Après un premier pic de chaleur la semaine dernière, la suite de l'été s’annonce caniculaire avec de nouvelles vagues attendues ces prochains jours un peu partout en Europe.
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Et la Suisse n'est pas épargée. Le niveau des lacs, des rivières et des nappes phréatiques du pays ne fait d'ailleurs que diminuer, poussant certains communes romandes à annoncer des mesures de restriction. La Ville de Nyon, par exemple, interdit depuis début juillet à la population l'arrosage des pelouses, le remplissage des piscines ou encore les nettoyages extérieurs.
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Une gestion intégrée
Pour Isabelle Butty, cheffe de la section Eaux et Sols dans le canton de Neuchâtel, ces mesures prises localement pour préserver l'or bleu ne sont pas exagérées, au contraire: "On est actuellement en état de sécheresse en Suisse", a-t-elle déploré au micro de La Matinale lundi. "Le début de l’année 2023 a été marqué par un déficit en précipitations. Et surtout, il faisait suite à une année 2022 déjà largement déficitaire", poursuit-elle.
Dans l'avenir toutefois, ces dispositions communales ne suffiront plus. Il faudra aller plus loin, en repensant notamment l'entier de nos systèmes de gestion de l'eau, insiste-t-elle. Des réseaux actuellement encore trop souvent alimentés par de l'eau potable alors que cela ne se justifie pas toujours, notamment lorsqu'il s'agit d'arroser son jardin ou de remplir sa piscine.
J'espère qu'on va trouver un bon système de gestion de l'eau plutôt qu'une guerre.
"Il faut envisager une gestion dite intégrée", souligne l'hydrogéologue. C’est-à-dire qu'il faut mettre en place un système pour utiliser l’eau, ou la protéger, de la manière la plus judicieuse possible. Car, comme elle l'explique, l'eau remplit une multitude de fonctions différentes. "Il y a beaucoup d’usages différents de l'eau", la première étant celle d'abreuver la population. Une eau potable qui est également utilisée pour se laver, pour tirer la chasse aux toilettes, pour remplir sa piscine ou pour arroser les cultures. Ce qui peut paraître aberrant par les temps qui courent, note-t-elle.
Réfléchir à des solutions
Une multifonctionnalité de l'or bleu dont la population n'a d'ailleurs pas toujours conscience, et sur laquelle il serait peut-être judicieux de sensibiliser. Pour limiter autant que possible son gaspillage, "il faut que l'on réfléchisse à coordonner les différents usages de l'eau". Dans les cantons lacustres, comme Neuchâtel ou Vaud par exemple, les agriculteurs pourraient prélever l'eau du lac pour arroser leur culture plutôt que d'utiliser de l'eau potable, imagine Isabelle Butty.
Pour elle, tout reste à faire. "On a l'idée en Suisse qu'on n'a pas de problème d’eau, mais on va en avoir un, et il faut s’y préparer. Il y a beaucoup de pays qui traversent des conflits liés à l'eau", avertit-elle.
Mais si la France parle déjà de guerre de l’eau, la cheffe de la section Eaux et Sols du canton de Neuchâtel se refuse à être trop alarmiste. "J'espère qu'on va trouver un bon système de gestion de l'eau plutôt qu'une guerre." Et il n'est pas trop tard: "Il faut accorder de la place à l'eau dans la politique, comme on le fait pour le climat ou pour l'énergie."
Propos recueillis par Aleksandra Planinic
Adaptation web par Fabien Grenon