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Dix-huit mois de prison ferme requis à l'encontre de Tariq Ramadan, jugé pour viol

Au deuxième jour du procès pour viol de Tariq Ramadan, la plaignante revient sur la nuit des faits
Au deuxième jour du procès pour viol de Tariq Ramadan, la plaignante revient sur la nuit des faits / 19h30 / 2 min. / le 16 mai 2023
Le premier procureur Adrian Holloway a requis mardi trois ans de prison, dont 18 mois ferme, à l'encontre de l'islamologue Tariq Ramadan, accusé d'avoir violé une femme en octobre 2008 dans une chambre d'hôtel à Genève. Le théologien conteste les faits.

Le procureur a jugé crédible la version de la plaignante. Selon lui, Tariq Ramadan a commis une lourde faute. Il a profité de son aura pour abuser de sa victime et l'a traitée comme un objet.

La deuxième journée du procès de l'intellectuel genevois a notamment été l'occasion pour le Tribunal correctionnel d'entendre comme témoin le polémiste français Dieudonné et d'auditionner la plaignante, une femme de 57 ans.

"Peur de mourir" sous les coups

Désormais connue dans la presse sous le nom de "Brigitte" - pseudonyme qu'elle a choisi elle-même - la plaignante a raconté sa version de cette nuit du 28 octobre 2008 dans un hôtel de Genève. Elle avait une quarantaine d'années à l'époque des faits, et elle a porté plainte en 2018.

Dans la salle d'audience du tribunal, séparée de Tariq Ramadan par un paravent, elle a expliqué avoir eu "peur de mourir suite aux coups reçus à la tête, à plusieurs moments" ainsi que d'"étouffement" lorsque l'islamologue lui a imposé des actes sexuels brutaux accompagnés de coups et d'insultes.

"J'ai cru un moment qu'il était fou"

Selon son récit, elle a fait la connaissance de Tariq Ramadan lors d'une séance de dédicaces, quelques mois avant les faits, puis l'avoir revu lors d'une conférence. S'en était suivie une correspondance de plus en plus intime sur des réseaux sociaux. "Cela me comblait d'échanger avec lui par écrit", explique-t-elle.

Le soir des faits, elle l'a aidé à monter un fer et une planche à repasser dans sa chambre. Une fois à l'intérieur, "j'ai vu son visage changer". Il l'aurait alors poussée sur le lit puis immobilisée, frappée au visage et violée alors qu'elle avait ses règles.

Elle affirme avoir d'abord résisté physiquement, puis avoir voulu négocier avec Tariq Ramadan.

Le sang sur les draps, l'islamologue ne lui en fera la remarque que le lendemain, lui disant "sans violence" qu'il allait "avoir l'air de quoi maintenant". "Cette réaction tardive m'a fait dire à un moment qu'il était fou", souligne-t-elle.

De ce procès, elle attend d'être "reconnue victime de Tariq Ramadan" afin de pouvoir "tirer un trait" sur cette affaire "qui lui a fait perdre des amis".

>> Les précisions de Fabiano Citroni dans le 19h30 :

Procès de Tariq Ramadan: l'éclairage de Fabiano Citroni
Procès de Tariq Ramadan: l'éclairage de Fabiano Citroni / 19h30 / 1 min. / le 16 mai 2023

Dieudonné à la barre

De son côté, la défense a convoqué un témoin inattendu et qui n'est pas passé inaperçu: le polémiste controversé Dieudonné.

Celui-ci a toutefois tenu à clarifier les choses avant l'audience. "Je ne suis vraiment pas là pour faire un spectacle. Aujourd'hui, je suis là pour apporter un témoignage, dire ce que j'ai entendu et dire la vérité", a-t-il déclaré aux journalistes devant le tribunal.

Il y a quinze jours, le Ministère public a en effet reçu une lettre anonyme évoquant une discussion où la plaignante et le polémiste étaient présents tous les deux et dans laquelle "Brigitte" aurait évoqué une "aventure" avec Tariq Ramadan.

Pour la défense, ce témoignage est supposé démontrer que si Brigitte se vante d'avoir couché avec Tariq Ramadan, alors celui-ci ne l'a pas violée.

"Elle ne s'est pas vantée"

Les faits concernent une conversation qui a eu lieu à l'issue d'un de ses spectacles en Suisse. Une discussion s'était engagée sur l'Afrique entre "Brigitte", le polémiste, son producteur suisse et des techniciens. Le nom de Tariq Ramadan a surgi "car c'est une personne importante" pour le continent, a souligné Dieudonné.

C'est comme ça que nous avons appris, "à la stupéfaction générale", que la plaignante connaissait l'islamologue, a raconté Dieudonné. Poussée par un technicien, la femme évoque alors un "coup d'un soir", a-t-il poursuivi. "Il n'a jamais été question de violence", a-t-il encore affirmé.

"Brigitte" ne s'est pas attardée sur la question, peut-être par pudeur, a avancé Dieudonné. Selon ce dernier, elle a parlé de sa relation avec Tariq Ramadan "de manière un peu gênée". Elle ne s'en est en tout cas pas vantée.

"Je crois en l'innocence" de Tariq Ramadan, a asséné Dieudonné.

Version différente de la plaignante

Selon Dieudonné, "Brigitte", qui est agent d'artistes, venait régulièrement à ses spectacles en Suisse. "Nous avions des discussions sympathiques et elle est devenue proche de l'équipe", sans qu'il n'y ait de relations en dehors du travail.

La plaignante, qui s'est exprimée avant Dieudonné, a quant à elle affirmé qu'elle n'était pas l'amie du polémiste, même s'il y avait "de la camaraderie". Elle confirme l'avoir rencontré dans le cadre professionnel.

Elle assure n'avoir pas parlé de "coup d'un soir", mais simplement avoir répondu par l'affirmative quand on lui a demandé "si c'était vrai" pour Tariq Ramadan.

L'intellectuel suisse, ex-figure charismatique mais contestée de l'islam européen, risque entre deux et dix ans de prison. Le procès doit s'achever mercredi et le jugement est attendu le 24 mai.

>> Le sujet du 19h30 sur le premier jour du procès de Tariq Ramadan :

Durant le premier jour de son procès, Tariq Ramadan affirme qu'il n'est pas un violeur
Durant le premier jour de son procès, Tariq Ramadan affirme qu'il n'est pas un violeur / 19h30 / 2 min. / le 15 mai 2023

>> Lire aussi : Tariq Ramadan, jugé pour viol, a évoqué des "échanges de caresses" devant les enquêteurs

boi/jop avec agences

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