Le 18 juin prochain, les Suissesses et les Suisses sont appelés à se prononcer sur l'introduction d'un taux d'imposition d'au moins 15% sur les bénéfices des grandes entreprises actives à l'échelle internationale. A quelques semaines du vote, cette réforme, décidée sous l'impulsion des pays membres du G20 et de l'OCDE, est plébiscitée par 84% de la population, montre le sondage réalisé par l'institut gfs.bern pour le compte de la SSR.
Le deuxième objet soumis au peuple est la nouvelle loi sur le climat et l'innovation, qui vise à accélérer la transition vers les énergies renouvelables. Septante-deux pour cent des personnes sondées se déclarent pour l'heure favorables à cette législation qui prévoit que la Suisse atteigne la neutralité climatique d'ici 2050. L'opposition à ce projet totalise un quart des intentions de vote.
Enfin, selon le sondage, la loi Covid-19 devrait être acceptée une troisième fois. Aujourd'hui, la tension est beaucoup moins forte que lors des deux premiers référendums en juin et novembre 2021, la pandémie n'ayant désormais presque plus aucune influence sur le quotidien des Suissesses et des Suisses. Plus de deux tiers de la population appuie la prolongation de la loi et 28% la rejettent.
Sur le climat, c'est tous les partis contre l'UDC
Presque tous les partis politiques - de la gauche au PLR en passant par les formations centristes - soutiennent la nouvelle loi sur le climat et l'innovation, adoptée par le Parlement en septembre dernier en tant que contre-projet à l'initiative pour les glaciers. Pour eux, cette loi permettra à la Suisse de se libérer des énergies fossiles et d'assurer une plus grande indépendance énergétique. Seule l'UDC fait exception. Pour le parti de droite conservatrice, il s'agit d'un "gouffre à électricité" nuisible à l'économie et à la population.
Les consignes de vote semblent porter leurs fruits dans les intentions de vote, selon l'enquête de gfs.bern. Le oui rassemble 70% de l'électorat du PLR et 84% des électeurs traditionnels du Centre. Il culmine à 97% parmi les sympathisants des Verts. Plus de six indépendants sur dix sont aussi acquis au projet. Les proches de l'UDC sont les seuls à rejeter la nouvelle loi. Soixante-trois pour cent d'entre eux envisagent de voter non. Ils sont tout de même un tiers à défendre la position opposée.
Les Latins davantage convaincus par la nouvelle loi
Signe de la force de la droite conservatrice en Suisse allemande, c'est dans cette région linguistique que le rejet de la loi sur le climat est le plus élevé. Le non reste toutefois largement minoritaire, puisqu'il ne fédère qu'un peu plus d'un quart des votants alémaniques, contre 70% pour les intentions de vote positives. Les électeurs de Suisse romande (78% de oui contre 17% de non) et de Suisse italienne (82% de oui contre 15% de non) se posent en champions de la défense du climat.
Le climat, une cause qui rassemble la population
Au niveau des générations, les personnes âgées de 40 à 64 ans sont celles qui expriment le plus de doute (29% de non pour 68% de oui). Les hommes sont aussi un peu plus sceptiques que les femmes, même si deux tiers d'entre eux soutiennent la loi contre 30% qui s'y opposent. Côté féminin, le oui grimpe à près de 80%. Notons aussi que les personnes les mieux formées sont davantage convaincues que celles qui possèdent un niveau de formation bas ou moyen.
Age, genre, niveau de formation ou encore revenu: la cause climatique rassemble donc toutes les strates de la population, montre le sondage. Quelle que soit la catégorie envisagée, une majorité des personnes sondées se déclarent favorables à la loi sur le climat. Même si la campagne ne fait que commencer, le oui est solidement installé dans l'opinion et, dès lors, un rejet surprise du texte, comme ce fut le cas avec la loi sur le CO2 il y a deux ans, semble peu probable.
L'imposition minimale convainc de gauche à droite...
