L'Autriche, pays neutre, va également signer le document lors de la réunion de vendredi, qui se tient dans le cadre des rencontres trilatérales régulières DACH entre la Suisse, l'Allemagne et l'Autriche.
Chaque pays peut définir dans quelle mesure il participe au projet, indique le DDPS. Après signature de la déclaration d'intention, la Suisse pourra évaluer dans quels domaines la coopération doit être renforcée, par exemple en ce qui concerne l'échange d'informations.
Les pays neutres ont la possibilité de participer au projet dans de nombreux domaines. La Suisse, tout comme l'Autriche, a inscrit ses réserves dans une déclaration complémentaire, "notamment en vue d'exclure toute participation ou collaboration à des conflits militaires internationaux", écrit le DDPS dans son communiqué.
Renforcer la collaboration avec l'Otan
En mars déjà, lors d'un entretien avec le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg à Bruxelles, Viola Amherd avait présenté ses souhaits concrets de renforcer la collaboration de la Suisse avec l'alliance de défense. Jens Stoltenberg lui avait confirmé que l'Otan était ouverte à cette idée, avait-elle ensuite déclaré.
>> Plus d'informations : Viola Amherd a rencontré le chef de l'Otan Jens Stoltenberg à Bruxelles
Le chancelier autrichien Karl Nehammer avait déjà annoncé samedi que l'Autriche envisageait d'adhérer au projet allemand de mise en place d'un meilleur système européen de défense aérienne.
L'initiative "European Sky Shield" a été lancée par l'Allemagne en août 2022 et regroupe actuellement 17 pays, dont les membres de l'Otan suivants: Grande-Bretagne, Slovaquie, Lettonie, Hongrie, Bulgarie, Belgique, République tchèque, Finlande, Lituanie, Pays-Bas, Roumanie, Slovénie, Estonie et Norvège. En février, la Suède, pays candidat à l'adhésion à l'Otan, et le Danemark se sont également joints au projet.
Une intention mal reçue au Parlement
Cette annonce du DDPS a créé la surprise à Berne. Beaucoup d'élus regrettent d'avoir appris les intentions de Viola Amherd par la presse. La conseillère fédérale aurait dû au moins informer les commissions parlementaires compétentes, dit-on à droite comme à gauche.
Les conseillers nationaux Fabien Fivaz (Vert/NE) et Jean-Luc Addor (UDC/VS) sont unanimes: on ne leur en a jamais parlé. "C’est problématique de l’apprendre par la presse", estime Fabien Fivaz dans le 19h30 de la RTS, tandis que Jean-Luc Addor affirme qu'il est "particulier de mettre le Parlement hors-jeu".
Et sur le fond, ce ne n’est pas mieux, estime le Valaisan. Selon lui, signer cette déclaration piétinerait la souveraineté de la Suisse.
"Notre intérêt, c'est de pas nous mêler d'une guerre qui n'est pas la nôtre", affirme-t-il dans l'émission Forum. "On est en train de devenir le valet des États-Unis, parce que l'Otan n'est rien d'autre que l'outil de projection de la puissance américaine dans le monde", pousuit-il.
Quant à Fabien Fivaz, il pense au contraire que le DDPS fait preuve de pragmatisme. "La Russie a énormément de missiles à courte et moyenne portée pour attaquer le territoire ukrainien", affirme-t-il. "Et la détection précoce des missiles ne peut pas se faire seulement en Suisse, elle doit se faire en coopération avec nos voisins européens", poursuit-il.
hkr avec agences
Le GSsA dénonce
Le groupe pour une Suisse sans armée (GSsA) a dénoncé un rapprochement avec l'Otan par "une tactique du salami" qu'il juge antidémocratique.
Il s'inquiète notamment de l'échange de données sensibles qui résultera de la participation de la Suisse à Sky Shield en se demandant notamment qui y aura accès et comment le pays garantira son indépendance dans les prises de décision.
Position suisse "ambiguë, sinon hypocrite"
Pour Camille Grand, ex-secrétaire général adjoint de l'Alliance atlantique et chercheur au Conseil européen pour les relations internationales, l'initiative est bonne mais elle est pleine d'ambiguïtés.
"C'est un peu ambigu, sinon hypocrite, (...) en parallèle des restrictions très nettes que met la Suisse aux exportations d'équipement vers l'Ukraine en mettant en avant sa neutralité", relève celui qui est actuellement chercheur au Conseil européen pour les Relations internationales.
>> Lire à ce sujet : Le Conseil fédéral refuse à Ruag la réexportation de chars Leopard 1 A5
Face à cette attitude helvétique, "il y a une forme d'agacement" au sein des alliés, estime Camille Grand. Des questions se posent à propos de "cette coopération avec la Suisse si ça crée de telle difficultés pour avoir des exportations dans des pays aussi importants pour la sécurité européenne que l'Ukraine".