Le Conseil fédéral demandait à l'origine 132,9 millions de francs pour créer 3000 places supplémentaires dans des conteneurs en prévision d'un fort afflux de réfugiés cet automne.
Comme le premier accueil est du ressort de la Confédération, il avait déjà prévu plusieurs emplacements sur des terrains de l'armée, notamment Bière (VD), Tourtemagne (VS) et Bure (JU).
La proposition de la conférence de conciliation rejetée
Au final, la Chambre des cantons a totalement rejeté le crédit sollicité, même divisé par deux, comme sa commission l'avait proposé. Le National a tenté en vain de la faire plier. Mais la proposition de la conférence de conciliation de débloquer 66,45 millions pour les conteneurs n'a, une fois de plus, pas passé la rampe jeudi, par 23 voix contre 19, au grand dam de la gauche, d'une partie du Centre et de quelques sénateurs PLR.
La ministre des finances Karin Keller-Sutter a répété qu'il fallait permettre à la Confédération de "remplir son devoir". Le Conseil fédéral était prêt à se contenter de la moitié de la somme demandée.
Les capacités des abris PC mises en doute
Tout au long du débat, les sénateurs de droite ont fait feu de tout bois pour enterrer ce crédit: ils ont critiqué les informations peu précises fournies par le Secrétariat d'Etat aux migrations, relativisés l'urgence présumée de la situation et épinglé la nouvelle cheffe du Département fédéral de justice et police Elisabeth Baume-Schneider.
Mais l'argument massue qui a fait douter bon nombre d'élus a porté sur les capacités des abris de protection civile. Benedikt Würth (Centre/SG) n'a cessé de rappeler que ces infrastructures publiques payées à coup de millions pouvaient parfaitement faire l'affaire.
Cet argument ne convainc pas Isabelle Moret, conseillère d’Etat vaudoise en charge de la politique migratoire. "Dans le canton de Vaud, nous avons décidé de ne pas mettre des familles avec enfants dans les abris de protection civile parce que ça n'est pas adapté à des enfants", explique-t-elle dans l'émission Forum.
En plus d'être sous terre, ces structures se trouve parfois sous des écoles et ne peuvent être utilisé que la nuit. "Ce n'est pas un accueil digne pour des familles dans notre pays", poursuit Isabelle Moret.
Des abris de réserve
Les cantons ont pourtant rappelé à maintes reprises qu'ils avaient besoin de ces abris PC comme réserve pour héberger les requérants d'asile à leur charge, une fois répartis par la Confédération. Eva Herzog (PS/BS) a rappelé que ces installations servaient aussi à abriter la population en cas de guerre. Olivier Français (PLR/VD) a lui parlé de l'hébergement des sans-abris pendant l'hiver.
Et l'Etat-major spécial Asile a mis en garde sur les conséquences d'un rejet du crédit pour ces conteneurs. Cela accentuera la pression sur les cantons, les villes et les communes et cela empêchera la Confédération de boucler aussi rapidement que possible les procédures d'asile.
"Ce n'est pas le moment de ralentir la procédure fédérale juste au moment où nous sommes engorgés" regrette Isabelle Moret.
Ce crédit pour les conteneurs faisait partie de plusieurs suppléments au budget 2023. Les Chambres avaient accepté à quelques exceptions l'ensemble des autres montants demandés par le Conseil fédéral. Ceux-ci ne sont pas menacés.
>> Lire aussi : Le Conseil fédéral demande 132 millions pour l'accueil des requérants d'asile
miro avec ats
Autres suppléments au budget 2023
Une enveloppe de 140 millions de francs est prévue pour les centres fédéraux d'asile et une autre de 26,2 millions afin de créer 180 postes supplémentaires de durée déterminée au Secrétariat d'Etat aux migrations. Ces fonds sont destinés à faire face à la hausse du nombre de demandeurs d'asile.
Un montant de 113 millions est dévolu au plan d'action humanitaire en faveur de l'Ukraine et de la Moldavie. Le transport régional de voyageurs peut aussi souffler grâce à un crédit supplémentaire de 87 millions. Les Chambres ont aussi donné leur feu vert à 7 millions destinés à étoffer le personnel au sein du Département fédéral des finances pour le suivi de la faillite de Credit Suisse.
En revanche, le crédit de 31,2 millions pour financer une compensation du renchérissement de 2,5% pour le personnel de la Confédération n'a pas passé. Les Chambres ont aussi approuvé les comptes 2022 de la Confédération. Le déficit de financement s'élève à 4,3 milliards.