Aujourd'hui, l'énergie fossile représente 60% de la consommation, en particulier pour les bâtiments et les transports. En 2050, la Suisse devra être neutre en CO2, soit ne pas en émettre plus que ce qu'elle peut en absorber via ses forêts ou ses sols.
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Cela signifie bannir le gaz ou le mazout pour se chauffer, les voitures à moteurs thermiques pour se déplacer, et utiliser des camions à hydrogène ou le train pour le transport des marchandises. Selon les projections, cette loi peut permettre à la Suisse de réduire ses émissions de CO2, les faisant passer de 45 à 12 millions de tonnes par an.
Ce qu'on n'absorbe pas, il faudra le filtrer à la sortie des cheminées, le transporter par pipeline sous forme liquide vers des centres de stockage sous-terrain de CO2 en Islande ou en Norvège.
Le volume n'est pas un facteur limitant, le défi est plutôt de créer rapidement suffisamment d'infrastructures de transport et de stockage, mais je crois qu'on va trouver des solutions
Trois milliards d’incitation à la transition
Il faudra aussi réduire notre consommation de viande et mieux valoriser nos déchets. Pour y parvenir, la loi prévoit 3 milliards de francs d'incitations.
Si vous êtes propriétaire, vous faites peut-être partie des bénéficiaires des quelque 2 milliards de francs débloqués par cette loi pour soutenir la transition écologique. En l'occurrence en remplaçant un chauffage à mazout par une pompe à chaleur.
La loi prévoit aussi 1,2 milliard pour les entreprises qui vont développer des technologies respectueuses du climat, comme des systèmes de filtration du CO2.
L'électricité: le grand défi
Pour remplacer ces 60% d'énergie fossile, on aura besoin de beaucoup d'électricité, d'autant qu'on sera plus de 10 millions à vivre en Suisse.
L'idée est de miser principalement sur l'hydraulique et le photovoltaïque avec un soutien de l'éolien, du biogaz ou de la biomasse. Quant au solaire, qui représente aujourd'hui 6% de la consommation, ce chiffre devrait être multiplié par 10 d'ici 2050.
La Suisse doit investir plus dans les énergies renouvelables, mais des énergies qui produisent du courant électrique en hiver. Cela signifie qu'il faut construire des barrages, investir dans des éoliennes ou investir dans des panneaux solaires alpins. De quoi assurer dans les prochaines années assez d'électricité pour éviter les pénuries
Sortir de la dépendance
Aujourd'hui, la Suisse importe 70% de son énergie et elle dépend complètement de l'étranger pour le pétrole et le gaz naturel. Limiter leur utilisation, c'est donc aussi réduire notre dépendance. Tout comme augmenter notre production "propre" en électricité.
On apprenait la semaine dernière une augmentation des tarifs de l'électricité pour 2024 de plus de 12%, soit 126 francs de plus par ménage. Une prévision dont on saura si elle se confirme en août.
L'UDC veut du nucléaire
Sans taxe et sans interdiction, ce texte a été combattu par référendum par l'UDC. Au cœur de leur argumentaire, la peur des pénuries et d'augmentation des coûts de l'électricité. Battu, le parti cherche maintenant à rouvrir une autre discussion: le retour du nucléaire.
Comme le disait le conseiller national bernois Manfred Bühler dans Forum le soir du 18 juin 2023: "La question du nucléaire va revenir sur le tapis. C'est l'éléphant dans la pièce. Si nous voulons de l'électricité de masse fiable et pilotable pour répondre aux besoins en hiver, la Suisse ne pourra pas se passer du nucléaire."
Une proposition soutenue par une partie du PLR, mais que les producteurs suisses d'électricité n'estiment ni rentable ni réaliste.
Les solutions qui pourraient être envisageables pour la Suisse, les centrales de 4e génération, sont encore au stade de prototypes. S'il fallait prévoir leur entrée en fonction, ce ne serait pas avant 2044. Ce n'est donc pas raisonnable de mettre ce thème sur la table actuellement
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Les Verts veulent aller plus vite
Du côté des Verts, on veut accélérer le processus: "Le solaire a un potentiel qui représente davantage que la consommation actuelle, et la question qu'on doit se poser, c'est pourquoi on en est là aujourd'hui, pourquoi c'est si peu", déclarait la conseillère aux Etats genevoise Lisa Mazzone le soir du 18 juin 2023 dans Forum.
Sur ce point, les solutions doivent aussi être discutées dans la loi sur l'approvisionnement électrique et pour accélérer l'utilisation du potentiel de toits adaptés à la production de photovoltaïque, les Verts vont lancer une initiative populaire "pour le solaire".
Un premier pas important
Le oui à la loi sur le climat referme une législature qui s'est ouverte avec des manifestations pour le climat, puis l'échec de la loi CO2. Si l'objectif est clair, il reste beaucoup de travail et de discussions sur la manière de l'atteindre.
Claire Burgy