L'immigration observée depuis l'entrée en vigueur de la libre circulation des personnes a fortement influencé l'évolution de la population et du marché du travail en Suisse. L'attractivité de la Suisse a mené à une forte croissance de la population. Cette dernière a augmenté d'un peu plus de 0,9% par an, beaucoup plus que dans d'autres pays européens.
Ce sont les symptômes d'une économie et d'une croissance fortes, a dit mardi devant les médias la secrétaire d'Etat à l'économie Helene Budliger Artieda. La libre circulation n'en est pas la seule raison, a-t-elle reconnu.
Selon les résultats du 19e rapport de l'Observatoire sur la libre circulation des personnes, cette croissance économique a bénéficié aux travailleurs. La population suisse est aujourd'hui nettement plus qualifiée qu'il y a vingt ans.
Comme l'immigration sous le régime de la libre circulation se concentre essentiellement sur les personnes en âge de travailler, elle a également sensiblement freiné le vieillissement de la population au cours de ces vingt dernières années.
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Une immigration du travail
Les départs à la retraite imminents des personnes de la génération du baby-boom vont encore creuser le déficit démographique sur le marché du travail suisse, prévient le rapport. L'attractivité de la Suisse pour la main-d'œuvre étrangère semble toutefois rester intacte.
En 2022, l'immigration nette dans le cadre de la libre circulation des personnes a fortement progressé par rapport à l'année précédente. En tenant compte des titulaires d'un permis de séjour et des résidents de courte durée, un total de 54'600 personnes en provenance de l'UE et des pays de l'AELE ont immigré en Suisse l'an dernier.
Parmi ces personnes venues en Suisse, la participation à la vie active est très élevée. Ce sont les ressortissants du Portugal qui affichent la plus forte participation au marché du travail, avec 91,1%, suivis des ressortissants des Etats d'Europe de l'Est (85,7%) et de l'Allemagne (85,1%). A l'autre bout du spectre, on trouve la Croatie (66,3%).
Il s'agit donc d'une immigration du travail, pas d'une immigration de l'aide sociale, a souligné Helene Budliger Artieda. Le recours à l'aide sociale parmi ces personnes reste très faible, encore plus faible que chez les Suisses, montre le rapport.
Ces personnes, notamment celles venues du sud et de l'est de l'Europe, sont toutefois exposées à un risque de chômage supérieur à la moyenne. Un résultat lié à la représentativité des différents groupes de population dans les professions concernées par un risque de chômage, comme l'industrie ou la restauration.
Attention au travail précaire
La libre circulation n'est pas sans risque pour les travailleurs, a tempéré Daniel Lampard, chef économiste de l'Union syndicale suisse. Elle a tendance à encourager des formes de travail précaire, comme le travail temporaire et les travailleurs détachés.
Le travail sur appel a augmenté, ce qui bénéficie surtout aux entreprises de travail temporaire et met la pression sur les salaires. Pour les travailleurs détachés, notamment dans les régions frontalières, on constate un potentiel très élevé de dumping salarial, malgré les contrôles. Il y a des trous dans la protection des salaires, notamment dans les branches sans CCT comme la vente au détail, a illustré Daniel Lampard.
Les questions de migration et de politique européenne vont prendre de l'ampleur, a conclu le syndicaliste. L'UDC a en effet lancé son initiative "contre une Suisse à 10 millions".
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ats/hkr