La neutralité n'est pas quelque chose dont on discute au quotidien au Conseil, car elle est déjà tellement intégrée dans nos positions de droit international public, qui sont connues et respectées. Pour les Russes également, ce n'est rien de nouveau, car on a toujours condamné les violations du droit international humanitaire", juge-t-elle.

Mais alors, pourquoi l'Europe semble moins compréhensive sur ce point, notamment sur le refus de la réexportation de matériel militaire? Pour l'ambassadrice, la cause est sans doute avant tout géographique. "En Europe, on est beaucoup plus proches du conflit ukrainien qu'à New York. Ici, nous gérons tous les conflits du monde", ajoute-t-elle.

Si Pascale Baeriswyl concède que l'agression russe est "la violation la plus massive de la charte de l'ONU", elle répète que la neutralité suisse n'est pas au centre de l'attention de la communauté internationale sur ce dossier, les pays cherchant avant tout à savoir comment gérer ces tensions géopolitiques.

Propos recueillis par David Berger

Adaptation web: Tristan Hertig

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