Taxer plus fortement les grandes entreprises actives à l'échelle internationale: voici une idée qui semble séduire par-delà les clivages partisans. Les électeurs et électrices de tous les partis sont emballés par le projet. Il faut dire que cette réforme, imposée par l'étranger, est inévitable sur le fond. Si la population suisse la refusait, les autres pays pourraient en effet prélever pour leur propre compte la différence entre le taux minimal de 15% et l'impôt sur les bénéfices effectivement payé en Suisse.
Les moins enthousiastes sont proches de l'UDC, avec 20% de rejet. Ceux-ci sont néanmoins plus de trois quarts à approuver le projet. Les sympathisants socialistes sont eux très largement favorables au texte, bien que leur parti prône officiellement son rejet. Sur le principe, le PS est évidemment favorable à l'augmentation des impôts pour les multinationales, mais il s'oppose surtout à la clé de répartition des recettes supplémentaires qui, selon lui, ne profitera pas à l'ensemble de la population.
...et de Genève à Saint-Gall en passant par Lugano
Toutes les régions linguistiques sont à la même enseigne et soutiennent très largement la mise en oeuvre du projet de l'OCDE et du G20 sur l'imposition des grands groupes d'entreprises. En Suisse romande et en Suisse italienne, l'opposition au texte est quasi insignifiante (< 10% de non). En Suisse alémanique, le rejet est légèrement plus important mais reste extrêmement faible.
Pour l'heure, ce sont les jeunes ainsi que les personnes ayant un niveau de formation élémentaire qui sont les moins convaincues. Cependant, même dans ces catégories, l'approbation du projet atteint presque 80%. Il est toutefois fort probable que le non grappille quelques points au cours de la campagne, une grande partie des personnes interrogées n'étant pas encore certaines de leur choix, note gfs.bern.
Large soutien pour la loi Covid, sauf à l'UDC
Comme lors des deux précédents référendums, un large front politique s'est constitué en faveur de la loi Covid-19. Les sympathisants des Verts, du PS, des Vert'libéraux, du Centre et du PLR se déclarent ainsi nettement favorables à la prolongation de cette législation qui permet notamment de réinstituer rapidement des mesures sanitaires en cas de nécessité ainsi que de continuer à promouvoir le développement des médicaments contre le coronavirus.
L'UDC est le seul grand parti à avoir pris fait et cause pour le référendum, lancé par plusieurs mouvements opposés aux mesures sanitaires comme Mass-Voll et les Amis de la Constitution. Pour eux, il faut mettre un terme à la loi Covid-19 car elle est inutile et bafoue les droits fondamentaux. Ces arguments convainquent une majorité des proches de l'UDC (60%) et une importante minorité de l'électorat indépendant (40%). Le oui au texte est néanmoins majoritaire chez les sans-partis (54% de oui).
Plus on est vieux et bien formé, plus on dit oui
Une nouvelle fois, les trois régions linguistiques devraient appuyer la loi Covid-19. C'est en Suisse alémanique que l'opposition au texte est la plus marquée. En Suisse romande, bien que le rejet du texte soit plus faible que de l'autre côté de la Sarine, le oui est un peu moins franc, traduisant une hésitation légèrement plus importante au sein de l'électorat francophone.
Si l'on en croit le sondage de gfs.bern, les femmes sont un peu plus favorables au texte que les hommes. En règle générale, l'approbation de la loi Covid-19 augmente avec l'âge et avec le niveau de formation des personnes sondées. Malgré cela, même dans les catégories où les arguments des opposants portent le plus, le oui reste très largement majoritaire.
Didier Kottelat
Méthode
Première session de l’enquête Trend SRG-SSR sur les votations du 18 juin 2023, réalisée par l’Institut de recherche gfs.bern entre le 25 avril et le 7 mai 2023 auprès de 11'536 titulaires du droit de vote. La plage d’erreur statistique est donc de +/- 2,8 points de pourcentage.