La divulgation vendredi dernier de l'horaire 2025 des CFF suscite la grogne dans seize communes. Pour cause de travaux, il réduit fortement la desserte directe entre les villes du pied du Jura et Genève.
Au départ de Bienne, de Neuchâtel ou d'Yverdon, il faudra, sauf aux heures de pointe, descendre à Renens et changer de train pour atteindre la gare de Genève ou encore son aéroport. Mardi dans le 19h30 de la RTS, Ignace Jeannerat, porte-parole de Genève Aéroport, a expliqué que plusieurs familles ou personnes âgées lui ont déjà confié qu'elles risquaient de renoncer au train au profit de la voiture pour effectuer ce trajet.
Une région oubliée mais importante
C'est un bassin de 300'000 habitants qui est péjoré, affirme Théo Huguenin-Elie, conseiller communal de La Chaux-de-Fonds. "ll ne s’agit pas de prendre en considération des intérêts particuliers, mais bien ceux de toute cette région de la Suisse".
Selon le président de la Conférence des transports de Suisse occidentale Jean-François Steiert, la Suisse romande souffre de son matériel ancien. "Nous avons des rails qui sont plus vieux que la moyenne suisse, nous avons 40% de plus de retards que la moyenne suisse, nous avons donc une situation qui n’est pas bonne".
Une pression politique sur les CFF
Les ministres romands des transports ont rencontré lundi soir à Berne le conseiller fédéral Albert Rösti pour relayer plusieurs demandes. Parmi leurs revendications, ils ont exigé que "chaque amélioration soit répercutée immédiatement sur l'offre", a indiqué au 19h30 de la RTS le conseiller d'Etat genevois Serge Dal Busco. Selon lui, "l'écoute était très attentive".
Mardi après-midi, les CFF ont déclaré sur Twitter avoir pris connaissance de la réaction de plusieurs villes de Suisse romande. Ils s'engagent également à "rencontrer les communes et Genève Aéroport dans un souci de dialogue constructif".
Entre Bussigny et Genève, les CFF doivent résoudre trois points difficiles en termes d'infrastructure, reconnaît David Fattebert, directeur régional des CFF Suisse romande. "Ces points durs se résoudront au fur et à mesure des travaux qui arriveront ces prochaines années, mais au-delà de 2025."
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Sujet TV: Olivier Kurth
Adaptation web: Miroslav Mares/vic
Députés du Grand Conseil vaudois fâchés
Les parlementaires vaudois ont exprimé mardi leur désapprobation et leur inquiétude face à la refonte de l'horaire 2025 des CFF pour la Suisse occidentale et la hausse des tarifs des transports publics. Deux résolutions, non contraignantes pour le gouvernement, ont été votées dans la foulée.
La première invite le Conseil d'Etat à soutenir la liaison directe entre Genève et l'Arc jurassien via Yverdon, supprimée pour dix ans, et demande aux CFF de revoir leur copie du nouvel horaire 2025. Son auteur, le PLR Jean-Daniel Carrard, a jugé "inacceptable" que cette ligne soit "sacrifiée". Cette refonte d'horaire "a un goût amer pour la Suisse romande", a-t-il dit.
Le syndic d'Yverdon inquiet
Les cadences entre l'Arc jurassien et Lausanne seront doublées, mais les voyageurs se rendant à Genève ou Genève-Aéroport depuis le pied du Jura (ou dans le sens inverse) devront souvent passer par Renens (VD) ou Lausanne pour changer de train.
"Cette perte d'accessibilité est un coup très dur pour Yverdon et nous craignons des conséquences délétères", a surenchéri Pierre Dessemontet, syndic socialiste de la cité thermale. Plusieurs députés ont aussi rappelé que ce nouvel horaire 2025 était le miroir de l'important retard pris dans le renouvellement et la mise à niveau des infrastructures ferroviaires en Suisse romande.
Une ligne déjà saucissonnée une première fois en 2015
La suppression de la desserte directe entre Genève et le pied du Jura est un épisode de plus dans la saga d'une ligne qui, en 2015, a déjà perdu une partie de sa longueur. Elle reliait historiquement Genève à Bâle via Yverdon, Neuchâtel, Bienne et Delémont.
>> Lire à ce sujet : La ligne directe Genève-Delémont-Bâle sera supprimée dès fin 2015
En 2015, les CFF et l'Office fédéral des transports avaient pourtant signé un accord visant à rétablir la liaison directe entre Bâle et l'Arc lémanique via Delémont au plus tard en 2021. En 2023, la connexion n'est toujours pas rétablie.
>> Relire : La liaison directe entre Bâle et l'Arc lémanique sera rétablie en 2021
Moins direct et moins vite
Dès 2025, ce sera au tour de la liaison directe Genève-Yvedon de disparaître en partie. Pour éviter Renens et Lausanne, les trains circulent aujourd'hui via un court tronçon de voie d'environ 1 km entre Echandens et Bussigny.
La diminution de la vitesse annoncée en Suisse romande pour l'horaire 2025, elle, s'inscrit dans une série de baisses de la vitesse déjà enregistrée sur la ligne Genève-Lausanne-Sion. Avant même les changements annoncés pour 2025, le temps de parcours a déjà augmenté de plusieurs minutes au cours des 20 dernières années.
>> Plus de détails : Un pendulaire Genève-Lausanne passe 30 heures par an de plus dans le train qu'il y a vingt ans
L'ATE Jura demande une réduction de l'offre
La section jurassienne de l'Association transports et environnement (ATE) ne demande ni plus ni moins que de revenir aux conditions qui prévalaient il y a dix ans.
L’ATE Jura estime en effet qu'il est nécessaire de réduire, dès à présent, le nombre de trains en circulation sur le réseau romand. L'objectif est de garantir la stabilité de l'exploitation ferroviaire. "Il faut penser à l'état de l'infrastructure avant de proposer une cadence horaire élevée, estime Valère Lovis est coprésident de l'ATE Jura, mercredi dans le 12h30 de la RTS. Certes, il y aurait une réduction du nombre de trains, mais cela permettrait de réintroduire les liaisons sans changement entre Delémont et Genève Aéroport."
Contacté par la RTS, le délégué jurassien aux transports David Asséo estime qu'il s'agit d'une fausse bonne idée. Il rappelle qu'il y a dix ans, il y avait à Delémont deux trains par heure en direction du bassin lémanique, mais à 3 minutes d'intervalle, l'un venait de Bâle, l'autre de Zurich, posant de réels problèmes aux usagers.
Pour lui, il est illusoire de revenir à cette situation: cela reviendrait à perdre une bonne partie de la clientèle. Les fréquences toutes les trente minutes sont aujourd'hui des acquis.
Les bouleversements annoncés pour 2025 sont quelque chose qui n'était pas prévu, regrette-t-il. Mais ils ne remettent pas en cause, selon lui, ce qui est dans les tuyaux depuis dix ans. Dès l'horaire 2026, les Jurassiens auront une relation directe entre Bâle et Lausanne et une seconde avec correspondance à Bienne.