Le conseiller fédéral Ignazio Cassis a exprimé mardi matin son "grand soulagement" après le retour en Suisse de l'ensemble du personnel de l'ambassade helvétique à Khartoum, ainsi que des personnes accompagnantes, qui se trouve désormais en sécurité, a indiqué le chef de la diplomatie suisse lors d'une conférence de presse à l'aéroport de Berne-Belp.
L'avion transportant six membres du personnel et trois accompagnants a atterri à 6h05 à Berne. "Tout le monde va bien", s'est réjoui le Tessinois.
Le personnel diplomatique de l'ambassade suisse et les familles, soit dix personnes, avaient été évacués dimanche vers Djibouti grâce à l'aide de la France. Deux autres personnes avaient été évacuées vers l'Ethiopie par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR).
>> Relire : La Suisse ferme son ambassade au Soudan et évacue son personnel
Pour François Pointet, conseiller national Vert'libéraux et vice président de la commission de politique sécurité, si l'on collabore on a pas besoin d'avions de transports militaires, mais il faut alors avoir quelque chose à offrir en retour. "Pour assurer la sécurité de notre population on a deux possibilités. Soit on achète des avions, soit on collabore avec nos voisins européens ou tout autre pays prêt à collaborer avec nous", a-t-il expliqué mardi dans le 19h30.
Encore des Suisses à évacuer
Ignazio Cassis a eu une pensée pour le personnel local de l'ambassade. Une quarantaine de personnes sont restées sur place, mais elles n'encourent pas de danger particulier lié au fait qu'elles ont travaillé pour la Confédération, contrairement à ce qui s'était passé en 2021 en Afghanistan lors de la prise du pouvoir par les talibans.
Le conseiller fédéral a remercié les Etats qui se sont mis à disposition pour permettre cette évacuation, France en tête, mais aussi l'Italie, la Suède et les Pays-Bas. La Suisse ne dispose pas de capacités de transport, ni de capacités d'assurer la sécurité lors de telles opérations. Cette coopération est "extrêmement importante", a-t-il souligné.
Le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) poursuit ses contacts pour tenter d'évacuer la trentaine de Suisses qui ont exprimé leur volonté de quitter le Soudan.
La situation est compliquée par le fait qu'il s'agit souvent de doubles nationaux et que les Soudanais ont besoin d'une autorisation pour sortir du pays, a expliqué l'ambassadeur Christian Winter. C'est très difficile à obtenir alors que l'administration ne peut plus fonctionner normalement en raison des combats.
Une dégradation rapide
La Confédération a fermé dimanche son ambassade "pour des raisons de sécurité". La représentation helvétique, comme d'autres ambassades, se trouve dans la zone des combats. La résidence de l'ambassadeur a essuyé des tirs mais n'a pas subi de pillages, a relevé Christian Winter, qui se trouvait dans le bâtiment au moment des tirs.
Le diplomate a décrit la dégradation rapide de la situation de ces derniers jours dans le pays. Même s'il y avait des tensions entre l'armée et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), "personne ne s'y attendait", d'autant plus que c'était le ramadan, le mois du pardon.
>> Lire sur la situation au Soudan : Washington annonce un cessez-le-feu de 72 heures au Soudan
L'ambassadeur suisse au Soudan se trouvait avec son épouse à l'extérieur de Khartoum lorsque les premiers tirs ont été entendus le samedi 15 avril. Le couple s'est hâté de rentrer à la résidence. Les combats ont rapidement pris de l'ampleur, avec des tirs d'artillerie, des frappes aériennes, puis l'utilisation de drones.
>> Ecouter les réactions
dans le 12h30
de Christian Winter et d'Ignazio Cassis à la sortie de l'avion à Belp:
Evacuation par bus
Les tirs visent principalement des cibles stratégiques, mais les habitations ne sont pas épargnées, faisant de nombreuses victimes civiles, a-t-il déploré. Dans ce contexte, le personnel diplomatique n'a plus pu se rendre à l'ambassade depuis le début des combats.
Pour quitter Khartoum, les Suisses ont dû se rendre à l'ambassade de France. Ils sont montés dans un bus en direction d'une base militaire située à 40 kilomètres au nord de Khartoum, a encore expliqué Christian Winter. Le convoi était d'abord escorté de miliciens des FSR, puis par des chars de l'armée.
De nombreux contrôles ont émaillé le voyage. Au total, il a fallu plus de 17 heures avant d'arriver en Suisse, via Djibouti et l'Egypte, a raconté l'ambassadeur helvétique.
Ignazio Cassis a une nouvelle fois appelé à un cessez-le-feu. Berne continuera à s'engager à cette fin, a-t-il dit. L'aide suisse au Soudan atteint 10 millions de francs par année, en grande partie pour des projets d'aide humanitaire.
>> Lire également : Les évacuations d'étrangers se poursuivent au Soudan, où aucune issue n'est en vue
iar avec ats
Quitter ou non le Soudan, la difficile décision des ONG humanitaires
Au Soudan, certaines organisations humanitaires ont dû quitter le pays, alors que d'autres maintiennent leur présence et tentent de continuer à fournir de l'aide malgré les conditions difficiles.
C'est le cas notamment de l'ONG Care International. "Il est compliqué de rester en contact avec nos équipes sur le terrain et de connaître leur situation. Nous savons en tout cas qu'il y a une pénurie de nourriture et d'eau, et de longues coupures d'électricité. La situation humanitaire s'est encore aggravée, nous entendons parler d'un effondrement du système de santé", relate Deepmala Mahla, vice-présidente des affaires humanitaires à Care International, mardi dans le 12h30 de la RTS.
Le départ d'une ONG d'un pays en conflit intervient selon la responsable "lorsqu'il est absolument impossible de fournir une aide à ceux qui en ont besoin de manière impartiale et indépendante" et que la sécurité et la survie des équipes humanitaires ne sont pas assurées.
Ce moment est "probablement la décision la plus triste et difficile qu'une organisation humanitaire doive prendre", estime Deepmala Mahla.