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Protection contre la dépendance au jeu: des lacunes constatées dans la moitié des casinos suisses

Gros plan sur les mains d'une personne qui joue au poker en ligne. [Depositphotos - VitalikRadko]
Casinos: des lacunes dans la prévention / On en parle / 12 min. / le 27 juin 2023
D'après des rapports d'inspection 2021 et 2022 de la Commission fédérale des maisons de jeux, près de la moitié des 32 casinos physiques ou en ligne du pays présentaient des lacunes en matière de protection contre la dépendance aux jeux d’argent.

Il y a 5 ans, le peuple suisse a adopté une nouvelle loi sur les jeux d'argent. Celle-ci interdit notamment la publicité à l'intention des personnes mineures ou la publicité mensongère. Par ailleurs, les casinos sont tenus de prendre les mesures nécessaires afin de surveiller les comportements qui présentent des risques de dépendance au jeu.

Le pôle enquête de la RTS et l'émission On en Parle ont invoqué la loi sur la transparence afin d'obtenir les "lettres après inspection" de la Commission fédérale des maisons de jeux, l'organe responsable de la surveillance des casinos. L'analyse de ces documents montre que près de la moitié des casinos ont fait l'objet de remarques plus ou moins graves dans le domaine de la protection contre le jeu excessif.

Les lacunes des casinos suisses

Trois casinos en ligne sont par exemple montrés du doigt par la Commission. Elle relève des problèmes relatifs à la publicité, avec dans un cas un message publicitaire considéré comme trompeur car il permettait un gain aux 200 joueurs ayant le plus perdu d'argent au jeu.

Extrait de lettre du 9 mai 2022 de la Commission fédérale de jeux. [RTS - On en parle]
Extrait de lettre du 9 mai 2022 de la Commission fédérale de jeux. [RTS - On en parle]

Les casinos sont tenus de fixer des critères afin de repérer les joueuses et les joueurs qui présentent un risque de dépendance. Le personnel doit s’assurer que la personne ne mise pas des sommes démesurées par rapport à son revenu et sa fortune. Dans ce but, il peut lui demander des informations sur sa situation personnelle, professionnelle et financière tout en respectant la législation relative à la protection des données. Or, dans un rapport d’inspection, il est indiqué qu'un casino se basait sur des documents non actualisés, datant de plusieurs mois.

Extrait de lettre du 25 mai 2022 de la Commission fédérale de jeux. [RTS - On en parle]
Extrait de lettre du 25 mai 2022 de la Commission fédérale de jeux. [RTS - On en parle]

Un autre rapport d’inspection révèle qu'un casino ne demande par exemple pas suffisamment de preuves financières aux joueurs qui semblent montrer une dépendance au jeu. Ce même casino est également épinglé au niveau de la détection précoce par l’analyse des statistiques: sur 120 joueurs s'étant volontairement interdits de jeux, seuls 9 avaient été détectés par le casino au préalable.

Extrait de lettre du 26 août 2022 de la Commission fédérale de jeux. [RTS - On en parle]
Extrait de lettre du 26 août 2022 de la Commission fédérale de jeux. [RTS - On en parle]

Les conséquences de ces manquements

La Commission fédérale des maisons de jeux estime que la détection précoce fonctionne. Elle a expliqué par écrit à la RTS que "les lettres d'inspection permettent aux casinos d'améliorer leurs dispositifs". Elle dit aussi "vérifier que les mesures correctives sont mises en place". Elle a d’ailleurs engagé à trois reprises des sanctions pour violation des exigences légales en matière de protection sociale.

Les procédures sont en cours auprès du tribunal, qui n'a pas encore statué. Même son de cloche de la Fédération suisse des casinos, qui estime qu'"aucune autre mesure n'est nécessaire" et qui avance un chiffre: l'exclusion de 12'000 joueurs en 2021.

Mais les acteurs de la santé sont d'un tout autre avis. Camille Robert, co-secrétaire du GREA, le Groupement romand d’études des addictions, met en évidence la double mission des casinos de "faire de l'argent tout en s'assurant que les personnes qui dépensent cet argent n'entrent pas dans des situations d’addiction". Ce conflit d’intérêt est d’autant plus marqué "qu'on estime que les 3% des personnes dépendantes au jeu dans la population génèrent entre un tiers et la moitié des revenus des casinos".

Pour Camille Robert, "on ne peut pas parler de dégâts mineurs quand on sait qu'une personne touchée par l'addiction au jeu engendre un impact sur une douzaine de personnes dans son entourage, tant sur le plan financier que sur le plan de la santé mentale". Pour les milieux de la prévention, il est nécessaire de réévaluer la loi, ce qui devrait être fait d'ici la fin de l’année. Camille Robert avance une proposition pour améliorer la situation: que ce ne soit plus les casinos mais des personnes externes et indépendantes qui se chargent de la détection des situations à risque.

>> Ecouter l'interview de Camille Robert dans le 12h30 :

Camille Robert, co-secrétaire du Groupement romand d’études des addictions [Keystone]Keystone
La moitié des casinos suisses présentent des lacunes sur la protection des joueurs: interview de Camille Robert / Le 12h30 / 2 min. / le 27 juin 2023

Frédérique Volery, Marc Menichini & Bastien von Wyss / lp & mg

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Concerné par la dépendance au jeu?

Camille Robert propose simplement de se poser deux questions:

1. Ressentez-vous le besoin de miser toujours plus pour ressentir la même excitation?

2. Avez-vous déjà menti à vos proches à ce sujet?

En cas de réponse positive, il faut demander de l’aide. Quant à l'entourage des personnes dépendantes, il peut aussi bénéficier de soutien. Le site www.sos-jeu.ch renseigne largement sur ces sujets.