"Une fois, deux fois, adjugé!" Marteau à la main, le commissaire-priseur Marc Dogny a animé ce mardi la vente d'été de la maison DognyAuction. Face à lui, des chaises pour la plupart vides. Une dizaine de personnes ont fait le déplacement. Danielle Cadelli, co-responsable de la société, confirme la tendance: "Presque tous les acheteurs sont en ligne sur des plateformes ou au téléphone".
Elle-même fait partie ce jour-là de l'équipe qui relaie en salle les offres formulées à distance. La dynamique est différente. Le rôle du commissaire-priseur a évolué: "On n'est plus l'acteur qu'on était avant, mais on s'adapte", explique Marc Dogny. "Sur certaines plateformes, même la voix ne passe pas".
Il observe que "le Covid a vidé les salles et c'est très difficile de faire revenir les gens". Les maisons ont suivi cette évolution et proposent des photos et rapports détaillés sur les objets en vente: "Les acheteurs se sont rendus compte que ça marche aussi. Est-ce qu'il y a donc un intérêt pour eux de revenir en salle?", s'interroge Marc Dogny.
Toucher l'objet
Mais cette tendance n'empêche pas certains puristes de venir voir les lots. Quelques jours avant la vente, ils sont exposés. Alain a fait le déplacement: "J'ai besoin de toucher les objets, de les regarder par transparence", explique ce collectionneur passionné.
En salle de vente, Danielle, une acheteuse, a elle gagné l'enchère pour une jardinière qui l'intéressait. Prix d'achat, 1800 francs: "Je suis contente, c'est un objet assez rare". Cette habituée aime être présente pour les ventes à la criée: "Cela fait des années que je viens. Il y a une certaine ambiance. Je me fais plaisir en fait".
"Il y a même un client qui a fait le déplacement depuis la Suède pour cette vente", relève Marc Dogny. "Une espèce en voie de disparition", sourit-il. Le commissaire-priseur semble philosophe concernant cette tendance aux achats en ligne: "Ce sont des nouvelles habitudes et il faut travailler avec. La digitalisation permet d'atteindre des gens qui sont beaucoup plus loin, mais aussi de mieux répondre aux nouvelles générations".
Vente réussie
Pour cette vente, 240 lots étaient proposés: des tableaux, des vases, des violons ou encore des bouteilles de vin, à des prix très variables. Et ils se sont bien vendus, à entendre le commissaire-priseur. Le tableau le plus cher est parti pour 200'000 francs.
La digitalisation "permet de rayonner un peu plus largement", relève Anastasia Hirt, collaboratrice de la maison. Elle évoque l'exemple d'un client australien venu aux renseignements concernant un tableau d'un artiste suisse.
"Maintenant, on ne peut plus faire sans les plateformes", relève cette spécialiste des arts décoratifs du XXème siècle. A ses yeux, "un art qui s'exporte est un art qui vit aussi".
Katia Bitsch, Guillaume Rey